AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de finitysend


Le Domaine Des Dieux est un excellent volume de cette farouche et attachante série d'aventure de nos deux gaulois intrépides .

C'est aux résistants du village gaulois , qui résistent encore et toujours , que je dois mon gout pour l'histoire ancienne .
Ce n'est pas pour raconter ma vie que je le mentionne , c'est juste pour dire que dans ces BD anodines et distrayantes , il y a une flamme qui brule et qui est susceptible d'avoir une incidence sur le lecteur , une flamme capable d'orienter une destinée .... et Bla ... Bla ... Bla ...
En effet je n'aimais pas les romains , ils avaient conquis la Judée , détruit Carthage , et conquis la Gaule . vraiment ils avaient un CV , qui n'était pas du tout « le genre de la maison « ...
Alors ce petit village qui durait et qui distribuait des baffes aux romains qui les méritaient , avait tout mon soutient , moi qui voulait refaire l'histoire et qui aurait aimé pouvoir effacer l'uniformisation du bassin méditerranéen impulsée par Rome et par les monarchies hellénistiques ...

Le Domaine Des dieux est un des meilleurs de la collection . Mes critères pour décerner cette palme , tient au fait que c'est un des volumes où l'histoire est vraiment riche car traitée de façons approfondies . Cette histoire se termine sans être bâclée où simplement sans être clôturée par une fin trop abrupte . Parce que aussi , les dessins nous interpellent souvent , car ils sont denses et recherchés , surtout ceux qui viennent densifier le contexte , le cadre , disons l'univers . Je pense par exemple , à la pub et au prospectus qui sont fait à Rome pour promouvoir ce programme immobilier , directement téléguidé par César en personne . C'est un exemple , entre autres exemples , de ces planches de qualité qui sont offertes à la sagacité du lecteur et qui sont riches d'humour et de détails .

Le village résiste , les camps romains poursuivent leur surveillance qui consiste principalement à essayer de ne pas avoir trop d'ennuis . Nos amis gaulois ont la belle vie . Ils sont en bord de mer , il y a de belles forets , des sangliers et des romains à qui distribuer des baffes . César en a assez , ce village qu'il connaît bien est une ombre qui ridiculise Rome et qui pourrait finir par nuire à sa carrière politique , lui qui affirme avoir conquis la Gaule .
L'idée est de cerner le village , en plaçant dans son voisinage immédiat , une vitrine attractive de la civilisation romaine . Qui doit permettre d'assimiler le village en diluant son identité par des contacts quotidiens , interactifs et constants avec le monde romain et sa civilisation , incarnée ici dans un lotissement romain et dans ses habitants .

C'est bien vu au fond , parce que ce n'est pas d'une autre façon que s'est réellement effectuée la romanisation du bassin méditerranéen occidental . Ce processus de latinisation s'est entre autre effectué par l'implantation de colonies romaines et urbaines de peuplement et par l'accession à la citoyenneté romaine des élites locales . de même qu'elle s'est faite par une politique systématique d'urbanisation de qualité , qui fut intensive et impulsée dans le même élan que l'établissement des colonies romaines ..
Sur cette strate historiquement pertinente , se dépose une strate thématique plus contemporaine , avec ce qui est finalement la mise en place d'un programme immobilier en bord de mer , qui vient sabrer la vie locale , l'identité locale et la pauvre nature locale (biotopes dénaturés ... ) .
Se greffe clairement à la trame narrative l'idée que les contacts commerciaux asymétriques , dénaturent l'identité et les traditions locales , en réduisant cette identité à un facteur commercial dénaturé et désincarné .
Le village se transforme rapidement en centre commercial , les prix montent et tout le monde dans le village , se retrouve dans l'industrie du folklore , l'offre abonde et César pourrait bien réussir ?

Pour construire le Domaine Des Dieux , il faut effacer la foret et pour construire , il faut des esclaves . Les pauvres esclaves n'en finissent pas , car mystérieusement , les arbres repoussent constamment . Il faudra finalement consentir à les payer , pour essarter la foret et pour construire le premier immeuble . Cette thématique de l'esclavage est ici désopilante et riche , car ces messieurs viennent de tout le monde romain et ils sont dotés de tempéraments très différents . Leurs revendications sont également désopilantes , et l'évolution de leur contrat de travail vaudra le détour .

Dans cet album comme d'habitude tout le monde en prend pour son grade , les syndicalistes , les politiques , nos farouches gaulois . Mais ce qui fait le succès de cet univers à mon humble avis , c'est que si on n'hésite pas à ruer frontalement dans les brancards , concernant certaines réalités ou certains comportement innommables ou contreproductifs . Il y a aussi et systématiquement une douce aménité , qui vient jeter du baume sur ce que les auteurs dénoncent régulièrement ou seulement plus ponctuellement . En effet , c'est ainsi que les romains ne viennent pas tous s'installer volontairement dans ce lotissement , certains y sont contrains . Les esclaves sont bien obligés de gagner leur vie et pour cela il faut du travail ....

Donc toujours cette relativisation des dynamiques , qui s'enracine dans la complexité pertinente et éternelle des choses , qui vient opportunément arrondir les angles , et finalement cette aménité constante dans le traitement des problématiques évoquées , fait que cette bande dessinée respecte profondément la nature humaine en la posant comme grise ( pas noire et pas immaculée ) . Les réalités et les responsabilités ne sont ne sont jamais simples. Elles sont souvent ambiguës . C'est vrai dans cette BD comme dans le monde réel que nous connaissons .

Bref , un épisode qui est dense , que ce soit le texte ou que ce soit les dessins et les belles couleurs , des couleurs souvent pastelles et vives .
Commenter  J’apprécie          583



Ont apprécié cette critique (54)voir plus




{* *}