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Critique de Marti94


Tout d'abord, je remercie Masse critique qui m'a permis de lire le dernier roman de Wendy Guerra « Negra » paru aux éditions Stock en 2014.

J'aime bien Wendy Guerra parce qu'elle parle bien de Cuba et qu'elle aime son pays mais j'ai quand même un problème avec son écriture qui me laisse perplexe. Je m'explique : c'est le troisième livre de Wendy Guerra que je lis et, une fois de plus, je trouve que les sujets abordés son passionnants mais c'est comme si elle voulait en faire trop. J'ai l'impression qu'elle s'éparpille en voulant traiter de nombreux thèmes. Cela se ressent sur la forme avec beaucoup de petits chapitres qui sont tous introduit par un ou plusieurs épigraphes, qui rendent la lecture très agaçante. C'est comme si on avait besoin de coder le titre du chapitre, des fois que le lecteur ne comprenne pas de quoi il s'agit.
J'avoue qu'au fil de la lecture j'ai « zappé » ces épigraphes. Par contre, j'ai bien aimé les « encarts » sorte de définitions ou recettes qui ponctuent bien la narration et qui sont utilisés sans abus.

Cependant, « Negra » est un livre intéressant, un peu long à mon gout pour les raisons que je viens d'évoquer mais qui permet de vivre Cuba de l'intérieur, avec Nirvana del Risco nommée Nina, jeune cubaine bisexuelle qui cherche l'épanouissement et revendique son indépendance. J'y ai donc vu l'histoire d'un pays mais aussi celle d'une jeune femme d'aujourd'hui.

La narratrice, Nina, raconte sa propre histoire à la première personne. C'est une belle métisse, mannequin, née d'un père blanc et d'une mère noire appelée « la noire » documentariste de cinéma. Nina veut vivre le présent mais n'échappe pas à son passé, au passé des cubains, celui de l'esclavage et de la métisation de l'ile. Elle est révoltée contre le racisme et les préjugés raciaux et c'est le fil rouge du roman. Cette révolte, toujours présente donne le ton.
D'ailleurs la narratrice fait référence au cimarron et cite le livre de Miguel Barnet « Esclave à Cuba » qui raconte la vie d'Esteban, un cimarron, c'est-à-dire un esclave noir fugitif, dans la Cuba coloniale et sucrière.

Mais ce que fuit Nina c'est d'abord l'injustice. L'injustice d'avoir perdu l'enfant qu'elle attendait, la souffrance d'être rejetée et maltraitée par son compagnon, Jorge, d'un autre milieu social et cubain blanc. Elle connait même la prison pour avoir erré dans Siboney, quartier riche de la Havane.

Celle qui vient la chercher et tentera de la sauver tout au long du roman c'est sa grand-mère, Cuca, qui représente Cuba des anciens, celle de la religion. La religion de Cuca est fondée sur le culte des orishas.
Les orishas qui accompagnent Nina sont des divinités afro-américaines originaires d'Afrique, et plus précisément des traditions religieuses yoruba. Ils ont été introduits à Cuba par la traite des Noirs. Ils sont vénérés comme divinités de la santeria des Caraïbes et représentent les forces de la nature.
Nina ne croit pas aux orishas. Pourtant, elle va vivre avec le fantôme de sa mère qu'elle a peu connu ayant été élevée par sa grand-mère, et qui est décédée précocement.

Et puis, il y a Lu son amie métisse de père chinois, sociologue, qui est aussi son amante. Il faut dire que le sexe a beaucoup d'importance dans le livre et que toutes les expériences mènent Nina à l'extase physique. Par contre, moralement ça va beaucoup moins bien.
Lu et Nina vont partir à Marseille pour répandre les cendres de Marie décédée à Cuba. Marie était la compagne de la mère de Nina « la Noire » elle aussi bisexuelle.
En France, un nouvel homme apparait dans la vie de Nirvana, Philippe, l'ex-mari de Marie qui, même avec un âge plus avancé que le sien semble assez immature. Cet ex-soixante-huitard ressemble au grand amour et ils font l'amour passionnément.

L'expérience française n'étant pas très heureuse (et oui le racisme existe aussi en France) le retour à Cuba permet à la jeune femme de réaliser un projet professionnel : celui de s'installer dans les montagnes de l'Escanbray avec Cuca et Alina (grand-mère de jorge), pour fabriquer des produits naturels. Philippe va la rejoindre mais ses plantations de marijuana vont poser de gros problèmes. le système Cubain rigide et sclérosé ne les aide pas pour obtenir une autorisation d'exercer et cela va finir par une expulsion.
Cuca essaie d'aider sa petite fille grâce aux offrandes et spiritisme mais Nina ne veut pas faire appel à la religion pour vivre. Elle va trouver un emploi à la revue de cinéma « Cuba imago » grâce à Aurelio, ami homosexuel qui a connu sa mère.
Un nouvel homme va entrer dans la vie de Nina, Tom, métis américain de San Domingue qui partage ses incertitudes mais qui travaille pour les américains. La jeune fille ne va pas se laisser mépriser pour être allée avec l'ennemi et revendique sa liberté. Cela va mal finir mais je ne veux pas raconter la fin d'autant plus que le dernier rebondissement est plutôt inattendu.

Wendy Guerra nous inonde de références, qu'elles soient musicales, littéraires, sociologiques ou religieuses et c'est plutôt appréciable : on rencontre dans « Negra » des auteurs cubains comme Guillermo Cabrera Infante, José Lezama Lima ou encore Pedro Juan Gutiérrez mais aussi des français comme Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir qui ont fait le voyage à Cuba pour en saisir sa réalité. Par contre, ce qui est moins appréciable, c'est le portrait assez caricatural que dresse Wendy Guerra des amants de l'attirante Nina: Jorge le cubain blanc odieux, Philippe le français immature et Tom le métis américain au gros sexe.

A lire donc par amour pour La Havane.


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