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Critique de raton-liseur


Roman de jeunesse de Victor Hugo, écrit en 1821, Han d'Islande m'a plus fait pensé à un livre de Dumas, roman d'aventure sans prétention (j'ai une dent irrémédiable contre Dumas, je dois l'avouer, non pour un manque de qualité littéraire mais, je crois, parce que j'ai lu assez tôt Les trois Mousquetaires, à un âge où pour moi les livres se finissaient toujours bien, et je me suis sentie flouée par une fin plus noire que ce que je pouvais imaginer. Au moins vingt ans après cette lecture, je ne lui ai toujours pas pardonné, et n'ai jamais rouvert un livre de lui…), qu'au Victor Hugo tourmenté des grands romans qu'on lui connaît.
J'ai donc apprécié cette lecture plus pour son côté divertissant que pour ce que j'aime d'habitude dans les oeuvres de Hugo. Situé en Norvège (malgré le titre) à la toute fin du XVIIème siècle, le roman est l'histoire des conspirations et des machinations que l'attrait du pouvoir et des privilèges fait échafauder, avec la figure improbable mais tellement nécessaire au roman de cape et d'épée du preux chevalier que rien ne peut détourner des nobles sentiments et de l'honneur, bien aidé en cela par les soupirs extasiés d'une jeune ingénue qui attend patiemment sa libération. Et puis, parce qu'un gentil n'existe pas en soi mais grâce au méchant qui lui donne la réplique, Han d'Islande est là pour incarner la barbarie à l'état le plus brut.
Certes ce résumé est quelque peu ironique, mais il me paraît souligner ce que j'ai apprécié dans cette lecture et éviter tout malentendu pour d'éventuels lecteurs à venir. Ce fut un moment divertissant, où les péripéties sont parfois prévisibles quelques chapitres à l'avance, mais où l'on peut se laisser surprendre, une histoire agréable à lire et qui montre que, si le génie de Victor Hugo ne s'est pas créé en un jour, ses écrits moins célèbres sont aussi intéressants à lire, bien qu'à d'autres titres.

Deux aspects que j'aimerais souligner, avant de conclure cette note de lecture. D'abord, l'ironie de Victor Hugo, très pince-sans-rire, est déjà très présente dans ce texte. Dans le roman, certes, mais surtout peut-être dans les préfaces, notamment celles à la première et la seconde éditions (la préface plus tardive se prenant un peu trop au sérieux cette fois). J'avais vu ce trait du style d'Hugo dans différents livres que j'ai lu de lui récemment, et j'ai été étonnée de voir que ce roman de jeunesse présente déjà de telles caractéristiques.
Ensuite, je suis étonnée, dans ce livre somme toute assez léger, de l'importance donnée aux sentences de mort. Il y a plusieurs scènes où intervient le bourreau, dont certaines décrivant par le détail (comme sait si bien le faire Victor Hugo) des exécutions capitales, comme l'on dit pudiquement. Parfois, ces scènes n'apportent rien à l'intrigue, mais Victor Hugo devait tenir à ces évocations lugubres. Je ne dirais pas que l'on retrouve là les prémisses de ce que sera un des plus grands combats politiques de Hugo car il me semble qu'il est plus question de fascination que de positionnement politique ou philosophique. C'est peut-être dans cette fascination cependant que s'enracinera plus tard le combat, mais même s'il est question de sens moral (chevaleresque serait peut-être plus approprié bien qu'un peu anachronique peut-être), Han d'Islande n'est pas encore un écrit politique. Victor Hugo trempera sa plume dans l'amertume des inégalités et dans l'écoeurement de la morale bien-pensante plus tard et nous donnera alors des romans bien plus incisifs. Ce n'est pas ce qu'il faut espérer en ouvrant ce roman, le premier publié par Victor Hugo, mais ce n'est pas non plus une raison pour bouder son plaisir. Son style est déjà affirmé, et il n'est pas toujours désagréable que les preux et les vertueux blancs comme neige triomphent des fourbes et des vilains.
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