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Citations sur Le Temps aboli : Dialogues entre Jiddu Krishnamurti e.. (10)

L'ABANDON DU SCHÉMA ÉGOCENTRIQUE

KRISHNAMURTI : Nous parlions l’autre jour de l’abolition du temps. Les scientifiques cherchent à élucider ce problème en étudiant la matière. De même, ceux qui se prétendent religieux cherchent à savoir — pas seulement verbalement — si le temps pouvait s’arrêter. Nous avons déjà pas mal examiné cette question, et nous disons qu’un être humain ouvert à l’écoute est capable d’appréhender l’abolition du temps, grâce à la vision pénétrante. Parce que cette vision n’a rien à voir avec la mémoire. La mémoire est temps, la mémoire est expérience, savoir emmagasiné dans le cerveau, et ainsi de suite. Tant que ce processus est un jeu, la vision pénétrante est impossible dans quelque domaine que ce soit. Je parle de vision totale, pas de vision partielle. L’artiste, le scientifique, le musicien n’ont tous qu’une vision pénétrante partielle, et restent donc tributaires du temps.
Est-il possible d’accéder à la vision pénétrante totale, c'est-à-dire à l’abolition du « moi », puisque le « moi » c’est le temps ? Moi, mon ego, mes résistances, mes blessures, tout cela. Ce « moi» peut-il prendre fin ? C’est à cette seule condition qu’il y a vision pénétrante totale. Voilà ce que nous avons découvert.
(p. 114/115)
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KRISHNAMURTI : Voyez-vous, je ne médite pas au sens classique du terme. Ce qui se passe, en fait, c'est que je me réveille en train de méditer.
D. BOHM : Comment cela ?
KRISHNAMURTI : Une nuit, en Inde, je me suis réveillé; j'ai regardé ma montre, il était minuit et quart. J'hésite à en parler tellement cela a l'air extravagant, mais la source de toute énergie avait été atteinte. Et l'effet sur le cerveau était extraordinaire. Physiquement aussi - excusez-moi de parler ainsi de moi-même - mais, voyez-vous, il n'existait littéralement plus aucune division, plus aucun sentiment du monde, du « moi » Est-ce que vous me suivez ? Il ne restait que la sensation d'une formidable source d'énergie.
D. BOHM : Donc le cerveau était en contact avec cette source d'énergie ?
KRISHNAMURTI : Oui, et si je parle depuis soixante ans, c'est que je voudrais que d'autres y parviennent - non, il ne s'agit pas de parvenir. Est-ce que vous me comprenez ? Tous nos problèmes sont alors résolus. Parce que c'est l'énergie pure, de toute éternité. Comment puis-je - pas « moi », bien entendu -comment ne pas enseigner, aider, inciter - comment réussir à dire : « cette voie mène à une paix totale, à l'amour » ? Pardonnez-moi d'avoir recours à ces mots-là. Mais supposez que vous ayez atteint le point où votre cerveau lui-même en devient tout vibrant - comment feriez-vous pour aider les autres ? Vous comprenez ? Aider - pas débiter des mots. Comment aider les autres à accéder à cela ? Vous voyez ce que je veux dire ?
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L'ORDRE COSMIQUE

D.B. : Quelle est la source de ce que nous appelons désordre ? C’est comme un cancer, qui se développe à l'intérieur du cerveau, et dont les progrès sont incompatibles avec la santé du cerveau.
K. : Oui.
D.B. : Il progresse avec le temps, il prend de l’ampleur d’une génération à l’autre.
K. : Et chaque génération reproduit le même schéma.
D.B. : Avec chaque génération il tend à croître, s’amplifier au travers de la tradition.
K. : Comment mettre fin à ce schéma amplifié, comment y échapper ?
D.B. : Posons une autre question, voulez-vous ? Pourquoi le cerveau fournit-il l'humus qui permet à cette graine de germer ?
K. : Peut-être simplement par l'effet de la tradition ou de l'habitude.
D.B. : Mais pourquoi reste-t-il dans cette ornière ?
K. : Il s'y sent en sécurité. Il a peur de la nouveauté, car la tradition lui offre un refuge familier.
D.B. : Demandons-nous alors pourquoi le cerveau en arrive à s’abuser lui-même. Ce schéma implique un mensonge délibéré du cerveau au sujet du désordre, ce qui apparemment échappe à sa clairvoyance.
(p. 318)
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UN ESPRIT DÉLIVRÉ DU TEMPS ACCUMULÉ

KRISHNAMURTI : Nous disions que le temps psychologique est conflit, que le temps est l’ennemi de l'homme, et que cet ennemi existe depuis l’aube de l'humanité. Nous avons alors cherché à savoir pourquoi, dès l'origine, l'homme avait « fait fausse route », s'était « fourvoyé ». Et s'il était possible, dans ce cas, d’ouvrir à l'homme une voie où il puisse vivre sans conflit. Car, ainsi que nous le faisions remarquer hier, le mouvement extérieur est identique au mouvement intérieur. Il n’y a pas de clivage entre l'intérieur et l’extérieur. C'est le même mouvement. Et la question était de savoir si nous étions profondément, passionnément attachés à orienter l'homme vers une voie différente, afin qu’il ne vive plus dans le réseau du temps, à la seule lumière de la connaissance des réalités extérieures. Les religions, les hommes politiques, les éducateurs ont échoué, faute de s’y être jamais vraiment impliqués. Partagez-vous ce point de vue ?
DAVID BOHM : Oui. Je crois que les religions ont entrepris une amorce de débat sur les valeurs éternelles qui transcendent le temps, mais apparemment sans succès.
(p. 39)
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JK : Est-ce que c’est ça ? Que le cerveau ne peut pas contenir cette vaste énergie ?

DB : Disons que le cerveau tente de la contrôler, de la contenir, de l’organiser.

JK : L’énergie ne connaît pas l’organisation !

DB : Non, mais si le cerveau sent qu’il ne contrôle pas ce qui se passe en lui, il va chercher à y mettre de l’ordre.

JK : Monsieur, peut-on dire que le cerveau, votre cerveau, le cerveau d’un tel ou d’une telle, n’est pas né d’hier ? Qu’il est très, très vieux ?

DB : Vieux dans quel sens ?

JK : En ce sens qu’il a évolué.
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D. Bohm : Toute chose est par essence limitée, et là nous ne sommes pas en présence d'une « chose » parce que cette chose-là n'a pas de limites. Ou, tout du moins, elle contient tout en puissance.
Krishnamurti : Attendez ! Si « cela » n'est rien, et donc tout, alors tout est énergie.
D. Bohm : Oui, le fondement de tout est l'énergie.
Krishnamurti : C'est évident. Tout est énergie. Et quelle est la source de cette « chose » ? Ou bien n'existe-t-il pas du tout de source à l'énergie ? Rien que l'énergie ?
D. Bohm : L'énergie est, c'est tout. L'énergie est « ce qui est ». Il n'y a pas besoin de source... Voilà peut-être une approche possible ?
Krishnamurti : Non. S'il n'y a rien, et par conséquent tout, et que tout soit énergie... Il faut faire très attention ici : les Hindous aussi ont cette notion - l'idée que Brahman est
tout. Vous voyez ? Mais c'est devenu une idée, un principe, et une fois de plus c'est dans le cerveau que tout se passe. Mais c'est un fait qu'il n'y a rien, et par conséquent tout, et que c'est l'énergie cosmique. Alors, qu'est-ce qui a suscité cette énergie à l'origine ?
D. Bohm : Nous sommes en train de nous éloigner de la question du temps.
Krishnamurti : Je sais. Mais, vous voyez bien, les Chrétiens diraient : « Dieu est énergie, et c'est lui la source de toute cette énergie ». Non ?
D. Bohm : Mais les Chrétiens ont une notion qu'ils appellent la Divinité, et qui est aussi la source même de Dieu.
Krishnamurti : De même que les Hindous; les Arabes et les Juifs aussi. Sommes-nous à contre-courant de tout ceci ?
D. Bohm : Ce que nous disons paraît assez proche, sous certains aspects.
Krishnamurti : Et en même temps, pas tellement. Il faut faire très attention.
D. Bohm : Depuis des millénaires, on entend des propos du même ordre.
Krishnamurti : Alors, est-ce que nous cheminons dans le vide ? Est-ce que nous vivons dans le néant ?
D. Bohm : Eh bien, tout cela n'est pas si clair.
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KRISHNAMURTI : Nous disions que le temps psychologique est conflit, que le temps est l'ennemi de l'homme, et que cet ennemi existe depuis l'aube de l'humanité. Nous avons alors cherché à savoir pourquoi, dès l'origine, l'homme avait « fait fausse route », s'était « fourvoyé ». Et s'il était possible, dans ce cas, d'ouvrir à l'homme une voie où il puisse vivre sans conflit. Car, ainsi que nous le faisions remarquer hier, le mouvement extérieur est identique au mouvement intérieur. Il n'y a pas de clivage entre l'intérieur et l'extérieur. C'est le même mouvement. Et la question était de savoir si nous étions profondément, passionnément attachés à orienter l'homme vers une voie différente, afin qu'il ne vive plus dans le réseau du temps, à la seule lumière de la connaissance des réalités extérieures. Les religions, les hommes politiques, les éducateurs ont échoué, faute de s'y être jamais vraiment impliqués. Partagez-vous ce point de vue ?
D. BOHM : Oui. Je crois que les religions ont entrepris une amorce de débat sur les valeurs éternelles qui transcendent le temps, mais apparemment sans succès.
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KRISHNAMURTI : Bon. Ce terme « mouvement » signifie « temps ».
D. BOHM : Voyons... en fait il signifie passage d'un lieu à un autre. Mais de toute façon, il reste toujours l'idée de quelque chose qui ne soit pas statique. En niant le temps, on ne veut pas revenir à quelque chose de statique, et qui procéderait donc encore du temps.
KRISHNAMURTI : Prenons un exemple : supposons que notre cerveau soit depuis des siècles habitué, entraîné à suivre la direction du nord. Et voilà qu'il s'aperçoit soudain que ce cheminement vers le nord implique un conflit perpétuel. Dès lors qu'il prend conscience de cela, le cerveau lui-même change - la qualité même du cerveau subit un changement.
D. BOHM : D'accord. J'admets qu'il va s'éveiller dans une certaine mesure à un mouvement différent.
KRISHNAMURTI : C'est cela, différent.
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D. BOHM : Comment pouvez-vous dire s'il n'existe rien au-delà?
KRISHNAMURTI : J'y arrive. Je veux savoir si le regard que nous portons sur elle, notre perception, notre vision, partent ou non d'un concept. Car après tout, le monde occidental dans son ensemble - peut-être aussi le monde oriental - est basé sur des concepts. Tout le mode de pensée, toutes les croyances religieuses, sont basées là-dessus. Mais effectuons-nous notre démarche à partir de ces options-là, comme une investigation philosophique - par philosophique j'entends mue par l'amour de la sagesse, l'amour de la vérité, l'amour de la recherche, par un processus de l'esprit? Estce là ce que nous faisons, lorsque nous discutons, lorsque nous cherchons à examiner, expliquer, à élucider la nature de ce terrain originel, fondamental?
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Aidez-moi! Pas par la prière et toutes ces fadaises. Est-ce que vous comprenez ce que je veux dire? J'ai pratiqué le jeûne, la méditation, fait voeu de ceci, renoncé à cela. J'ai fait toutes ces choses-là. Parce que j'ai derrière moi un million d'années d'existence. Et au bout de ce million d'années j'en suis toujours au même point, au départ. Après avoir cru que depuis cette origine, j'avais avancé, j'avais progressé, c'est pour moi une grande découverte de m'apercevoir tout-à-coup que je me retrouve à mon point de départ. J'ai acquis de l'expérience, j'ai parcouru le monde, j'ai fait de la peinture, de la musique, de la danse - vous suivez? Mais je me retrouve à la case originelle du départ.
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