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Critique de Henri-l-oiseleur


C'est au "protocole compassionnel" que nous devons le livre du même nom, puisque l'auteur redevient capable d'écrire sous l'effet de ce médicament expérimental qu'il prend, qui lui procure de l'énergie, et un temps de répit sur la progression de son sida. Les effets littéraires de cette substance sont notables : non seulement elle rend le livre possible, mais le récit qui découle de là, "même s'il est sinistre, me sembl[e] avoir une certaine gaieté, sinon vivacité, qui tient à la dynamique de l'écriture, et à tout ce qu'elle peut avoir d'imprévu." (p. 24). Ce roman d'Hervé Guibert n'est donc pas un documentaire sur le sida et ses ravages, sur la médecine et ses tentatives, mais, encore une fois, l'histoire d'une écriture et d'un écrivain. Comme dans le volume précédent, l'illusion réaliste nous fait certes voir la maladie, mais l'illusionniste écrivain se montre aussi à nous dans son activité propre. C'est ainsi qu'il peut dire : "C'est quand j'écris que je suis le plus vivant. Les mots sont beaux, les mots sont justes, les mots sont victorieux, n'en déplaise à David, qui a été scandalisé par le slogan publicitaire : "La première victoire des mots sur le sida." (p. 144)

De fait, ce livre relate la victoire de la littérature sur la maladie et la mort. La maladie et la mort sont réelles, elles ne le sont que trop, mais quand un romancier comme Guibert, capable d'écrire des pages pleines de grâce et de drôlerie, les représente, il transforme magiquement le réel affreux en réalisme émouvant, la vérité impitoyable en fiction : "C'est quand ce que j'écris prend la forme d'un journal que j'ai la plus grande impression de fiction." (p. 103) Il nous propose donc, par-delà la fonction documentaire, représentative, même militante, de son livre, une autre lecture proprement littéraire, la plus importante, la plus à même de justifier la vie de l'auteur et de ses ouvrages.

"Ici [en Italie] mon livre n'est pas encore sorti, il a un peu changé ça, ce regard sur les malades du sida. En fait j'ai écrit une lettre qui a été directement téléfaxée dans le coeur de cent mille personnes, c'est extraordinaire. Je suis en train de leur écrire une nouvelle lettre. Je vous écris." Par ce livre, l'auteur réaffirme la fonction de communication, même militante, de la littérature, et rappelle à longueur de pages, sans être jamais monotone, qu'elle est un art et une magie.
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