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Critique de Alfaric


"Le Jour des Damnés" : Senatus Populusque Farlightus
Si pour vous la SF se résume à des discours scientifiques et philosophiques amenant de vastes réflexions sur le devenir des nos sociétés et la sens de la vie, passez vous chemin. C'est ultra-bourrin, ultra-violent : les svenneries ne sont pas faites pour vous !

A plusieurs moments on sent bien la parenté avec Richard Morgan. Est-ce un hasard si Sven crache sur l'U/Libre Morgan, ce gros con suffisant, qui s'en prend plein la gueule ? Mais Richard Morgan est plus talentueux donc parvient à mieux tirer profit de son univers dans l'atmosphère (encore que moi, j'ai en travers de la gorge ses entourloupes Fantasy très décevantes au final). A plusieurs moments ont sent bien la parenté avec le manga "Gunnm" où la majorité trime dans la crasse sous le regard condescendant d'une élite nombriliste : j'ai longtemps attendu le Panzer Kunst de Leona !

Mais ce 3e tome est très en dessous des 2 autres. David Gunn rédige un tome de transition vers qqch de plus ambitieux que les délires violents de son narrateur. le cliffhanger de fin (qui suit une ellipse durant laquelle se déroulent une bataille épique et donc une véritable hécatombe) appelle clairement à une suite qui n'existe que dans la tête de l'auteur.


On recommence avec un joyeux bazar auquel on ne comprend rien pendant longtemps… Sven est en permission, on chasse le loup, on tombe sur une machine de guerre mutante génétiquement modifiée pour boire ses victimes avec ses mains, on enquête sur un crash mystérieux, on psychote tout en prenant du bon temps avec ses anciens codétenus du Paradis, l'invité aristocrate se mettant en tête d'arracher le coeur du fiancé de la demoiselle de la maisonnée… Au final on se lance à sa poursuite, et là tout part en vrille !

David Gunn nous laisse dans le schwartz durant les 2/3 du roman : entre ceux qui pètent des câbles sans raison et celles qui font des crises d'hystérie, on pourrait croire que c'est n'importe quoi… Mais pas du tout en fait car mine de rien les joyeux bordels sveniens sont très travaillés en amont. Tout est annoncé dès la page de prologue et la suite montrera que ce chaos est très organisé.
Entre infiltration, exfiltration, évasion et trahison, on multiplie les fausses pistes parfois dispensables (comme les jumelles bonasses Serafina la midinette et Simone la femme fatale) et sans s'en n'apercevoir on entre dans le coeur du roman : le coup d'Etat contre Octo V !
Et ce salopiot de David Gunn en garde sacrément sous le coude : les monologues du chapitre 35 nous laissent entrevoir un gros travail de worldbuilding qui emprunte autant à Heinlein qu'à Dan Simmons, alors même qu'on sent très fortement le détournement de Lois McMaster Bujold. Mais comme tout est raconté par un légionnaire bas du front qui ne comprend pas grand-chose à ce qu'il se passe et à ce qu'on lui explique, on n'a pas accès aux points essentiels de l'intrigue. du coup c'est un beau bordel !
Qui est Octo V ?

Qui l'a tué ?

Pourquoi ?

On est encore une fois un peu perdu : Sven et ses lecteurs peinent à savoir de quoi il retourne. du coup, on pourrait avoir l'impression d'un enchaînement de scènes de bastons sans aucun fond. (Mais même un Dan Simmons nous prend aussi pour des jambons parfois : si vous avez compris ce que sont les Lions, les Tigres et les Ours, faites-moi un signe, car ce truc est aussi fumeux que le Saint Esprit ou les mystères de "Lost" !)


Certains rageux parlent d'un daube écrite par un gosse de 12 ans sous acide avec des scènes de cul voyeuristes et des scènes d'ultraviolence insupportables… C'est vraiment con et de mauvaise foi un rageux quand même. Déjà désolé messieurs les blasés, la guerre (militaire, politique ou économique) c'est crade et c'est moche.
Ensuite, et bien ils n'ont rien compris à la démarche de l'auteur (marrant le nombre de fois où ils passent à côté)
Avec la narration épurée à la 1ère personne on multiplie les dialogues entrecoupés de pensées brutes et abruptes : on vit vraiment dans la peau d'un ex-légionnaire avec une vision assez simpliste de la vie.
Après tout dans ce roman la grande révélation lui vient de ses énièmes réflexions sur un joli petit cul…
Les complots, les machinations, les tractations, les trahisons… Sven n'en a rien à carrer car il ne comprend rien aux hautes sphères politiques et aux arcanes du pouvoir. C'est un homme de terrain : il faut agir vite, il faut tuer ou être tué. C'est à travers ses yeux que nous suivons les rivalités pluriséculaires entre puissances galactiques et les règlements de comptes entre crevards carriéristes et pervers narcissiques.
A la limite on pourrait retrouver la démarche de Heinlein qui nous raconte la guerre interstellaire contre les Arachnides à travers les yeux du trouffion Johnnie Rico qui ne comprend pas grand-chose à cette dernière. Mais l'humour noir de Sven fait bien le lien entre et le space op cyberpunk et les bidasseseries bas du front.

Après on aime ou on déteste, mais au moins c'est très différent des soaps nobiliaires bourgeois, des space-op mainstream et des néo space-op postmodernes. Reste que l'auteur à raté bien raté son coup et que ce 3e tome pas mal de bâtons pour se faire battre :

* les problèmes de construction et de structure du récit (qu'ils soient volontaires ou non) sont ici accentués par le fait qu'on n'a pas la fin de l'histoire qui devait avoir lieu dans le 4e tome. du coup on a du mal à saisir les motivations des uns et des autres et certaines réactions laissent dubitatif.

* Les compagnons de Sven qu'on avait appris à apprécier dans le Faucheur et dans Offensif, n'apparaissent qu'à 100 pages de la fin (et encore ils sont plus spectateur qu'acteurs). C'est assez clair que l'absence de Haze, dit Gras-Double, officier du renseignement de Sven et geek adepte de Papa Legba le Connecté, se ressent cruellement… Même le flingue de Sven se fait plus discret, même si parmi ses blasphèmes récurrents (Allo Sven, ici la Terre !), on retrouve encore quelques répliques cultes (mort de rire quand le SIG imite la Dictée Magique !)
* La traduction n'aide pas du tout ! Il y a pas mal de tournures de phrase qui sonnent faux, limite mot à mot, et certaines tombent carrément à plat, plombant les points fort du romans : et même si cela se tasse voire s'améliore en cours de route, c'était quand même bien plus fluide et plus percutant dans les tomes précédents. D'où une déception avec cette traduction moyenne qui castre le roman ou lieu de lui apporter une plus-value.

Je suis totalement en accord avec l'avis de l'internaute dénommé Olivier :


Un cycle frustrant car avec un univers plus explicite et des intrigues mieux présentées cela aurait grave déchiré ! On devra se contentera de 3 bouquins de SF militaire assez jouissive...
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