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Critique de Philemont


Sur Les mille et une vies de Billy Milligan...

Daniel KEYES est un auteur américain peu prolixe. Il bénéficie pourtant d'une renommée internationale grâce à son roman Des fleurs pour Algernon publié en 1966 aux Etats-Unis, en 1972 en France. Une autre de ses oeuvres était parvenue jusqu'à nous en 1982 grâce aux défuntes éditions Balland : Billy Milligan - L'homme aux 24 personnalités. Epuisée depuis longtemps, Calmann-Lévy la réédite aujourd'hui, dans sa collection Interstices, sous le titre Les Mille et une vies de Billy Milligan.
Les Mille et une vies de Billy Milligan n'est pas une fiction mais raconte l'histoire véridique de William Stanley Milligan à partir du moment où il est arrêté pour viols en 1977 et que l'on découvre qu'il possède une personnalité multiple. La justice laisse alors rapidement la place à la psychiatrie, et bientôt à la presse, et même à un "auteur" que l'on sait être Daniel KEYES lui-même…
Le roman prend la forme d'un journal circonstancié des évènements avec pour toile de fond la vie de Milligan telle que reconstituée par les différents protagonistes qui l'entourent dès que l'affection psychologique est détectée. le travail est d'ailleurs éminemment complexe puisque pas moins de 24 personnalités cohabitent dans un unique corps, chacune intervenant plus ou moins aléatoirement, ou consécutivement à un choc plus ou moins violent. La difficulté pour le quotidien de Billy Milligan est que chaque personnalité n'a aucune conscience des actes commis par celle qui l'a précédée. Ainsi les viols à l'origine de l'arrestation de Milligan ont-ils bel et bien été commis mais niés, à juste titre, par une majorité des personnalités occupant son esprit.
La véracité des faits narrés dans Les mille et une vies de Billy Milligan rend l'oeuvre a priori très différente de l'opus le plus connu de Daniel KEYES. Pourtant on y détecte dès les premières pages le même intérêt pour l'univers médical et son interaction, pas forcément bénéfique, avec l'être humain. La méthode est également similaire puisque l'auteur s'efforce de ne pas juger, mais montre sans complaisance des faits qu'il est difficile de discuter sans une connaissance pointue du dossier, ce que le commun des lecteurs serait bien en peine d'acquérir. le résultat est enfin comparable à celui obtenu avec Des fleurs pour Algernon : un roman d'une rare sensibilité et parfaitement construit en dépit de la complexité du personnage faisant l'objet de toutes les attentions.
Pour toutes ces raisons, Les mille et une vies de Billy Milligan est une oeuvre fascinante qui confirme, certainement trop tardivement, que Daniel KEYES est un auteur exceptionnel.

Sur Les mille et une guerres de Billy Milligan...

Suite directe des Mille et une vies de Billy Milligan, Les mille et une guerres de Billy Milligan démarre là où le premier opus s'était achevé : sur le transfert, en octobre 1979, du principal protagoniste dans l'hôpital d'Etat de Lima, dans l'Ohio, où les conditions d'incarcération sont telles que l'établissement est parfois surnommé « l'hôpital de l'enfer ». Démarre alors un rapport circonstancié de la vie de Billy Milligan dans cet établissement, des violences qui lui sont faites, des injustices dont il est la victime, de l'absence de soins adaptés à son état psychologique. Mais Billy se bat avec l'aide d'une poignée de médecins et d'avocats, ce qui le conduit à des transferts d'hôpitaux en hôpitaux jusqu'à sa libération, et sa guérison partielle, en 1991.
Avec ce deuxième roman consacré à William Stanley Milligan, Daniel KEYES adopte donc la même méthode que dans le premier volume. Il s'agit d'un véritable journal relatant la lutte d'un homme contre un système qui ne le comprend pas, et qui ne le souhaite d'ailleurs pas. Selon ce système, la folie ne peut être traitée que cliniquement à l'aide de médicaments abrutissants ; il ne faut en aucun cas la laisser s'exprimer, sous peine de devoir gérer des situations dangereuses auxquelles la seule réponse possible est le châtiment. C'est ce que s'attache à montrer et dénoncer l'auteur à l'aide d'une prose méthodique et précise, presque froide.
On touche ici à la différence de ton entre les deux volumes du diptyque. En effet, Les mille et une guerres est moins émouvant que Les mille et une vies de Billy Milligan du fait que l'auteur ne revient quasiment jamais sur le passé de son personnage, ce qui donnait une grande force émotionnelle au premier récit. On peut aussi s'interroger sur la parfaite objectivité de l'auteur qui, avec les années, est devenu un ami proche de Billy.
Il n'en reste pas moins que le personnage est singulier et que son mode d'incarcération est terrifiant. Pour le faire ressentir aux lecteurs la prose de Daniel KEYES est parfaitement efficace.
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