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Critique de Biblioroz


Un des Baumugnes, c'est Albin, venu louer ses bras vigoureux pour la moisson et la foulaison sur les berges de la Durance, bordées de saules, de cyprès, de vignes et de champs de blé. C'est là qu'il fera connaissance de l'Amédée, journalier comme lui bien qu'ayant l'âge d'être son père. le dimanche soir, c'est la tradition d'aller boire le litre. L'alcool aidant, Albin raconte, comme on s'épanche, l'échec qui lui gâche la vie, les regrets qui l'empoisonnent. Il a croisé Angèle, la fille de la ferme « La Douloire », il en est tombé amoureux aussitôt mais c'est Louis, un gars de la Martiale venu se mettre au vert, qui l'a approchée, séduite et entraînée sur les trottoirs de Marseille.
Amédée est touché au coeur par ces confidences, cette tragédie, il sent qu'il peut faire quelque chose pour celui qui est, dorénavant, son ami car « il souffre de la douleur des autres ».
Il décide de chercher ce qu'est devenue Angèle et se présente à La Douloire afin de s'y faire embaucher. Reçu par Clarius, le Patron, brandissant son fusil, il doit sa chance à Maman Philomène, qui accepte de l'engager. Courageux et travailleur il deviendra vite indispensable à la ferme.

Quelle bonne idée de donner la parole à Amédée qui raconte son histoire avec ses mots, son langage simple, familier et fantaisiste qui anime et fleurit le récit. Il décrit les paysages, les lieux, tels des personnages à part entière en leur conférant une humanité poétique : « La Douloire, accroupie dans le pissat de ses fumiers, près de sa maigre terre, terne et croûteuse comme une vieille guenippe ». « Les ruisseaux où coulent à la place de l'eau, le bruit des charrettes, le parfum du thym et le rire des gardeuses de chèvres ».
Nous sommes transportés dans cette belle Provence du début du XXe siècle, nous la traversons aux côtés de ces gens laborieux, qui gagnent leur vie à la sueur de leur front.
Le malheur qui a frappé la Douloire a desséché Maman Philomène et Clarius, les repas sont faits de silences, rythmés par le choc des couverts et ponctués des rires gelés de Saturnin. Et pourtant c'étaient, ce sont, de belles personnes, « Philomène, droite, bonne, simple, noble à tout dire », Clarius connu dans tout le pays comme un remonteur de moral, le coeur sur la main.
On se rend compte comment un petit homme pervers peut causer un mal terrible dans une famille simple en séduisant une fille naïve et ceci est intemporel.

Amédée nous emporte dans sa quête, Albin nous transmet son amour pour Angèle au son de sa « monica » qui vous enlève le coeur et Jean Giono effleure avec beauté sa Provence. Comme il est réconfortant de lire un si bel élan d'amitié, un sentiment né au fond des entrailles, une amitié intergénérationnelle gorgée d'humanité qui redonne vie à la jeunesse.
Et nul mieux qu'Amédée peut avoir le dernier mot « à la fin, c'est le malheur qui reste dans la poussière ».
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