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Critique de Darkcook


Raaaaaaaaah... Quelle fin frustrante et amère pour ce pauvre Lloyd... Idem pour le lecteur. Linda Wilhite, femme fatale du roman, si elle est à l'origine d'un superbe échange avec Richard Oldfield vers la fin, comme seul Ellroy sait en écrire sur les femmes, prend une décision, même si compréhensible, qui est ô combien décevante quand on vit l'histoire à travers Hopkins... du coup, l'avis général, déjà mitigé, est sapé. Qu'on se comprenne bien : c'est du très bon polar, mais c'est du moyen Ellroy.

Le maître (non, je ne le déïfie pas comme les patients d'Havilland avec ce cher Docteur... LA PORTE VERTE!!!) est ici à ses débuts. Il a dit lui-même qu'il s'était arrêté après le tome suivant pour écrire des romans bien plus ambitieux, sans quoi, il aurait écrit des Lloyd Hopkins toute sa vie. Grand bien lui en a pris!!! Quand on connaît ses chefs d'oeuvre ultérieurs, pleins d'ampleur, où tout est décuplé, où les personnages et Los Angeles ont une telle dimension... On a l'impression de régresser en découvrant ses premiers romans, où tout est là, en plus concis mais encore un peu maladroit, inégal, avec des scènes cultes, un sens du suspense grandiose, et des défauts ça et là. Mais bon, c'est un passage obligé pour les fans, c'est amusant de le voir tatonner, confectionner des romans plus simples... Et puis quand on est fan on veut tout lire, tout dévorer!

Lune sanglante était un chef d'oeuvre, une incontestable réussite, un opéra tragique shakespearien, ce n'est pas pour rien qu'il a bouleversé Jean-Patrick Manchette et François Guérif. À partir de là, la tâche était ardue pour sa suite... Après un psychopathe poète lyrique amoureux des femmes (ou du moins le croyait-il...) à la vingtaine de victimes, James Ellroy diffracte la menace et nous offre un psychiatre manipulateur qui fait de ses patients de potentiels meurtriers... L'idée est excellente, mais elle se réduit à une poignée de victimes et émissaires plutôt qu'à une véritable foule de dégénérés pathétiques, et de plus, on est moins en empathie avec le personnage, malgré son trauma enfantin (au passage, beau retournement que de faire du père d'Havilland son idole en tant que meurtrier) le pseudo-jargon psychologique, avec toutes ses fantaisies, le rend également un peu cliché. le fait qu'il soit réduit à un légume est logique, mais participe de cette frustration finale, on l'aurait voulu mort... Enfin, la partie de l'affaire sur les dossiers n'est pas vraiment passionnante.

Les points forts du roman sont surtout le face-à-face entre Lloyd et Havilland, et le personnage de Marty Bergen, perçu comme totalement annexe au début, et qui accède à un statut tragique et pathétique nous déchirant le coeur. Ex-flic déchu dénonçant les abus des flics de droite, il meurt en héros dont les exploits seront cachés du public... Et fait taire tous les détracteurs d'Ellroy qui prennent au premier degré sa persona médiatique de droite profonde!

Je suis donc déçu. Pas mal de passages ellroyiens jouissifs, mais pas mal de frustration également. Lune sanglante est infiniment meilleur à mon goût.
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