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Critique de PaulMartin


J'avais été très marqué par le passage de Guy Georgy à Bouillon de culture en juin 1992 pour présenter ce livre. En particulier par son anecdote hilarante sur les Komas péteurs des monts Atlantika du nord Cameroun, et celle du sculpteur congolais qui donnait à son travail un sens aux antipodes de celui qu'en donnait Malraux, montrant ainsi que ce dernier n'avait rien compris à l'art africain. Frédéric Mitterrand, présent sur le plateau, faisait remarquer que le récit était « très drôle ». Je me doutais alors qu'un jour je lirai ce livre et j'ai mis presque trente ans pour le faire.

En 1944, Georgy arrive à Yaoundé pour entrer au cabinet du gouverneur du Cameroun. Il est ensuite muté au Gabon en 1956 comme secrétaire général du Territoire, puis en 1957 à la direction des affaires économiques au Congo dont il devient gouverneur en 1958 et dont il crée le drapeau en 1960. Il fera aussi composer en urgence l'hymne du pays par l'accordéoniste d'une boite de nuit de Brazzaville.

Récit instructif et très plaisant, décrivant les préoccupations de chacun à tous les niveaux, depuis Paris jusqu'aux villages de brousse, en passant par les administrateurs coloniaux et les chef locaux.
On découvre les préoccupations et le dénuement de l'Administration coloniale, prolongement d'une métropole elle aussi affaiblie à l'issue de la guerre.

Le livre est le témoin des années d'après-guerre mais aussi des années 90, d'avant les réseaux sociaux et l'émergence des lobbys minoritaires, celles d'une liberté de ton disparue où on pouvait sans risquer l'opprobre comparer les « Nègres tailleurs de silex » aux « Noirs évolués coupés de leurs racines », parler des obstacles à « amener ces peuplades au seuil de l'humanité », évoquer « des troupeaux de femmes hébétées », écrire que « les Noirs en général sont peu capables de distinguer la frontière entre le réel et l'imaginaire », qu'ils ont la « déplorable habitude de rechercher les bouc émissaires et les alibis », ou que l'Afrique noire, « désert néolithique » qui « manque tragiquement de structures mentales appropriées, du sens de l'organisation », est « un monde encore hors du temps et de l'histoire ».

Les scènes cocasses sont nombreuses, celles illustrant le fossé culturel, les dialogues de sourds entre l'administration française et les sorciers, ou quand la volonté de réformes entre en conflit avec les superstitions locales.
La plus drôle étant sans doute celle de centaines de Komas entièrement nus faisant, pour les saluer, une démonstration de pets devant des hauts fonctionnaires de l'ONU. La plus surprenante une histoire de télépathie entre sorciers congolais de l'Alima à Ouesso distants de plus de 300 km.
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