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Critique de 5Arabella


Ce volume contient toutes les nouvelles écrites par Gombrowicz. La plupart de ces textes sont des textes de jeunesse, le danseur du maître Kraykovski est ainsi écrit en 1926, c'est le premier texte qui satisfait son auteur et qu'il ne détruit pas. Un certain nombre d'autres récits sont ainsi rédigés jusqu'en 1933, Gombrowicz a essayé en vain de les publier dans des revues, et c'est finalement grâce au soutien financier de son père, que 8 de ces récits sont publié sous forme de livre. Dans la foulée, il écrit d'autres récits, certains publiés dans des revues, néanmoins il n'en écrira presque plus après avoir quitté la Pologne en 1939, juste deux nouvelles verront le jour ensuite, une en 1946 et une autre en 1953. Il faudra attendre 1957, l'époque d'un certain dégel politique en Pologne, pour une nouvelle parution des nouvelles de Gombrowicz, il profitera de cette parution pour faire quelques modifications dans les textes, et en intégrer des nouveaux, qui n'ont encore parus que dans des revues. C'est aussi à cette date qu'il choisit le titre bakakaï, n'ayant aucune signification en lui-même et provenant de la déformation du nom d'une rue dans laquelle il a habité en Argentine. La parution française quand à elle date de 1967.

Etant donné leur nombre, je ne vais parler que de quelques uns qui m'ont le plus frappés.

Le danseur du maître Kraykovski : dans ce récit, le personnage principal, se fait rudement remettre à sa place alors qu'il tente d'acheter son billet sans faire la queue par le maître Kraykovski du titre. A partir de ce moment, il se met à suivre l'avocat, lui envoyer des fleurs, des cadeaux, et même de favoriser ses amours ; ces activités devenant sa seule raison d'être. La fin est particulièrement désopilante, mais bien sûr je ne la raconterai pas. C'est peut être le seul texte franchement drôle, où les aspects malsains et dérangeants, propres à Gombrowicz sont les moins présents. Mais n'oublions pas que c'est son premier texte.

Meurtre avec préméditation : le narrateur est un juge d'instruction. Il doit se rendre pour des raisons personnelles chez une de ses connaissances. Or il s'avère que cet homme est mort la nuit qui a précédée l'arrivée du juge. Malgré l'état du corps, qui indique d'une façon évidente une mort naturelle, notre juge décide d'enquêter, et trouve de plus en plus d'indices qui lui rendent cette mort suspecte, et pour cela n'hésite pas à terroriser les domestiques et la famille du défunt.

Virginité : l'héroïne de cette nouvelle, une jeune fille, se fait agresser à coup de brique par un vagabond. Cet événement la perturbe et lui fait voir la vie sous un nouveau jour. Au point qu'elle se met à poser à son fiancé d'étranges questions, et qu'elle commence à manifester des envies plus qu'étranges…..

Le festin chez la comtesse Fritouille : la comtesse du titre a l'habitude d'offrir des déjeuners littéraires très courus, le vendredi, donc (pour ceux qui l'ignorent) sans viande. Notre héros, qui n'a pas la chance d'avoir une ascendance aristocratique, est tout heureux d'être invité à ce repas élitiste. Mais le jour où se déroule le récit les choses ne se passent pas comme d'habitude, les invités sont peu nombreux, et le repas misérable, et pendant ce dernier, notre narrateur découvre que le cuisinier, pour régaler les invités trichait allègrement avec l'interdiction d'utiliser la viande dans ses préparations, et que pris sur le fait, il a du rectifier le tir, d'où le peu d'invités. Et qui plus est, ces invités ne se comportent pas du tout comme à l'accoutumée, et leur comportement devient totalement incontrôlable lorsqu'un certain plat apparaît sur la table.

Dès ses premiers textes, Gombrowicz s'ingénie à tout démolir, la religion, la famille, la culture, l'aristocratie, l'armée….C'est féroce et drôle, enfin pas toujours, car tout de même très malsain, avec un mauvais esprit absolu, et un univers qui se décompose à chaque page. Il vaut mieux être prévenu, car ce genre de textes peut vraiment choquer, et c'est un des buts de l'auteur, il adorait vraiment que ses textes provoquent des réactions indignées. Mais le problème, c'est qu'ils touchent juste, même s'ils donnent une image guère flatteuse de l'espèce humaine. Il ne s'agit pas de textes réalistes, psychologisants, c'est paroxysmique, outré, monstrueux. Et les grands thèmes propres à l'auteur sont déjà en germe dans ces textes, maturité-immaturité, la forme, l'érotisme (enfin dans un sens très particulier), les relations interpersonnelles dans la définition d'un individu.

J'ai été comme toujours sous le charme de l'écriture de Gombrowicz qui joue en virtuose de tous les niveaux du langage, qui crée des néologismes, qui s'amuse à utiliser des mots et des expressions archaïques, ou tirés de langues étrangères. Cela dit, je ne sais pas ce que cela donne en traduction, il faudrait que je le lise un jour en français pour voir, mais il est à mon avis plus que difficile à traduire, même s'il a participé à certaines traductions de son oeuvre en français.

Ce n'est par ces textes que je conseillerais de commencer à découvrir son oeuvre, mais lorsqu'on a comme moi lu pratiquement tout ce qu'il a écrit, c'est un vrai bonheur de savourer ces récits.
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