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Citations sur Les vers dorés de Pythagore (16)

Pythagore envisageait l'Homme sous trois modifications principales, comme l'Univers ; et voilà pourquoi il donnait à l'homme le nom de microcosme ou de petit monde. Rien de plus commun chez les nations anciennes que de comparer l'Univers à un grand homme, et l'homme à un petit univers. L'Univers considéré comme un grand Tout animé, composé d'intelligence, d'âme et de corps, était appelé Pan ou Phanès(1).

L'homme, ou le microcosme était composé de même, mais d'une manière inverse, de corps, d'âme et d'intelligence ; et chacune de ces trois parties était à son tour envisagée sous trois modifications, en sorte que le ternaire régnant dans le tout, régnait également dans la moindre de ses subdivisions. Chaque ternaire, depuis celui qui embrassait l'Immensité, jusqu'à celui qui constituait le plus faible individu, était, selon Pythagore, compris dans une Unité absolue ou relative, et formait ainsi, comme je l'ai déjà dit, le quaternaire ou la tétrade sacrée des pythagoriciens.

Ce quaternaire était universel ou particulier. Pythagore n'était point, au reste, l'inventeur de cette doctrine : elle était répandue depuis la Chine jusqu'au fond de la Scandinavie. On la trouve élégamment exprimée dans les oracles de Zoroastre.

Le Ternaire partout brille dans l'Univers,
Et la Monade est son principe.

Ainsi, selon cette doctrine, l'homme, considéré comme une unité relative contenue dans l'Unité absolue du grand Tout, s'offrait, comme le ternaire universel, sous les trois modifications principales de corps, d'âme et d'esprit ou d'intelligence. L'âme, en tant que siège des passions, se présentait à son tour sous les trois facultés d'âme raisonnable, irascible ou appétante. Or, suivant Pythagore, le vice de la faculté appétante de l'âme, c'était, l'intempérance ou l'avarice ; celui de la faculté irascible, c'était la lâcheté ; et celui de la faculté raisonnable, c'était la folie. Le vice qui s'étendait sur ces trois facultés, c'était l'injustice. Pour éviter ces vices, le philosophe recommandait quatre vertus principales à ses disciples, la tempérance pour la faculté appétante, le courage pour la faculté irascible, la prudence pour la faculté raisonnable, et pour ces trois facultés ensemble, la justice, qu'il regardait comme la plus parfaite des vertus de l'âme. Je dis de l'âme, car le corps et l'intelligence se développant également au moyen de trois facultés instinctives ou spirituelles, étaient, ainsi que l'âme, susceptibles de vices et de vertus qui leur étaient propres.

(1) Pan, en grec Πάν, signifie le Tout, et Phanès dérive du mot phénicien אנש (ânesh), l'Homme, précédé de l'article emphatique פ (ph). Il faut remarquer que ces deux noms s'élèvent sur la même racine אן (ân), qui, dans un sens figuré, exprime la sphère d'activité, et dans un sens propre, la circonscription de l'être, son corps, sa capacité. De là, אני (âni), moi, et אניח (aniha), un vaisseau. (pp. 239-242)
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Il est digne d'observation que Pythagore commence la partie purgative de sa doctrine par recommander l'observance des devoirs naturels, et qu'il place au rang des premières vertus la piété filiale, l'amour paternel et conjugal. Ainsi cet admirable philosophe met son premier soin à resserrer les liens du sang, à les rendre chers et sacrés ; il prêche le respect aux enfants, la tendresse aux pères, l'union à tous les membres de la famille ; il suit ainsi le sentiment profond qu'inspire la Nature à tous les êtres sensibles ; bien différent en cela de quelques législateurs aveuglés par une fausse politique, qui, pour conduire les hommes à je ne sais quelle force et quel bonheur imaginaires, ont voulu, au contraire, briser ces liens, anéantir ces rapports de père et de fils et de frère, pour concentrer, disaient-ils, sur un être de raison appelé la Patrie, l'affection que l'âme divise sur ces objets de son premier amour.

Si ces législateurs avaient voulu réfléchir un moment, ils auraient vu qu'il n'existe point de patrie pour celui qui n'a point de père, et que le respect et l'amour que l'homme dans son âge viril ressent pour les lieux de sa naissance, tiennent leur principe et reçoivent leur force de ces mêmes sentiments qu'il ressentit dans son enfance pour sa mère. Tout effet annonce une cause ; tout édifice repose sur des fondements : la véritable cause de l'amour de la patrie est l'amour maternel ; les seuls fondements de l'édifice social sont la puissance paternelle et le respect filial. De cette seule puissance découle celle du Prince, qui, dans tout état bien organisé, étant considéré comme le Père du peuple, a droit à l'obéissance et au respect de ses enfants.
(...)
La piété filiale est la vertu nationale des Chinois, le fondement sacré sur lequel repose l'édifice social du plus grand, du plus ancien peuple du Monde. Cette vertu est à la Chine, depuis plus de quatre mille ans, ce que fut à Sparte ou à Rome l'amour de la patrie. Sparte et Rome se sont écroulées, malgré l'espèce de fanatisme dont leurs enfants étaient animés, et l'empire chinois, qui subsistait deux mille ans avant leur fondation, subsiste encore deux mille ans après leur chute.

Si la Chine a pu se conserver au milieu du flux et du reflux de mille révolutions, se sauver de ses propres naufrages, triompher de ses propres défaites, et subjuguer ses conquérants mêmes, elle le doit à cette vertu qui, s'élevant depuis le dernier citoyen jusqu'au Fils du ciel, assis sur le trône impérial, anime tous les cœurs d'un feu sacré, dont la nature elle même fournit les aliments et éternise la durée. L'empereur est le père de l’État ; deux cents millions d'hommes qui se regardent comme ses enfants composent son immense famille ; quel est l'effort humain qui pourrait renverser ce colosse ? (pp. 208-209 & 211-212)
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Pythagore considérait l'Univers comme un Tout animé dont les Intelligences divines, rangées chacune selon ses perfections dans sa sphère propre, étaient les membres. Ce fut lui qui désigna le premier ce Tout par le mot grec Kosmos, pour exprimer la beauté, l'ordre et la régularité qui y règnent(1) ; les Latins traduisirent ce mot par Mundus, duquel nous avons fait le mot français Monde. C'est de l'Unité considérée comme principe du monde que dérive le nom d'Univers que nous lui donnons. Pythagore posait l'Unité pour principe de toutes choses, et disait que de cette Unité était sortie une Duité infinie. L'essence de cette Unité et la manière dont la Duité qui en émanait y était enfin ramenée, étaient les mystères les plus profonds de sa doctrine, les objets sacrés de la foi de ses disciples, les points fondamentaux qu'il leur était défendu de révéler. Jamais on n'en confiait l'explication à réécriture : on se contentait de les enseigner de bouche à ceux qui paraissaient dignes de les apprendre.

Lorsqu'on était forcé par l'enchaînement des idées, d'en faire mention dans les livres de la secte, on se servait de symboles et de chiffres, on employait la langue des Nombres ; et ces livres, tout obscurs qu'ils étaient, on les cachait encore avec le plus grand soin ; on évitait par toutes sortes de moyens qu'ils ne tombassent dans les mains des profanes.
(...)
Ce philosophe [Pythagore] avait à cet effet divisé sa doctrine en deux parties : la partie purgative et la partie unitive, par la première, l'homme se purifiait de ses souillures, sortait des ténèbres de l'ignorance, et parvenait à la vertu : par la seconde, il employait sa vertu acquise à s'unir à la Divinité, au moyen de laquelle il arrivait à la perfection. Ces deux parties se trouvent bien distinctes dans les Vers dorés. Hiérocles qui les a bien saisies, en parle dans le commencement de ses Commentaires, et les désigne par deux mots qui renferment, dit-il, toute la doctrine de Pythagore, purification et perfection.

Les mages et les Chaldéens, dont Pythagore avait adopté tous les principes, s'accordaient en ce point, et se servaient, pour exprimer leur idée, d'une phrase parabolique fort célèbre parmi eux. « Nous consumons, disaient-ils, le fumier de la matière par le feu de l'amour divin ».

(1) Le mot grec Kosmos exprime une chose mise en ordre, arrangée d'après un principe fixe et régulier. Sa racine primitive est dans le phénicien אזש (aôsh) un Être principe, le feu. Le mot latin mundus rend très-imparfaitement le sens du grec. Il signifie exactement ce qui est rendu net et propre au moyen de l'eau. Sa racine prochaine est unda, et sa racine éloignée se trouve dans le phénicien ; אזר (aôd), une émanation, une vapeur, une source. On voit, d'après cette étymologie, que les Grecs tiraient l'idée de l'ordre et de la beauté, du feu, et les Latins, de l'eau. (pp. 197-199 & 206-207)
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Homme, libre penseur! te crois-tu seul pensant
Dans ce monde où la vie éclate en toute chose ?
Des forces que tu tiens ta liberté dispose,
Mais de tous tes conseils l'univers est absent.

Respecte dans la bête un esprit agissant.
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Chaque fleur est une âme à la Nature éclose;
Un mystère d'amour dans le métal repose,
"Tout est sensible!" Et tout sur ton être est puissant.
Crains, dans le mur aveugle, un regard qui t'épie
A la matière même un verbe est attaché…
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Les théosophes et les sages avaient senti ces difficultés ; ils avaient vu qu'il fallait supprimer tout discours, éloigner tout simulacre ; renoncer à toute enceinte, anéantir enfin tout objet sensible, ou s'exposer à donner de fausses idées de l'essence absolue d'un Être que l'espace et le temps ne pouvaient contenir. Plusieurs osèrent l'entreprendre.

On sait, en s'enfonçant dans une antiquité très reculée, que les plus anciens Mages de la Perse n'élevaient aucun temple et n'érigeaient aucune statue. Les Druides en usaient de même. Les premiers invoquaient le Principe de toutes choses sur le sommet des montagnes ; les seconds, dans la profondeur des forêts. Les uns et les autres jugeaient indigne de la Majesté divine de l'enclore dans une enceinte, et de la représenter par une image matérielle. Il paraît même que les premiers Romains partageaient cette opinion. Mais ce culte entièrement intellectuel et dénué de formes, ne saurait subsister longtemps. Il faut, au peuple, des objets sensibles sur lesquels ses idées puissent se reposer. Ces objets s'insinuent en dépit même du législateur qui cherche à les proscrire. Les images, les statues, les temples se multiplient malgré les lois qui les défendent. Alors, si le culte n'éprouve pas une réforme salutaire, il se change, ou en un grossier anthropomorphisme, ou en un matérialisme absolu : c'est-à-dire, que l'homme du peuple, ne pouvant s'élever jusqu'à l'Unité divine, l'abaisse jusqu'à lui ; et que le savant ne pouvant la comprendre et croyant néanmoins la saisir, la confond avec la Nature.

C'était pour éviter cette catastrophe inévitable que les sages et les théosophes avaient fait, comme je l'ai dit, un mystère de l'unité de Dieu, et l'avaient cachée au fond des sanctuaires. Ce n'était qu'après des épreuves multipliées et lorsque l'initié était jugé digne d'être admis au sublime degré de l'autopsie, qu'on soulevait à ses yeux le dernier voile, et qu'on livrait à sa contemplation le principe et la fin de toutes choses, l'Être des êtres, dans son insondable unité. (pp. 367-368)
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