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Critique de JaneetWallace


Attention, grand livre !
Déjà il y a le titre, et quel titre …
Presque le silence… C'est une histoire d'effondrements. Effondrement intime, quasi inéluctable de chaque être humain et celui plus universel de notre civilisation. C'est l'histoire de grandes pertes, c'est une histoire de transmission et d'héritage.

Cassandre a 11 ans, elle passe ses vacances chez Pépé Jean dans le sud de la France. Cassandre est souvent en colère, en colère « à cause du monde et des questions qui écrasent ». Auprès de son pépé, elle revit, entourée de nature, d'affection et d'attention. Pourtant, cet été, Cassandre va perdre son enfance. Première perte.

Cassandre a un problème, une douleur qui lui bousille la vie : elle est rousse. La cible idéale des railleries, des insultes. Au collège, toute la violence du monde s'abat sur ses 13 ans. Cassandre perd son innocence.

Cassandre est amoureuse de Camille, un beau blond, qui préfère les chevaux aux filles. Méchant comme les autres, il suit la meute ; Mais c'est lui qu'elle veut, elle n'en démord pas. Alors Cassandre a une idée : consulter un voyant pour savoir si un jour, elle sera aimée en retour.
Oui, Camille va l'aimer, les augures sont formels mais cette délicieuse promesse est assortie de 5 terribles prophéties sur son avenir et celui du monde.

Presque le silence est l‘histoire d'un long délabrement sous la violence du monde, une violence sauvage, quotidienne, sans aucun sens. Comment un être sensible peut-il y survivre ? Cette violence qui écrase et qui stupéfie, on la prend dans la tête, à grands coups de mots !

Après l'inoubliable Antoine, Julie Estève nous offre Cassandre, son âme-soeur. Et les mots tapent très fort. L'auteure met ses tripes sur la table avec ce texte à vif, truffé de phrases définitives qui cognent. C'est un texte explosif et sensoriel au rythme syncopé, l'impression d'un stroboscope, ça claque, ça flashe, ça martèle. C'est aussi un cri poussé sur des pages blanches, un cri qui nous jette à la figure : « mais que faisons-nous de notre humanité » ? Un véritable appel à l'amour !

J'ai lu ce texte en apnée, foudroyée par cette écriture à l'os, comme ce tableau de Dürer en couverture, cette aile comme tranchée net. Chaque mot est à sa juste place. C'est un roman profondément humain, un énorme coup de coeur !

C'est pour des textes comme celui-ci que j'aime si passionnément la littérature.

« Je ne suis pas loin de penser que le bonheur est une fausse bonne idée. J'ai peur de tout perdre »
« Ne retiens de la vie que l'amour, il n'y a que l'amour ».
« le soleil m'enveloppe. Une joie simple occupe mes heures. J'ai remisé l'angoisse au fond de ma tête. Je ne lis pas les journaux. Il n'y a pas de télévision. J'observe le ciel, les arbres, l'eau. Leurs couleurs mouvantes. Je ne sais rien du monde. Des déceptions du monde. Je suis en dehors. A côté de la plaque. Déconnectée des gens, des liens funestes qui les abiment et les broient. Je veille à ce que la violence ne me pénètre pas. Je me tiens loin des tragédies courantes, et le réel s'évanouit… Ici rien ne peut m'arriver… »
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