Un Amanda Grange, ça va. Deux Amanda Grange, ça devient déjà lassant. Après la lecture du Journal de Mr Darcy, je me suis laissé tenter par
le Journal du Colonel Brandon et je crois que je vais m'arrêter là. Sans avoir été franchement horrifiée, je n'ai pas été franchement emballée non plus. Ça se laisse lire mais je suis assez déçue.
Aussi bizarre que cela puisse paraître, le colonel Brandon est un des personnages de
Jane Austen que je préfère, sans doute parce que j'ai découvert l'oeuvre de cette auteur par l'adaptation filmée d'
Alan Lee où c'est le talentueux
Alan Rickman qui donne vie et épaisseur à ce personnage. J'ai toujours beaucoup aimé ce fragile équilibre de dignité et d'émotion qui le caractérise. Cependant, dans le roman d'origine (que j'ai relu dans la foulée), le colonel Brandon est un personnage beaucoup plus effacé et difficile à cerner que dans les différentes adaptations filmées.
Pour en venir à la version d'Amanda Grange, je ne m'attarderai pas sur le choix de la forme du journal qui paraît toujours aussi inadaptée que dans
le Journal de Mr Darcy (mais, en même temps, je ne vois pas tellement comment elle pourrait donner autrement un aperçu du personnage sans tomber dans une copie du roman d'origine). J'espérais que ce roman m'offrirait une plongée saisissante dans cette âme douloureuse mais j'ai été plutôt déçue. J'ai eu l'impression qu'Amanda Grange se contentait de montrer d'abord combien il avait été amoureux d'Eliza au point que son coeur reste fermé à toute autre affection jusqu'à sa rencontre avec Marianne. A partir de là, il lui voue un amour tout aussi constant, malgré le dédain de la jeune fille puis son aventure avec Willoughby et jusqu'à ce que le jeune dandy ayant disparu du paysage, Brandon puisse enfin se laisser aller à espérer. le Brandon d'Amanda Grange n'a pas grand'chose à raconter d'autre que son amour sans espoir pour Marianne. C'est assez mièvre, fade et décevant. J'aurais aimé plus de complexité pour le personnage. Surtout, j'ai été très surprise par certaines scènes où Brandon "se lâche". Bon, qu'il batifole avec Eliza au début, quoique cela ne cadre pas du tout avec les moeurs de l'époque, admettons. Il était jeune et encore heureux. Mais que, plus tard, au retour d'un duel où il a failli tuer un homme, il se chamaille avec ses amis qui veulent connaître le nom de la dame de ses pensées, là, ça sonnait vraiment faux.
En résumé : Un journal fictif qui n'apporte pas grand'chose au personnage de Brandon, souffre d'une forme inadaptée et de quelques fausses notes. Il m'a confirmé dans l'idée d'une exploitation de l'oeuvre de
Jane Austen, qui surfe sur la passion des fans de cette auteur sans apporter vraiment de plus-value.