Aux morts importe peu, je pense, la richesse des dons qui les suivent sous terre. Il n'y a là rien qu'une vaine gloire pour l'orgueil des vivants.
Tels sont nos regrets, telles sont les douleurs que nous éprouvons dans la ruine de notre patrie. La douleur s'ajoute à la douleur, par l'effet du courroux des dieux, depuis que la mort a épargné ton fils Pâris, qui pour un odieux hymen, a renversé l'empire des Troyens. Pour satisfaire la haine de Pallas, les corps sanglants de nos guerriers sont devenus la pâture des vautours et Troie a subi le joug de l'esclavage.
CASSANDRE. [...] Pour une seule femme et pour un seul lit, pour reprendre Hélène, ils ont détruit des milliers d'hommes. Voici qu'un chef plein de sagesse a sacrifié, pour un objet digne de haine, son plus cher bien, la joie de son foyer : il a livré son enfant à son frère, à cause d'une femme qui n'a point été enlevée de force, mais qui s'est enfuie volontairement. Ils sont venus au bord du Scamandre, ils sont morts, et ce n'était pas pour reconquérir leur terre ni les hautes tours de leurs cités ; et ceux qu'a égorgés Arès n'ont point revu leurs enfants, ils ne seront pas enveloppés de voiles funèbres par leurs femmes, car ils gisent sur une terre étrangère ! Même malheur dans leurs foyers aussi : les veuves mouraient, les pères restaient privés de leurs enfants vainement élevés, et nul ne fait ruisseler le sang des victimes sur leur tombeau. Certes, cette expédition est bien digne d'être louée !
Premier épisode
J'ai tout perdu. Orgueilleuse splendeur, accumulée par mes aïeux, qu'étais-tu ? un néant.
Fou qui s'imagine, dans la prospérité, pouvoir s'en réjouir comme d'un bien durable. Les destins se comportent ainsi qu'une lunatique qui bondit au hasard.
HÉCUBE. De tous mes enfants, autant qu'ils étaient, il ne me reste ni fils ni fille qui vienne en aide à ma misère ! Pourquoi me relevez-vous ? Conduisez mes pieds, si délicats naguère dans Troie et maintenant esclaves, conduisez-les vers la terre, ma couche, et sur le lit d'un roc afin que, noyée de larmes, je m'y laisse tomber et mourir ! Et, désormais, ne dites d'aucun qu'il est heureux avant qu'il soit mort !
(Elle se laisse retomber.)
Que trouvera bien un poète à graver sur ta tombe ? " Ici gît un enfant que les Grecs ont tué tant ils en avaient peur. "
Ceux qui tombaient, ce n'était pas pour reconquérir leurs frontières, leur citadelle. (...) Oui, on peut les féliciter, ceux qui ont entrepris cette guerre ! (...) Le devoir d'un sage est assurément d'éviter la guerre.
Une nuit, dit-on, suffit à détendre l'aversion d'une femme pour l'homme qui la met dans son lit.
Troie a péri, la grande cité
Seule y vit encore la longue flamme rouge.
EURIPIDE « Les Troyennes »