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Critique de Cricri124


Dans la famille dystopie, je demande une dictature parfaite !
Parfaitement, une dictature parfaite !
Selon la définition d'Aldous Huxley lui-même : « La dictature parfaite serait une dictature qui aurait les apparences de la démocratie, une prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s'évader, un système d'esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l'amour de leur servitude. » C'est tout l'enjeu de ce livre. Flippant la manière dont cela résonne à nos oreilles du XXIème siècle pas vrai ?

Passé le premier chapitre assez rébarbatif sur les méthodes de clonages, nous sommes propulsés dans une société où les hommes sont créés et élevés en batterie, conditionnés, modélisés dès leur plus jeune âge (pour ne pas dire dès leur conception) dans la fonction qui leur a été attribuée ; une société organisée sous forme de castes, des alphas aux epsilons, qui vénèrent la stabilité sociale, « chacun appartient à tous les autres » (si !si !) et Notre Ford bien sûr ! Dans ce monde merveilleux, il n'y a plus ni guerres, ni haine, ni violence, ni religions (ou plutôt, une nouvelle forme a supplanté toutes les autres), il n'y a plus ni amour, ni libre arbitre non plus. Pourquoi faire ? puisque tout est organisé et contrôlé pour que l'homme ne puisse plus être malheureux. Mais ne pas être malheureux signifie-t-il pour autant être heureux ? Ford soit loué !, si l'un d'entre eux a par inadvertance un coup de mou, ou un relent d'agressivité, ma foi, il y a le soma ! une drogue qui a « tous les avantages du Christianisme et de l'alcool : aucun de leurs défauts. » et qui n'est rien de moins qu'un « fragment de ce que nos ancêtres appelaient l'éternité. » C'est pas beau la vie ???

Enfin bref, un monde merveilleux, où tout le monde semble barboter dans le bonheur. Tout le monde ? C'est pourtant principalement à travers le regard de quelques personnes pas si bien adaptées que cela à ce modèle que nous découvrons cette société. Je n'en dirai pas plus, même si mes plus grands griefs sur ce livre vont à l'encontre des personnages. A vous de le découvrir et de le vivre !

Mine de rien, ce livre est écrit avec beaucoup humour et autant de clins d'oeil. Mais son plus grand intérêt est sans doute de nous inciter à réfléchir sur le devenir notre société. L'auteur nous met en garde, entre autre, contre le scientisme, l'eugénisme, la surconsommation, l'économie érigée comme une fin en soi (et non un moyen) et bien évidemment, contre les differentes facettes du conditionnement. Certains des thèmes abordés se sont éloignés (temporairement en tout cas) d'autres sont plus actuels que jamais. Ce qui m'impressionne le plus est que ce livre ait été écrit en 1932. Dans un environnement où les régimes totalitaires étaient en pleine floraison, l'auteur imagine un contre modèle très proche, trop proche, par certains aspects de notre monde actuel. Vraiment impressionnant.

Merci à Nadou38 de m'avoir embarquée dans cette lecture improvisée qui s'est métamorphosée en doublé inattendu, virevoltant entre SF et moyen âge ^^

Je finirai par la citation de Nicolas BERDIAEFF, en épigraphe ou épitaphe de ce livre (question de point du vue!) : « Les utopies apparaissent comme bien plus réalisables qu'on ne le croyait autrefois. Et nous nous trouvons actuellement devant une question bien autrement angoissante : comment éviter leur réalisation définitive ?… Les utopies sont réalisables. La vie marche vers les utopies. Et peut-être un siècle nouveau commence-t-il, un siècle où les intellectuels et la classe cultivée rêveront aux moyens d'éviter les utopies et de retourner à une société non utopique moins « parfaite » et plus libre. »
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