Le jeu du pendu

C'est l'hiver et nous sommes au coeur de la Moselle, perdus dans le brouillard qui s'élève dans la campagne lorraine. le commandant Simon Dreemer à peine arrivé de Paris doit déjà enquêter et chercher à comprendre les gens d'ici. Qui sont bien taiseux. Il faut dire que retrouver une jeune fille de dix-sept ans au fond d'une crevasse de la vieille mine n'aide pas à délier les langues...

Simon va devoir apprendre le pays et écouter, faire parler aussi et il sera heureusement aidé par le lieutenant Jeanne Modover, une fille du coin. A eux deux, ils vont chercher les indices du présent et remuer le passé. Car ces indices, les brindilles retrouvées dans le cimetière ont tout de même quelque chose de dérangeant, et le Christ en croix ligoté rappelle étrangement la jeune morte… le passé pèse sur le pays, un passé de guerre que certains voudraient bien oublier, un passé de collabos et de résistants, de gentils et de salauds, mais pas toujours ceux que l'on croit…

Ce polar décrit de manière très belle la campagne de cette région et ses habitants, ses coutumes et on y rencontre tous les personnages du village, les anciens et les plus jeunes. le récit est plus tourné vers la psychologie des personnages que vers un suspense de page-turner, mais le lecteur aimera prendre son temps lui aussi et découvrir page après page les secrets de ce pays, magnifié sous la plume d' Aline Kiner.

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Une enquête policière plutôt classique : des jeunes filles blondes sont retrouvées mortes, ligotées comme le « Dieu piteux », Christ en croix que l'on trouve dans certains villages lorrains. Un couple d'enquêteurs au profil plutôt intéressant : lui, commissaire muté de Paris après un drame, elle, enfant du pays, à la fois en rupture avec son enfance et enracinée dans le tissu local.
Toute l'originalité du livre vient du mélange de deux pistes d'enquête : le douloureux héritage de 44, lorsque des Résistants ont pendu un homme soupçonné de collaboration, et un passé plus récent mais aussi porteur de tragédie, celui des mines de fer. Car les victimes, enfouies jusqu'à étouffer dans la boue des anciennes galeries, évoquent un accident qui a bouleversé le village, essentiellement peuplé de mineurs ou d'anciens mineurs.
Au-delà de l'enquête policière, plutôt bien menée, ce livre propose une plongée dans un univers peu connu, celui des « gueules jaunes » comme on appelle là-bas les mineurs, et propose un « paysage lorrain avec villages désaffectés » qui donne au récit une dimension sociale bien marquée.

A côté de ça, l'écriture est bonne. le chapitrage par jour, sous-chapitrage par heure de la journée, permet de maintenir le rythme de l'enquête. Les descriptions permettent de traduire cette ambiance tristoune et grise de cette ancienne région industrielle aujourd'hui dans un état assez lamentable. de même, les personnages principaux sont fouillés, détaillés et psychologiquement bien construits. le Jeu du Pendu est donc un petit polar sans prétention et plutôt intéressant qui pêche par là où il aurait aimé se différencier, la spécificité locale.
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