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Critique de nilebeh


Roman en quatre volumes.
Le héros principal est Richard Dalleau, avocat d'abord jeune et inexpérimenté mais ambitieux qui va, grâce à un stratagème véreux du politicien Bernan , devenir riche et célèbre. Sa première affaire, l'affaire Étienne Bernan, met un terme aux années de jeunesse, partagées entre le domicile de parents modestes mais aimants et les tranchées de la guerre de 14-18. C'est l'époque de l'idéalisme, des grandes amitiés, des amours timides, de l'incommensurable admiration vouée au Capitaine Namur qui commande ses hommes au front et finira comme une loque après avoir été touché par une explosion. Tout semble permis au jeune Richard, tout lui semble offert. Mais jeune, armé de solides principes moraux et d'une éducation aux philosophes et écrivains par son père, médecin de quartier et sa mère, sereine et douce maîtresse des lieux, il n'a guère d'espoir de « faire carrière » .

Son jeune frère, Daniel, est d'une beauté émouvante et il va, avant son aîné, se lancer à la découverte de l'amour physique. Initié par une bourgeoise d'âge mûr, il fait ses premières armes dans le monde des « grands ». Argent reçu de sa maîtresse, amis douteux, il devient adepte du jeu et, sous ses allures juvéniles et pures, il s'engage sur une mauvaise piste.
Jusqu'au jour où Étienne Bernan, compagnon d'armes de Richard, tue sa mère à son retour de la guerre, sa mère , la bourgeoise qui « se paie des petits jeunes »  pour tromper sa frustration d'épouse dédaignée. Et c'est à Richard que Bernan demande d'assurer la défense de son fils.
Plaidoirie touchante, jurés achetés à l'insu de l'avocat: Étienne est acquitté.
Vanzone, criminel corse et malfrat bien connu n'aura pas la même chance: malgré la comparution bouleversante du capitaine Namur transformé en infirme cérébral et une plaidoirie grandiose, ce sera la peine de mort. Pourtant Richard a été si brillant que sa carrière est lancée et il entre dans le monde des gens riches, célèbres et...pourris.
Sexe, orgies, drogue, alcool, jeu, bassesses et magouilles politiques et judiciaires: il va tout connaître et s'y repaître, s'y vautrer, accumulant trahisons des gens « propres » et loyaux (Christiane,cousine du marquis de la Tersée, Lucie, sa secrétaire), suivant tous les corrompus et se jetant à corps perdu dans les plaisirs les plus destructeurs.
Certains pôles sont pourtant ses points d'appui et il les préserve un certain temps: sa mère Sophie et son père Anselme, dans le sombre et médiocre appartement de la rue Royer-Collard, son frère Daniel, qui lui voue un amour et une admiration sans bornes (mais qu'il va trahir en lui volant son amour, Geneviève), Dominique-Gloria, ex-petite jeune fille toute simple, apprentie comédienne devenue demi-mondaine, droguée, désintoxiquée et qui va l'entraîner dans l'enfer de l'opium puis de la cocaïne.
Sa vie est traversée de gens louches dont il finit par devenir dépendant: le malfrat corse ex-compagnon de tranchée Fiersi, devenu proxénète, indic et trafiquant de drogue, Mercapon, flic ripoux, Paillantet, vieux ministre libidineux amoureux un temps de Dominique etc...
Aucune bouffée de fraicheur dans ce roman, aucun personnage vraiment sympathique (même les femmes amoureuses et bafouées finissent par être navrantes, même les amis désintéressés au départ comme Daniel, Gérard Lambert, le prof de philo devenus tous deux accros à la drogue et au sexe).
Les personnages, solides au départ, des deux parents s'effritent à leur tour, usés, fatigués, malades dans leur si joli quartier riche du Luxembourg qu'ils vont finir par quitter, faute d'argent, quand le docteur deviendra incapable d'exercer.
En fin de compte c'est surtout ce quartier qui apporte sa fraicheur, le jardin, la Fontaine Médicis, la Sorbonne, la rue Royer-Collard. Et les premières bouffées de jeunesse, vite transformées en descente aux enfers.
Triste vision d'un monde jeune et plein de promesses, décimé par l'après-guerre et ses pourritures. Triste jeunesse qui croyait, parce qu'elle avait « sauvé la France », avoir droit à une vie heureuse, où l'amour et l'argent seraient faciles. Et découvre que les autres, les plus vieux, plus riches, les « planqués » qui ne sont pas montés au front, ne leur laissent aucune chance.

L'écriture, - c'est Kessel!- est d'une précision et d'une légèreté réjouissantes.
Mais était-il nécessaire de faire durer si longtemps (4 volumes) la longue et irrépressible descente aux enfers de Richard Dalleau?
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