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Critique de Dandine


Apres le pieton de Paris, de Fargue, Ville, de Guillevic.

Guillevic essaie de decrypter la ville, de saisir son corps et son ame, et malgre une certaine reticence il la celebre. Quelleville, qu'il ne nomme pas? La grande, la capitale, construite autour du fleuve qui la definit. Paris.

Guillevic n'est pas ne a Paris. J'ai eu la flemme de verifier dans le Wikipaedia mais a la lecture de cet opus cela m'est clair. Il a du grandir dans une petite ville de province aux relents campagnards. Des effluves, un parfum, qui lui manquent a Paris:
“Acacias, marronniers, platanes, Ce sont les arbres de la ville, Et quelquefois tilleuls et sorbiers des oiseaux. Mais pas de chênes”.
Et il s'en desole:
Ville, vois tes campagnes Qui t'offrent leur écoute, Qui vont être perdues Si tu les agglutines le long de ton squelette Étendu sur les terres. Car toi-même sans elles Qu'est-ce que tu seras ?”

La ville est demesuree par rapport aux hommes qui l'habitent:
“Un, plus un, plus un, Et encore un, d'autres encore, Et d'autres, plus. Un chaque fois qui s'additionne À tous ceux qui sont là, Autant de fois rien qu'un. Tous ceux qui vont, qui se rassemblent, Qui ne sont plus une addition, Mais autre chose”.
De cette demesure peut naitre la solitude:
“Un homme allait à pied dans une rue quelconque, La nuit, longeant des maisons, des boutiques, Des fenêtres, du mur, quelquefois du métal. Il y avait des lampadaires ; de loin en loin, Un peu d'êtres humains. C'est arrivé à mi-chemin Entre deux lampadaires. Il a crié ; « Mais j'existe pourtant. Je cherche où c'est. Essayez-moi. »”.
Mais cette solitude peut etre aussi porteuse d'espoir:
“Fourmis, fourmis – Pas si fourmis que ça, Ces gens qui vont, Qui courent, se faufilent, Qui se frôlent, s'entassent. Ou c'est que les fourmis Ne sont pas ce qu'on dit. Car dans les gens d'ici, Prétendument fourmis, Ça rêve bougrement”.
Et de toutes facons on peut vaincre la solitude:
“Combien d'hommes, de femmes, À former couple au même instant, Dans tes lumières, tes pénombres, Vont l'un vers l'autre en tâtonnant, Qui s'inventent, s'oublient, se retrouvent dans l'autre, Pris, enroulés Dans un tissu qui les dépasse Vers l'origine et les futurs, Prennent en charge ton noyau Avec ta pulpe, avec ta peau, Te portent haut, Te justifient”.

Avec le temps il s'habitue a la ville:
“La devanture des pâtisseries Répond à la douceur du ciel Quand il se reconnaît d'espace, À la douceur de ses nuances Qui témoigneraient que la ville N'exhale pas que des verdicts”.
Un peu surpris d'abord:
“Va ! Continue Ce chant de flûte, mais c'est qui ? Il va la ville, se frotte aux murs, de rue en rue, de place en place, Et par moment il se rencontre Comme de l'ombre avec de l'ombre Et va plus loin S'insinuer”.
Mais en fin de compte il se laisse charmer:
“Certains jours, Il y a sur la ville Des oriflammes de sourire Qui seraient là pour annoncer de plus beaux jours”.
Et c'est l'aveu respectueux:
“La ville est pourtant Ce qui compte le plus, Qui doit compter le plus Parce que rien N'est plus nous-même que ça. Quand elle change, c'est nous Qui la faisons changer. Elle est notre ouvrage, Quand même. Apprends-toi Dans la ville”.
Et c'est l'hommage:
“Tu es depuis longtemps, Tu es jour après jour Dans la mythologie. Et c'est aussi pourquoi Tu es vivable, ville, Pour des millions qui savent Vivre aujourd'hui cette légende Que tu seras”.

En fait c'est un recueil introspectif, ou Guillevic essaie de saisir le changement qui s'est opere en lui, passant de l'hote qui gardait ses distances, grogneur, a l'amoureux pudique mais quand meme encenseur de sa ville. Parce que oui, elle est devenue, malgre ses reticences, SA ville.

P.S. Je n'ai fait que citer. Que pouvais-je faire d'autre, face a un poete?
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