La première fois que j'ai été deux

Sa visite me laissait une drôle d’impression. Son émerveillement devant les bibliothèques de maman avait fait remonter des souvenirs lointains. Ces soirées où je regardais ma mère, perceuse en main, disposer les rayonnages de ce qui allait constituer l’œuvre de sa vie : une maison-livres. Une demeure dans laquelle la lecture était sans doute la seule échappatoire possible aux douleurs de l’existence.

En marchant, je me disais que j’aimerais vraiment être quelqu’un d’autre. Une fille gaie et enjouée avec plein d’amis. Celle qui est de toutes les fêtes et dont le forfait téléphonique n’est jamais dépassé parce que c’est toujours elle qu’on appelle. Je donnerais cher pour être cette fille-là. Au lieu de ça, je vis comme une recluse, certains me détestent parce que j’ai toujours les meilleures notes, et lorsque je suis dans un groupe – tout petit – je ne trouve jamais rien à dire. J’ai beau retourner toutes sortes d’idées dans ma tête, il doit passer trois ou quatre trains avant que j’ouvre la bouche, et quand je me décide enfin à formuler un quelconque propos, les autres sont passés à autre chose depuis belle lurette. Parfois, le soir, toute seule dans mon lit, je me dis que j’aurais dû dire ceci ou cela, mais je sais bien qu’il est trop tard et tout le monde s’en fout. J’ai souvent l’impression de ne pas avoir l’énergie suffisante pour entrer pleinement en communication avec les autres.

L’atterrissage forcé de ce représentant de la couronne britannique dans notre terminale littéraire constituait en soi l’un des événements les plus intéressants depuis la rentrée. Je n’allais pas bouder mon plaisir.

Pour autant que je me souvienne, j’ai toujours écrit. Lire, écrire et jouer de la musique aura été ma devise pendant ces dix dernières années. J’ai déjà rédigé plusieurs milliers de pages d’un journal intime qui n’en finit pas. J’ai toujours pensé avec un stylo à la main. Je note tout ce qui me passe par la tête. Je fais des phrases. Mélanie dit souvent : » Tu parles comme un livre. Tu peux as savoir comme tu peux être chiante, ma pauvre fille. Tu te prends pour George Sand ou quoi ? » Y’a sûrement du vrai là-dedans. Mais qu’y puis-je ?

Le thé que me prépara Gerda n'avait évidemment rien à voir avec tous ceux que j'avais bus jusqu'alors et je retrouvai avec plaisir les toasts au beurre salé et à la marmelade d'orange. Toutes ces impressions étaient bien normales puisque j'étais devenue britannique pendant la nuit.

C’est pour ça qu’il l’a quittée. Pour le cul! Les mecs, à quarante piges, c’est des vrais cons ! Quand ils cherchent une direction, ils regardent leur bite... et ils ont vite fait de trouver où aller.

Tom était très fort. Il avait trouvé le vice de procédure qui m'empêchait de conclure comme je le voulais. Je devais avouer que son argument tenait la route. Comme allais-je pouvoir l'oublier ?

Ce fut un baiser qui appelait toutes les déclarations du monde. Un baiser plein de tendresse et de désir, un baiser rêvé.

Cerné de toutes parts par Londres, ce village continue de revendiquer son autonomie. Il regarde la grande ville de haut, conservant fièrement son atmosphère provinciale et bucolique, à l'abri du brouhaha londonien. Je ne cois pas qu'il existe quelque chose d'équivalent à Paris. Il faudrait imaginer Montmartre adossé à une vaste lande qui l'isolerait du reste de la ville. Montmartre où l'on aurait remplacé le lourd et prétentieux Sacré-Coeur par le modeste clocher d'une église toute simple noyé dans un océan de verdure.

" A chaque garçon ça déception "