Extrêmement fort & Incroyablement près ou le bizarre incident de la clé perdue
Bon. Depuis le 11 septembre, on peut se demander si les jeunes romanciers américains (
Marisha Pessl, Dona
Tartt, etc.) n'ont pas adopté le postulat de "l'enfant surdoué et inadapté qui en a gros sur la patate" comme nouvelle forme d'idiotisme autorisant le lyrisme - que tout le monde sait condamné depuis belle lurette. Les sentiments poignants provoqués par des situations terribles -comme "j'ai perdu mon papa ou ma maman dans des circonstances atroces", c'est quand même de l'accroche-coeur un peu trop facile.
Pouvoir dire tout son mal-être d'une manière absolument tordue, singulière et très cultivée (pas moins d'une référence pointue et wikipédesque par page) : heureusement qu'il y a les enfants surdoués presque autistes !
Bon. je caricature un poil. Mais, un poil de nez, alors. et encore.
Ainsi, Oskar Schell, qui est le narrateur d'une bonne partie du roman, a une histoire familiale plutôt compliquée - et dont il ne perçoit que le sommet de l'iceberg. Son père a disparu lors des attentats du 11 septembre. le hic dans l'horreur, c'est que l'enfant avait le malheur d'être à la maison lorsque son père tentait de joindre la famille pour les rassurer - au milieu des flammes. Et l'enfant n'a pas pu répondre. Pas eu la force. Plus tard, il trouve une clé dans un vase : son père avait-il un secret ? La dite clé se trouvait dans une enveloppe portant le simple mot "Black". Mais avec une majuscule : un nom propre ? de qui ? Seul un enfant un peu autiste peut rapidement recenser le nombre de Black habitant New-York. Et se lancer dans l'incroyable quête de la bonne personne.
A partir de là, c'est une odyssée découvrant les fêlures des hommes et des femmes peuplant New-York assez pleine de bons sentiments: tout le monde il est blessé, tout le monde il est en quête d'amour. Même sa grand-mère, qui, elle-même, a vécu ses propres drames quelque part en Allemagne, année zéro.
Et c'est une incroyable machine travaillant la difficulté de communiquer qui s'enclenche : ratures, conversations codées, ellipses... Autant d'expérimentations livresques confirmant la difficile communication des êtres. Après tout, le petit n'a pas osé décrocher.
Bon. Un peu plein de bon sentiments... La preuve :
Tom Hanks est de la partie dans l'adaptation.
Et en même temps : ça peut faire du bien, les bons sentiments. Si vous en cherchez, simples, assez "humains" au sens plat du terme, et avec une composition maline - empruntez les sentiers tortueux de ce roman qui recomplique le roman mièvre.