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Critique de DavidG75


« Deux étrangers au bout du monde, si différents
Deux inconnus, deux anonymes, mais pourtant... »

Mais pourtant...

Lui. Il s'appelle Soleiman. Il s'appelle Boubakar. Il s'appelle Abdou ou Djouma. Il rêve d'une nouvelle terre promise, d'un Eldorado où l'herbe est verte et où la terre est fertile. Où l'argent coulerait à flot aussi. Un anonyme parmi les milliers d'ombres que la mer, de ses flots voraces, coulerait bien avant que son argent donné aux passeurs, comme une expiation de sa vie passée, comme une mise à nu, ne soit dépensé.

Il n'était pas né du bon côté de la mer mais il marcherait vers elle pour lui faire face. Pour lui montrer qu'il ne craint pas sa colère. Comme un défi pour abolir les frontières. Combien de Soleiman, de Boubakar, d'Abdou et de Djouma pouvaient y parvenir ? Ils avaient pour eux les esprits de Massambalo. Les pères et mères de tous les espoirs. Que pouvaient-ils bien craindre ?

Lui. Il s'appelle Salvatore. Entre son port de Catane et cette petite île de Lampedusa, île de tous les espoirs, il en a vu défiler des vagues humaines embarquées à la merci de vagues de sel meurtrières. Des Soleiman, Boubakar, Abdou ou Djouma, ses yeux vides et secs n'en ont vus que trop, avalés puis rejetés par la mer. Des complaintes de désespoir, il n'en a que trop souvent entendues dans ses nuits d'encre, à écouter les vagues.

Combien d'entre eux ne connaîtront de Lampedusa que son cimetière de l'Eldorado ? Et tous ces autres qu'il avait pu sauver depuis tant d'années en les arrachant à cette grande Bleue, ont-ils pu connaitre un jour un monde meilleur ?

Il était fatigué de cette vie. Il devait fuir lui aussi.

Ces deux anonymes, le destin leur donnera pourtant un nom l'un pour l'autre... Dans leurs exils en chassé-croisé.


Laurent Gaudé se sent comme un poisson dans l'eau sous le soleil du sud de l'Italie et sa mer porteuse d'espoirs. Sous sa plume, elle se fait tantôt douce et apaisante, tantôt tumultueuse et sauvage. Son style est propre, clair et limpide comme l'eau cristalline. Après le Soleil des Scorta, Laurent Gaudé revient dans sa région fétiche pour une nouvelle ode à la mer et aux espoirs que les hommes mettent en elle. Ceux-ci sont migrants, ils viennent de Lybie, du Soudan, de Syrie ou du Liban. Et Laurent Gaudé nous livre là un bien beau roman sur leur vie, leur rêve, leur espoir.
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