Métamorphoses de l'âme et ses symboles

La fuite devant la vie ne libère point de la loi du vieillissement et de la mort. Le névrosé qui cherche à se soustraire aux nécessités de la vie n’y gagne rien et se charge au contraire du fardeau d’une vieillesse et d’une mort qu’il goûte par avance et qui, parce que sa vie n’a ni sens ni contenu, doit revêtir un aspect particulièrement cruel.

Quand se produit une sorte d’irruption de l’inconscient, il s’agit souvent d’une situation dans laquelle l’inconscient devance le conscient. Ce dernier est de quelque manière resté en panne et c’est alors l’inconscient qui prend en charge la marche en avant et la métamorphose dans le temps, mettant fin au temps d’arrêt. Les contenus qui se déversent alors dans la conscience représentent, sous forme archétypique, ce que la conscience aurait dû vivre pour ne pas rester stationnaire.

Bien que l’inconscient soit en général complémentaire du conscient, il arrive cependant dans des cas isolés que ce complément n’ait pas un caractère machinal que l’on puisse prévoir sans ambiguïté, mais qu’il se comporte comme tendant vers un but et avec intelligence, et que pour cette raison il soit plus exact d’y voir une compensation.

Ce n’est pas la mère qui a mis sur la route le ver venimeux, mais c’est la vie elle-même qui exige que s’accomplisse le cours du soleil, qu’il s’élève du matin jusqu’au midi et, franchissant le midi, se hâte vers le soir, nullement en désaccord avec lui-même, mais au contraire dans la volonté de ce déclin et de cette fin.

L’homme ne se métamorphose pas en sa forme immortelle, mais […] il est déjà les deux dans la vie, le moi et le soi.

La plongée en soi (introversion) est pénétration dans l’inconscient en même temps qu’ascèse. C’est de cet acte que provient, selon la philosophie des Brahamanas, le monde ; pour les mystiques, la rénovation et la renaissance spirituelle de l’individu qui naît à un nouveau monde de l’esprit.

L’inconscient s’insinue sous la forme du serpent quand la conscience éprouve de la peur en présence de la tendance compensatrice de l’inconscient, et c’est ce qui se produit le plus souvent lors de la régression. Mais celui qui dit oui en principe à la compensation ne rétrograde pas, au contraire ; par son introversion, il va au-devant de l’inconscient.

c’est le meilleur qui est le plus menacé d’une altération diabolique, car il a au maximum écrasé le mal.

La tendance à l’autonomie a pour conséquence que l’anima anticipe des idées et des décisions de la conscience masculine, de sorte que celle-ci se trouve continuellement en présence de situations qu’elle n’a pas cherchées, et qu’apparemment elle n’a pas provoquées.

On sent un glissement et l’on se met à lutter contre ce penchant, à se défendre du sombre flot de l’inconscient qui monte et de sa séduction invitant à la régression, qui se dissimule, trompeuse, sous des idéaux sacrés, des principes et des convictions. […] Les convictions se transforment en platitudes, rengaines ; les idéaux, en habitudes endurcies ; et l’enthousiasme, en un geste automatique. La source d’eau vitale s’écoule goutte à goutte. […] S’il arrive que l’on ose regarder vers l’intérieur, […] alors on peut avoir un pressentiment de besoins, aspirations et appréhensions, dégoût et obscurité. Le cœur cherche à s’en détourner, mais la vie aimerait à s’y enfoncer. […] mais le devenir nous précipite et fait de nous des traîtres à l’idéal qui était le nôtre jusqu’alors et à nos meilleurs convictions ; traîtres à nous-mêmes tels que nous croyons nous connaître. C’est la catastrophe pure et simple parce qu’elle est un sacrifice non voulu. Mais les choses se déroulent autrement quand le sacrifice est fait volontairement. Car alors il n’est plus effondrement, « transmutation de toutes les valeurs », destruction de tout ce qui fut une fois sacré, mais métamorphose et conservation. […] Nul ne peut nier le danger de la descente, mais cette descente, on peut la tenter. Ce n’est pas un devoir de la tenter, mais on est certain que quelqu’un l’osera. Quiconque doit opérer cette descente devra la faire les yeux grands ouverts. Alors c’est un sacrifice qui fléchit même le cœur des dieux. A chaque descente succède une montée.