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Critique de Bookycooky


Claire Bodin n'imagine pas que ces parents brûlés, cette directrice vipérine, ces collègues lassés pourraient ensemble lui faire du mal. Comment l'imaginer quand on est sûr de ne pas le mériter ?”
L'Embellie, établissement médico-professionnel accueille des ados en difficulté, trisomiques, entre quatorze et vingt ans. Et c'est là qu'arrive le jeune Gabriel Noblet , un lundi 13 septembre dans la classe de Claire Bodin, enseignante en secrétariat et bureaucratique, qu'il rencontre pour la première fois….À l'Embellie les priorités sont accueillir, aider, ne pas juger, inclure, dans lesquelles s'y retrouve Claire. Pourtant ces priorités disparaissent dans le maelström de parents et enseignants qui sont loin de comprendre ces ados, ne vivant pas dans le même monde qu'eux. Alors que pour Claire ces ados élargissent la perspective sur la condition d'homme, pour les parents ils sont source de souffrance, une souffrance qu'ici va inévitablement engendrer la méchanceté, l'inimaginable ….

Ferney attaque ici un sujet compliqué et douloureux partant de faits réels. Claire est-elle responsable des faits ? Difficile de prendre parti tant les angles de vus sur le sujet peuvent être différents tout en ne se contredisant pas. En faites elle n'a pas de compétences pour enseigner à des enfants trisomiques à part une formation de six mois à l'initiative de l'établissement, ce qui est à mon avis insuffisant. Mais son bon sens, son intelligence et son grand coeur, la rend soucieuse de la liberté et du bonheur de ces enfants sous le joug de notre société standardisée et normative, bureaucratique et oppressante. Pourtant son approche si humain va la mettre dans le pétrin, justement à cause de son incompétence concernant les enfants handicapés, surtout qu'ici il s'agit d'un ado de dix-sept ans. Et franchement , je n'ai pas été vraiment surpris par l'accusation de la mère de l'ado, « on ne les touche ni physiquement, ni sentimentalement. », surtout que par la suite il s'avère qu'effectivement il aurait mieux valu qu'on ne le touche pas. Car l'affection , l'amour ces enfants devraient le recevoir dans la famille, l'école pourrait être éventuellement complémentaire mais dans un cadre plus compétent je suppose. D'un autre côté les réactions de la direction de l'établissement et ce qu'elle exigera de Claire sont aussi exagérés voir ridicules et insensés, comme la condamner à une expertise psychiatrique de quelques séances qui n'a aucune valeur juridique ,n'étant qu'un avis non une preuve.
Le portrait robotique de Claire que dresse Ferney complique encore plus l'approche du lecteur , lectrice à l'événement. Mère parfaite, épouse parfaite, enseignante parfaite, personnage civile parfait, “Elle a toujours eu un bon contact, en général les gens l'adorent,”, ….trouvez l'intrus 😁, puisque malgré cette perfection surestimant le pouvoir de son innocence elle ne tiendra pas la route pour finalement n'attirant ni empathie ni sympathie , du moins pour moi. Comme couple aussi ,Claire et son mari sont parfait , « La confiance est la base du fonctionnement de toute société, ils ne le formulent pas, mais sans y penser, le pratiquent : ils sont spontanément en confiance…… Puisqu'ils ne font rien de mal, ils se sentent absolument en sécurité. ». Ils semblent vivre dans une bulle, un idéalisme naïf vu que la confiance se perd vite en route dans l'état actuel de nos sociétés qui fait rage sur les réseaux sociaux. Car dans notre monde actuel, ni chercher la vérité , ni l'honnêteté ,ni la confiance n'ont d'importance , accuser , agresser, trouver un coupable et le lancer en pâture dans la horde est souvent le but.
Et il y a la Loi, qui souvent transgresse notre logique . Un bon avocat avec un bon plaidoyer et en absence de preuves tangibles peut sauver le pire des criminels, alors qu'un innocent peut être condamné faute de plaidoyer convaincant et de preuves tangibles, et hélas c'en est le cas ici ! Et Claire fera la difficile pour finalement s'en rendre compte….

Le dernier Ferney est intéressant, elle dissèque chaque fait à chaque étape, le choix des mots ici d'une importance primordiale est scrupuleusement faites. Son point de vue concernant La Vérité qui se perd au détriment de ce qu'exigent et convient aux différents protagonistes concernés de l'histoire à part Claire est extrêmement bien développé, argumenté , donnant une idée peu glorieuse de nos sociétés occidentales soi disant civilisées, et basée sur l'Etat de Droit, “Mais que vaut sa vérité ? Dans cette affaire, tout le monde ment, …”.
Mon seul bémol est qu' ici encore l'auteure a utilisé le même style un brin didactique , froid, clinique que celui de son avant dernier livre “l'intimité” , où le sujet s'y prêtait bien. Or ici il est beaucoup plus délicat, la protagoniste est très émotionnelle et nécessite une sensibilité à fleur de peau, que le style tue, rendant les personnages peu attachants,le sujet moins émouvant et donnant à l'ensemble un brin de parfum de thriller américain sans âme, dommage. le style soft de facture classique de Grâce et Dénuement ou de la conversation amoureuse aurait été beaucoup plus adéquat pour nous raconter cette histoire douloureuse. Que mon avis bien sûr.

« Seul est le mot-clef de l'existence…..La vie offre une panoplie de situations, en voilà une, pas la plus marrante, pas la plus légère, mais peut-être la plus profonde pour mesurer son attachement à l'existence. »




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