Ce qui distingue le langage de tous les autres signes […] [c’est] qu’il analyse les représentations selon un ordre nécessairement successif : les sons, en effet, ne peuvent être articulés qu’un à un ; le langage ne peut pas représenter la pensée, d’emblée, en sa totalité ; il faut qu’il la dispose partie par partie selon un ordre linéaire. Or, celui-ci est étranger à la représentation.
A l’âge classique, se servir des signes, ce n’est pas, comme aux siècles précédents, essayer de retrouver au-dessous d’eux le texte primitif d’un discours tenu, et retenu, pour toujours ; c’est tenter de découvrir le langage arbitraire qui autorisera le déploiement de la nature en son espace, les termes derniers de son analyse et les lois de sa composition.
La mise en ordre par le moyen des signes constitue tous les savoirs empiriques comme savoirs de l’identité et de la différence.
Le fou assure la fonction de l’homosémantisme : il rassemble tous les signes et les comble d’une ressemblance qui ne cesse de proliférer. Le poète assure la fonction inverse ; il tient le rôle allégorique ; sous le langage des signes et sous le jeu de leurs distinctions bien découpées, il se met à l’écoute de l’ « autre langage », celui sans mots ni discours, de la ressemblance.
L’homme est une invention dont l’archéologie de notre pensée montre aisément la date récente. Et peut-être la fin prochaine.
L’Histoire montre que tout ce qui est pensé le sera encore par une pensée qui n’a pas encore vu le jour.
L’objet des sciences humaines, ce n’est donc pas le langage (parlé pourtant par les seuls hommes), c’est cet être qui, de l’intérieur du langage par lequel il est entouré, se représente, en parlant, le sens des mots ou des propositions qu’il énonce, et se donne finalement la représentation du langage lui-même.
On constate [...] que l’analyse des richesses obéit à la même configuration que l’histoire naturelle et la grammaire générale.
[Jusqu'à la Renaissance, ] savoir consiste donc à rapporter le langage à du langage. […] A tout faire parler [...] Le propre du savoir n’est ni de voir ni de démontrer, mais d’interpréter.
[L’ethnologie et la psychanalyse sont] toutes deux des sciences de l’inconscient : non pas parce qu’elles atteignent en l’homme ce qui est au-dessous de sa conscience, mais parce qu’elles se dirigent vers ce qui, hors de l’homme, permet qu’on sache, d’un savoir positif, ce qui se donne ou échappe à sa conscience.