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Critique de Katsika


Quelle puissance et quelle finesse ! Adieu Zanzibar est un roman passionnant et comporte de multiples facettes. Il nous emmène d'abord dans l'Afrique de l'Est dont, nous, Français, ne connaissons pas grand-chose et qui apparaît donc un peu mystérieuse. le récit s'intéresse d'abord à une anecdote : le secours apporté par une famille à un Anglais blessé et égaré, alors que l'île est un protectorat de sa Gracieuse Majesté, et l'amitié qui naît entre cet Européen et son sauveur africain. Déjà s'esquissent les rapports entre colonisateurs et colonisés, deux mondes qui se côtoient sans se fréquenter autrement que dans des rapports de servitude dont il est fort difficile de sortir. Un chacun chez soi, conséquence aussi des contrastes entre deux civilisations qui n'ont pas le même dieu mais partagent le même interdit : on ne se mélange pas. A la charnière entre le XIXe et le XXe siècles, on ne transige pas avec les principes. Pas plus que dans les années 60 d'ailleurs où se déroulent les événements de la deuxième partie du roman. le lien entre les deux époques se clarifie progressivement dans l'esprit du lecteur qui comprend que le roman est une forme de saga quelque peu transgressive. En effet, Les deux personnages dont le destin constituent l'axe du récit sont celui de Réhane, rejetée par sa communauté pour avoir osé tomber amoureuse de l'Anglais et plus tard, celui de sa petite fille Djamila, les deux victimes de règles sociales implacables mais qui nous sont montrées à travers les récits d'autrui, bien décidées à ne pas se laisser anéantir et à poursuivre leur chemin malgré l'incompréhension voire la répression qu'elles subissent, mais au prix de leur bonheur et de leur réputation. Les hommes aussi sont victimes de cette réalité, du racisme qui sévit en Afrique et en Angleterre. Ainsi le jeune Rashid, grâce à d'excellents résultats scolaires, peut-il faire ses études en Angleterre, mais il ne parvient jamais à établir des liens d'amitié avec les étudiants anglais. C'est encore à travers ce personnage que l'auteur met en évidence les affres de l'exil, le chagrin d'avoir quitté les siens sans espoir de retour depuis l'installation d'une dictature, l'impossibilité aussi de s'installer complètement dans un univers étranger où l'on ne veut pas vraiment de lui. Cependant, jamais l'auteur ne laisse place au moindre pathos.
Malgré son Nobel en 2021, Abdulrazak Gurnah, reste peu connu en France. La lecture de ce roman donne vraiment envie de poursuivre la découverte de cet auteur à travers les quelques autres traduits en français.
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