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Critique de Celine_77


J'ai trouvé ce livre puant et repoussant, sinon ahurissant.

Le style d'abord. Ça mouline ad nauseam. L'auteure veut nous convaincre qu'elle a du (très très) grand style, qu'elle sait trousser des (très très) longues phrases débordantes de locutions latines et d'expressions surannées. Sauf que ça mouline dans le vide. Tout ce déballage de style pompeux (et pompant) pour dire quoi ? On a l'impression de lire un édito de Libé étiré sur 200 pages le long d'une interminable masturbation.

Tout est prétexte à l'étalement de références qui claquent, mais dont le fond est creux. Exemple : comme par hasard, l'auteure et l'inspecteur des finances avec qui elle passe la soirée marchent dans la rue et, oh suprise, voient sur le trottoir Stéphane Fouks (Euro RSCG, Havas, ex conseiller de DSK) et David Pujadas. Tout ça pour permettre à Cécile Guilbert de nous dire : "L'homme qui s'était fait poser des implants capillaires par son pote Cahuzac [comprendre : Pujadas] papotait ferme avec celui qui avait les mêmes talonnettes que Sarko [comprendre : Fouks]". Belle dénonciation de la collusion des élites : un présentateur télé se fait poser des implants par un futur ministre de gauche, et un ex-conseiller de gauche a les mêmes talonnettes qu'un ex-Président de droite ! Ah oui, tous pourris ! du haut du crâne au talons de leurs chaussures ! (les arguments sont hélas de ce niveau).

Surtout, toute la construction du livre est à la gloire personnelle de Cécile Guilbert (qui est la narratrice assumée de ce texte, évoquant son parcours, ses précédents livres). Qui va dénoncer durant d'improbables monologues tout le personnel politique qui "se sert" au lieu de "Servir", ces "quinquas politiques incultes entourés d'énarques ignares" (p. 95) quant elle a échappé "à cette histoire à laquelle tu aurais pu prétendre et que tu avais fuie par amour de la liberté, par amour de l'amour", etc Bref, il sont tous nuls, mais elle est géniale, l'incarnation de la Liberté et de l'esprit critique voltairien (jusqu'à nous enfoncer le clou page 121 en nous expliquant qu'elle ne fait que de la "Grande Littérature" et a refusé livres trop faciles, genre "storyboard à stories"). Très supérieure à toute cette bassesse, elle qui a choisi l'amour, la liberté et l'eau fraiche, tout en assumant sans gêne durant trois pages stupéfiantes (p. 101 à 103) qu'elle ne connait strictement rien ni du peuple, ni de la pauvreté, ni du déclassement, pas davantage que l'inspecteur des finances qui l'invite durant cette soirée dans deux palaces. "Non, ils [ni elle ni lui] ne savaient rien de la dureté du monde auquel se cognaient chaque jour dans leur pays entre 5 et 9 millions de pauvres, et plus de 3 millions de chômeurs officiels."

C'est bien là ce qui est ahurissant dans ce livre. L'impression qu'une ultra-privilégiée, fréquentant le tout petit milieu des ultra-riches et des artistes bobos qui ont "pages ouvertes" dans tout un tas de magazines branchouilles et à France Inter, vient faire des démonstrations clinquantes sur le thème "tous nuls ces pantins de politiques".

Mais elle, l'artiste, l'écrivaine, éditorialiste, l'incarnation de la Culture et de l'Esprit critique ? Elle nous décrit dans ce livre qu'elle se fait inviter à dîner dans le plus cher palace parisien par un inspecteur des finances, ancien Haut-fonctionnaire devenu banquier d'affaires. Elle va jusqu'à décrire les Saint-Honoré qu'elle y déguste dans des assiettes en porcelaine, avec de l'eau d'Australie dans des verres en cristal (oui, jusqu'à ce niveau de détails). Ce n'est pas tout : elle flirte avec le banquier d'affaires. Elle a envie qu'ils couchent ensemble. Elle l'embrasse et lui glisse sa carte de visite espérant qu'il la rappelle. Et elle l'absout totalement, terminant à la toute fin du livre (avant dernière page) par "il n'est pas détestable", "plus [intéressant] que je ne pensais, on a des préjugés". Bref, ces élites dont elle a passé 200 pages à nous expliquer qu'elles sont pourries de fric et de combines ne sont finalement pas si détestables que ça, quand on apprend à les connaître, c'est nous qui avons des préjugés. Waaaaaaaaaaa !!! Tous ces monologues ampoulés pour en arriver à cette chute ? Sérieusement ?!

Ecrit au 2e degré, ce livre pourrait être une attaque féroce contre les artistes (qui ne voient plus la misère et ne demandent qu'à manger dans les menottes du grand capital et à se faire baiser par lui).
Sauf que non, le livre de Cécile Guilbert est bien du premier degré. Elle ne réalise même pas, semble-t-il, à quel point ce livre est consternant pour la figure des artistes, qu'elle incarne.

L'anti-Florence Aubenas, l'anti-"Quai de Ouistreham".









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