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Critique de Seraphita


12 nouvelles sont ici présentées sous un titre fédérateur (et prometteur pour le lecteur qui souhaite se plonger dans le livre) : « Vue imprenable sur l'autre ». Certaines de ces nouvelles ont déjà fait l'objet d'une publication, telle « Les pigeons de Fervaques », présentée au Festival de la nouvelle de Saint-Quentin en 2001.

« Les pigeons de Fervaques », c'est ce couple d'« amoureux volatiles qui criblent la façade de fientes verdâtres », la façade du Palais de justice Fervaques. Leurs amours bruyantes accompagnent une audience particulièrement banale d'un juge bien fatigué ce jour-là, suite à « une longue nuit blanche passée à traiter d'innombrables affaires ». Particulièrement désabusé, il reçoit Bonvoisin, « un type d'une vingtaine d'années, costaud mais fripé, les yeux condamnés à perpétuité vers la pointe de ses chaussures ». Guidé par le juge, « Bonvoisin reconnaît tout sauf lui, il n'est déjà plus là ». Puis entre Yolande Godinet, sa compagne, qui ne sait répéter que de vagues « J'sais pas ». En entendant le juge présenter quelques éléments saillants de son existence, elle a l'impression d'« un film en accéléré, ça va trop vite, elle ne comprend pas le quart de la moitié des questions qu'on lui pose. Causent pas comme elle ces gens-là ». Dans l'indifférence générale, vient la sentence, tandis qu'« une voiture passe, haut-parleurs à plein volume : « NON A LA GUERRE !… » ». C'est alors que le couple de pigeons s'envole, venant clore le récit, leurs ailes formant « une magnifique paire de pieds de nez ».

Cette nouvelle est ma préférée : on retrouve tout l'humour noir et tendre de Pascal Garnier qui expose une humanité désabusée, en souffrance. Quel miroir l'autre me tend-il qui me renvoie ainsi mon propre enfer ? Dans ce recueil de nouvelles, c'est l'autre que regarde l'auteur, l'autre du couple qui me dérange (Alex et Cathy, deux ex, dans « Nature morte au poulet » - chaque mot du titre a été savamment pensé et pesé - Vincent et Véronique, un couple soudé jusqu'à l'improbable dans « Au-delà de… », Xavier et Yves à New-York, … jusqu'à Z dans « X, Y… Z »…). Garnier sait travailler chacun de ses mots, chacun de ses effets, pour parvenir à dire, de manière brève et percutante, la détresse dans laquelle l'autre peut me plonger… mais aussi la libération suprême qu'il me procure parfois.

Incisif et pertinent !

L'illustration de couverture est une acrylique sur toile (2001) de Pascal Garnier qui a aussi des talents de peintre. Celle-ci encadre bien l'ensemble des mots de cet écrivain, à la manière d'une parenthèse de peinture.
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