Citations sur Alone - Intégrale (20)
Il y avait des gardes, mais pas tant que ça, comme si le patron ne craignait aucune rébellion. Et peut-être était-ce le cas : des moutons bien nourris, bien éduqués, ne cherchent pas tant la liberté qu'une certaine forme de sécurité ici.
La (sur)vie est un domaine beaucoup plus aléatoire que la mort.
La justice et la morale appartiennent à ceux qui les exercent. Pour la religion, c'est pareil, elle appartient à ceux qui l'entretiennent.
Je crois que tu vas passer encore quelques heures sur mon rafiot, pendu au mât, la tête en bas. Comme ça si tu pisses dans ton froc de peur, t'auras de quoi boire.
"Laissez-moi vous raconter, mes chers enfants, ce que je sais sur les Alones. Quelques années après la grande catastrophe, des hommes ont commencé à surgir, seuls, de ce qui avait été la Manche. À présent, nous connaissons cet endroit sous le nom de Couloir des Supplices. À l'époque, quelques groupes avaient gardé un noyau de civilisation de ce côté-ci. Et ces hommes, venus de l'ex-Royaume-Uni, criaient invariablement, les mains levées en signe d'apaisement : I am alone !
Petit à petit, cette expression s'est gravé dans la mémoire de ceux qui les croisaient.
Et ceux qui préféraient sillonner seuls nos contrées dévastées se surnommèrent bientôt ainsi.
Il me faut tout de même ajouter : les Alones évitent les Rasses comme la peste, les groupes ayant une forte tendance au fanatisme et à l'anthropophagie."
Je me suis fait surprendre comme la première bleusaille venue.
La survie, pourtant, c’est mon créneau. Mais j’avais soif, et le soleil de plomb m’avait tanné le cuir toute la journée. La découverte inespérée d’un puits dans la cour d’une antique ferme m’avait fait perdre tout discernement. J’aurais dû me méfier : l’absence de végétation exubérante dans la cour était un signe. Et même si les bâtiments de la ferme s’étaient écroulés sous le poids des ans, mes sens auraient dû m’alerter. Le pompon : le pourtour du puits était dégagé. Il ne pouvait y avoir qu’une seule raison à cela : le coin était fréquenté. L’eau, c’est assez rare dans certaines régions, surtout potable. Pour tomber par hasard sur une source inconnue dans ce coin perdu, il fallait une chance de cocu.
Je n’étais ni cocu ni veinard.
Non, le Pépé, c’est plutôt le genre abruti !
Il m'aurait fallu des aiguilles pour démêler tout ça. Sauf que le tricot c'est pas un truc d'Alone,
Dans les yeux, je percevais un éclat étrange et je ne savais préciser s'il s'agissait de cruauté ,ou de compassion.
Voitortue.
C’est le mot bizarre qui m’est venu à l’esprit à ce moment-là.
D’après moi, un organisme animal s’était développé dans les carcasses de vieilles caisses, s’y était adapté et s’en servait comme carapace. Mais question tortue gentille-gentille, ça gazait quand même mollement. Ces machins-là, je les soupçonnais plutôt véloces : quatre pattes nerveuses, musclées. Peau squameuse. Gueule fusiforme et mâchoire de gros carnivore affamé. Rien qu’à voir ce ramassis de belles canines enchevêtrées, fallait pas les cataloguer bouffeurs d’herbe. On ne pouvait pas les battre avec nos armes. La meute d’une dizaine d’individus nous avait repérés. Leurs yeux vicieux nous épluchaient. Alors, dans un bel ensemble, elles ont commencé à s’avancer vers nous, faisant grincer les châssis
Le conseil n’était pas très chaud, surtout que je soutenais mordicus qu’une bande inconnue nous suivait de loin – sans pour le moment montrer le bout de son nez. Évidemment, Killian avait ri. Il me jugeait paranoïaque et, pour le prouver, avait envoyé deux éclaireurs en arrière. Ça faisait déjà vingt-quatre heures qu’on attendait leur retour. Je ne m’illusionnais guère. Les deux copains mijotaient quelque part dans une marmite, et quelqu’un leur suçait les os.