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3,63

sur 35 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Armé d'une intrigue aussi simple qu'efficace et sous des airs faussement tranquilles, Sébastien Hoët se paie la médiocrité ambiante et les idoles de l'époque à travers les états d'âme de Gilles, un professeur de philosophie à la dérive, mécontent de tous et mécontent de lui – antihéros désabusé se débattant péniblement dans les couloirs de l'Éducation Nationale.
Dans la région de Lille, en arrivant au lycée, Gilles apprend que Victoire, une élève de première, s'est suicidée en se jetant du troisième étage de l'établissement. Dans la salle des profs, on découvre un homme dans un décalage intellectuel évident, tâchant tant bien que mal de faire bonne figure, moins ouvertement offensif qu'en phase de saturation intérieure. Autour de lui : Arsène, un type bavard dont Gilles semble tolérer la compagnie, et Esther, une jeune femme remarquablement bobo, mais dont le charme ne laisse pas indifférent. Une invitation pour assister à l'adaptation d'une pièce ouvrira les hostilités, avec notamment la description d'un microcosme théâtreux débordant de nullité.
Entre deux cuites où Gilles laisse éclater son mépris pour les productions actuelles, un nouveau drame semble prendre forme de façon nébuleuse. Une chose est sûre, trop jeune pour appartenir à la vieille garde des enseignants, Gilles se reconnaît encore moins dans la nouvelle génération. C'est aussi l'occasion d'une peinture au vitriol d'élèves toujours plus incultes et végétatifs, avec leurs variantes, leurs particularités, leurs exceptions et leur génie abyssal parfois. Dans un équilibre fiévreux, le professeur dresse alors un état des lieux, tente d'envisager une suite, la possibilité d'une cohabitation pacifique avec son environnement direct, mais le vertige s'accentue. En écho, Victoire répète ses derniers instants.
Au-delà du lycée, si l'auteur tire dans le tas, rien de gratuit dans les portraits sévères dressés tout au long du livre : figures emblématiques ou imposées du monde culturel, médiatique et académique tel qu'il domine de façon quasi exclusive depuis des années, malgré une perte de crédibilité exponentielle et quelques plombs dans l'aile depuis peu. Son approche est assez bien sentie, flirtant avec le burlesque parfois, n'épargnant pas non plus son antihéros dont il trace d'emblée les limites et les contradictions en le confrontant notamment au ridicule de la pose – autre fléau d'actualité – ce qui participe d'ailleurs à rendre Gilles plutôt attachant.
Avec ses petites humiliations et dans une lassitude sous tension, l'année scolaire va ainsi s'écouler, les dents serrées, à deux doigts du naufrage ou de l'explosion. D'un bout à l'autre, la voix spectrale de Victoire se fera entendre, rejouant son ascension fatale dans une étrange symétrie avec l'errance de Gilles embarrassé par son enveloppe charnelle, ses désirs, son passé, sa quête de sens et ses références. Bref, sans complaisance pour son temps, avec humour et intelligence, déployant un éventail d'images percutantes, ce premier roman tranche avec un éclat certain.
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Un grand moment de lecture, de la meilleure époque. Roman lucide et émouvant, dans le vibrant hommage silencieux fait à la jeunesse, qui doit accepter de voir sa grandeur et la déchéance à laquelle ses aînés l'ont conduite. Moment intense de méditation et de splendeur.
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Gilles est à un tournant de sa vie, déçu par son époque dont il déplore la médiocrité, déçu par l'éducation nationale, par le niveau de ses élèves, et déçu par les femmes... Il s'est mis en demeure de dresser le bilan de son existence et un événement brutal va être le déclencheur d'un mal être qui va croître au rythme de l'année scolaire. Un premier roman étonnant, détonnant et talentueux.
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Gilles, un personnage nocturne et lumineux, passe au peigne fin les fausse valeurs contemporaines, les inconsistances idéologiques du moment, les simulacres d'existence et rencontre une morale dure et haute qui sauve tout de même ce qu'une époque a de plus vivant et émouvant : l'enfance, l'amour, l'authenticité de certains êtres.
Citation : « Gilles écrivait aussi, pas seulement de la poésie. Des proses. Un exercice, un entraînement de haut vol. Il retirait de ces pages écrites tard dans la nuit une plus grande sensibilité aux autres, à lui-même comme être humain, il voyait mieux, il écoutait mieux, il goûtait mieux, dans la surprise d'une langue qui semblait tout comprendre. Après, le monde brillait davantage… » (p. 71).
Livre vital, dont on ressort plus fort, plus lucide, mieux armé.
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Ce roman, dont le personnage principal se prénomme Gilles - et dont l'auteur se distingue nettement - établit une sorte d'arc temporel entre les années 30 - et le Gilles de Drieu la Rochelle - et notre temps de houellebecquisme triomphant. L'auteur réussit le tour de force consistant à détruire la médiocrité ânonnante ambiante tout en renversant le négativisme du surface en éthique de premier ordre. Tour de force aussi que d'écrire un roman formellement hors normes, incluant de la plus pure poésie en même temps qu'une satire des plus bernhardiennes. Hoët apparaît ici comme l'antidote à une époque dominée par le symptomatique et déliquescent Houellebecq dont la poésie de mirliton épouse docilement un niveau analytique situé quelque part entre les fiches Wikipédia qu'il pompe et un Zemmour qu'il bégaie. Il faut absolument lire cette Contre-heure, un opus d'une maturité et d'une lucidité sereines que les lecteurs peu préparés, amateurs de Houellebecq et de Nothomb, ne peuvent que honnir. Enfin une œuvre, non pas un simple livre, et une œuvre cinglante, émouvante, précise.
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Une histoire de prof de philosophie, un sujet que connait bien l'auteur, qui est justement professeur de philosophie ! Brillant, cet enseignant, comme beaucoup d'autres subit un certain mal de vivre dans notre période actuelle, marquée par une envahissante médiocrité ambiante.
D'autant plus que cette nouvelle rentrée scolaire est marquée par Victoire, une élève de première qui a sauté du troisième étage du lycée où enseigne Gilles, personnage central de ce roman.
"Il faisait beau pourtant." C'est la première phrase de ce premier roman réussi. Très vite, l'auteur nous donne le ton, faisant surgir le portrait de cet enseignant pleinement conscient du décrochage d'une grande partie de ses élèves, et surtout maniant un humour corrosif.
Avec un acharnement tout à fait plaisant, Gilles passe en revue les diverses tares bien ancrées dans notre société actuelle. Pour lui, la débâcle est généralisée, et ce n'est pas nous qui dirons le contraire. Gilles nous parle avec un certain réalisme, parfois un peu désespéré, de notre société de consommation ou les apparences dominent, où le paraître a remplacé l'être, ou le manque de culture s'étale chez les élèves, reflet de la nullité crasse des médias. Un beau personnage ce Gilles, conscient, lucide, sensible, trop sensible (?) qui le rend différent, avec une dose de souffrance. Ce qui entraine des rapports pas vraiment simples entre Gilles et les femmes. Et pourtant une jeune femme aux yeux verts pourrait...
Sébastien Hoët, né à Lille, nous offre donc un premier roman réussi, bien dans l'air du temps, dans le bon sens du terme. Cet enseignant en philosophie n'en est pas à sa première publication, puisqu'il est déjà l'auteur de recueils de poésie, notamment chez L'harmattan, ce qui est une bonne référence. Il contribue également à l'excellente revue cinéphile Tausend Augen où il a supervisé un dossier sur l'un de nos cinéastes favoris, David Lynch. La contre-heure donne d'ailleurs l'envie de découvrir ses autres écrits.
Lien : http://danactu-resistance.ov..
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On est d'emblée saisi par la tragédie qui ouvre le roman, la défenestration d'une lycéenne. Elle permet à l'auteur de dresser le portrait critique de toute une société, d'abord de lui-même, mais plus largement de la médiocrité générale ambiante. Paradoxalement, on rit beaucoup, tant le style est incisif et explosif à la fois. Je relis certains passages, ce n'est pas à piquer des vers ! Les frasques amoureuses du héros y contribuent, mais aussi la trouvaille des mots. Roman aussi à idées, à méditations, mais qui restent localisées, toujours à propos, quasiment invisibles. La fin est remarquable (je n'en dis rien !).
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Voilà qui se lit bien, se rit bien, livre plein d'humour et de situations cocasses, sur fond de tragédie collective diluée dans une époque sans profondeur. Hé hé.
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Batman. A un moment donné, et de manière comique, le narrateur ivre se prend pour Batman. Mais au fond c'est une sorte d'indice métadiégétique. Oiseau nocturne, homme séparé, être hybride, le narrateur n'adhère pas aux situations qu'il traverse depuis cette faille qui a eu lieu dans sa vie, et qui semble détachée de l'intrigue (la mort de Victoire). En réalité, c'est de cette rupture d'avec la vie qu'il est question, et de l'ombre de la morte rejointe oniriquement en fin de roman. Belle allégorie de cette ombre de mensonge et de simulacre qui nous sépare de notre propre vie, La contre-heure est aussi une déclaration de rupture avec la médiocrité de l'époque, sans haine ni acrimonie, mais avec dureté et précision.
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L'ange s'est envolée. Son âme invisible se faufile dans chaque moment de vie, elle défie le terrestre, elle happe les vivants vers leur devenir-mortel, elle anéantit les sols. A la fin, on la rejoint, dans le plus-vrai, dans la réalité non-destinée. Nous y sommes.
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