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Critique de gabb


Boris est cinéphile, Boris est scénariste, et Boris a UN projet : écrire un GRAND film.
Un film d'auteur qui ferait date, un film qui dessinerait un sourire immense sur le visage du petit bonhomme Telerama, un film qui dirait la Vie (rien que ça !), "la vie en une heure et demi, en 128 feuillets".

Alors le jeune homme travaille d'arrache-pied, et quand la première mouture de son scénario, "Les servitudes silencieuses", semble retenir toute l'attention d'un producteur, c'est la délivrance : enfin pour Boris le jour de gloire est proche !
Comme il se doit pour un bijou du septième art, le film sera tourné en noir et blanc, et le casting idéal est déjà tout trouvé (qui d'autre que Louis Garrel et Mélanie Thierry pour incarner Ariel et Marianne ?). Il ne reste plus qu'à régler les derniers détails pour séduire M6 et satisfaire aux exigences des commanditaires qui financeront le projet, et déjà Boris commence à réfléchir au costume qu'il portera à Cannes pour la montée des marches.

Et c'est là que le génial Fabcaro entre en scène.
Fabcaro et son humour ravageur, Fabcaro et sa plume délicieusement absurde, Fabcaro et sa tendresse revendiquée pour les gentils loosers, pour les braves types emberlificotés dans des situations toujours plus improbables, bouffés par les petites désillusions du quotidien.
Ici c'est Boris qui s'y colle, et qui endosse bien malgré lui malgré lui le costume du parfait pigeon broyé par les rouages de la machine télévisuelle : une fois encore, les mésaventures de ce sympathique anti-héros, incapable de dire non pour ne vexer personne, sont parfaitement jubilatoires !

Contraint au fil des pages de réviser son scénario, le pauvre garçon - au manque criant de personnalité et de confiance en lui - assiste impuissant au naufrage de son chef d'oeuvre, et de concessions en concessions, le joyau cinématographique espéré part en capilotade. Quel crève-coeur que de voir peu à peu sa formidable histoire romantique pleine de silences évocateurs et de profondeur dramatique se transformer en comédie potache formatée TF1 !
Chaque nouveau rendez-vous entre Boris et ses producteurs est l'occasion d'un nouveau quiproquo, chaque proposition d'affiche est plus ridicule que la précédente, chaque texto échangé avec Aurélie (la jeune prof de cinéma dont notre scénariste est tombé amoureux et qui voit en lui le nouveau Woody Allen) donne lieu à d'interminables dilemmes quant au choix du smiley à envoyer en guise de conclusion ("Nous sommes cette génération que L Histoire a plus ou moins épargnée et dont les grandes tragédies se résument à : par quelle émoticône conclure ?")

Résultat : on se marre, bien sûr, et on s'émeut aussi du sort que l'auteur réserve à son narrateur, plein d'ambitions et d'idéaux artistiques mais trop régulièrement rattrapé par ce foutu principe de réalité !

Un régal, et une preuve supplémentaire - si besoin était - du grand talent de Fabcaro : lui seul connaît l'exacte fréquence qui fait à ce point vibrer mes zygomatiques !
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