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Critique de Arakasi


Tout débute dans une petite ville du Michigan dans les années 70, une bourgade tranquille, prospère, aux allées bien droites et aux jardins soigneusement taillés, où s'épanouit une classe blanche et bourgeoise aux moeurs aussi placides qu'ennuyeuses. Pourtant un malaise plane sur tout ce calme apparent, un malaise sourd et insidieux qui prend brutalement forme quand Cécilia Lisbon, la cinquième fille de Mr Lisbon le professeur de mathématique du lycée du quartier, est retrouvée dans sa baignoire, les veines de son poignet lacérées. Sa tentative de suicide va plonger la petite communauté dans la confusion, mais sera surtout être à l'origine d'un drame bien plus horrible puisque, une à une, les quatre filles Lisbon survivantes vont lui emboiter le pas, suivant leur cadette dans la mort. Cette quintuple tragédie marquera à jamais la mémoire de la ville, mais elle restera particulièrement une source de fascination pour les garçons du quartier, tous adolescents à l'époque et tous passionnément amoureux des troublantes filles Lisbon, si blondes, si belles, si insaisissables et si désespérées. Vingt ans plus tard, les garçons devenus des hommes mariés et bedonnants se replongent dans leurs souvenirs et font revivre pour nous les fantômes de Thérèse, Bonnie, Lux, Mary et Cécilia dans une ultime et futile tentative pour comprendre leur impénétrable souffrance.

Difficile en se plongeant dans « Virgin Suicides » de s'ôter totalement de l'esprit la magnifique et quasi-hypnotique adaptation réalisée par Sofia Coppola en 1999. A chaque page tournée, les éblouissantes chevelures dorées des filles Lisbon ondulent devant nos yeux et la musique cristalline du film résonne dans nos oreilles… Rares, en vérité, sont les adaptations qui parviennent aussi finement à retranscrire l'âme d'une oeuvre. Pourtant le roman de Jeffrey Eugenides se suffit déjà très bien à lui tout seul avec son infinie délicatesse, sa poésie non dénuée d'humour grinçant et son obsédante mélancolie. Les lecteurs avides de rationalisme seront peut-être déçus par les multiples questions sans réponses qui parsèment le récit, mais c'est en partie cette omniprésence du non-dit qui rend le roman si captivant. Aucune explication satisfaisante ne sera jamais trouvée aux suicides des cinq adolescentes et, par la grâce du secret, leur sort funeste quitte ainsi le domaine du fait divers pour prendre des allures de mythe. le tout donne un très très beau roman, à l'écriture débordante d'audace et de pudeur, et accessoirement un des livres les plus justes que j'ai eu l'occasion de lire sur l'adolescence et la magie mystérieuse des premiers amours.
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