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Critique de Fandol


Fandol
23 décembre 2017
Laurent Gaudé confirme sans cesse son grand talent avec des récits, des pièces de théâtre et surtout des romans comme La mort du roi Tsongor et La porte des enfers.

Avec Écoutez nos défaites, il réussit le prodige littéraire de mêler adroitement l'histoire de Mariam qui se bat pour sauver les trésors d'archéologie menacés par l'État islamique, et d'Assem qui travaille pour les services secrets, faisant office de chasseur, de tueur de la République, avec Hannibal, Hailé Sélassié et le général Grant.
Alors que rien ne semble réunir ces personnages historiques, l'auteur nous plonge dans les moments les plus importants de leur vie, succès ou défaites : « celle du temps qui nous fait doucement plier, celle de la vigueur que l'on sent s'amenuiser et disparaître. »
Tout commence à Zurich avec la rencontre de Mariam et Assem. Elle parle de ses fouilles en Égypte et de son travail d'archéologue. Avant de le quitter, elle lui confie, à son insu, une précieuse statuette du dieu Bès.
Brutalement, Laurent Gaudé nous plonge en pleine guerre de Sécession, dans les pas de Grant puis c'est Hailé Sélassié, le Négus, en Éthiopie, qui fait face aux troupes de Mussolini et enfin Hannibal qui, depuis Gibraltar, l'Hispanie et les Pyrénées, vole de victoire en victoire pour renverser Rome.
Nous suivons Mariam et Assem au Proche-Orient, en Afrique du nord, autour de cette Méditerranée qui concentre tant d'Histoire tout en ne perdant pas de vue les batailles menées par Hannibal, Grant et Hailé Sélassié. C'est précis, documenté, passionnant et très instructif.
Les belles pages de nos livres d'Histoire, ces batailles notées en caractère gras ou simplement évoquées avec un brin de nostalgie ou de fierté se sont avant tout soldées par des montagnes de cadavres, de vies brutalement interrompues pour qui, pour quoi ?
Depuis toujours, on élimine, on supprime des adversaires gênants : « On ne peut partir au combat avec l'espoir de revenir intact. » Pendant ce temps, Mariam apprend qu'ils ont pris Mossoul et qu'ils détruisent les trésors de l'archéologie à la disqueuse, à l'explosif, saccageant les musées et les sites, reflets d'une civilisation depuis longtemps disparue.
Grant, on l'appelle « le Boucher » : « La boucherie, voilà ce que c'est la guerre. ». Hannibal fait massacrer 15 000 hommes puis 45 000 : « 45 000 corps qui mettent des jours, des semaines à se décomposer. Elle est là, sa victoire, laide comme une boucherie sans nom. ». le Négus fuit son pays, signe la fin de la Société des Nations incapable d'arrêter l'invasion de son pays : « Les empires croissent, prospèrent et tombent. »
On massacre, brûle, détruit depuis que l'homme est sur terre comme lors de cette guerre civile entre Nordistes et Sudistes pour enfin en finir avec l'esclavage. Lincoln appelle à la réconciliation car « On ne fête pas la victoire dans une guerre civile. L'ennemi d'hier est le voisin de demain. »

À Canne della Battaglia, des vignes ont poussé là où 45 000 Romains ont été tués. Khaled al-Assaad a été martyrisé à Palmyre alors qu'il défendait son musée… Mariam pense à lui et à Assem dans le cimetière marin de Sidi Bou Saïd, proche de Carthage et du musée du Bardo qui revit sans oublier le drame. Alors, écoutez nos défaites pour apporter, enfin, douceur et sérénité.
Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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