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Citations sur Discours de la servitude volontaire (143)

Tous les tyrans n’ont pas ainsi déclarés exprès qu’ils voulussent efféminer leurs gens ; mais, pour vrai, ce que celui ordonna formellement et en effet, sous-main ils l’ont pourchassé la plupart… Les théâtres, les jeux, les farces, les spectacles, les gladiateurs, les bêtes étranges, les médailles, les tableaux et autres telles drogueries, c’étaient aux peuples anciens les appâts de la servitude, le prix de leur liberté, les outils de la tyrannie. Ce moyen, cette pratique, ces allèchements avaient les anciens tyrans, pour endormir leurs sujets sous le joug. Ainsi les peuples, rendus sots, trouvent beaux ces passe-temps, amusés d’un vain plaisir, qui leur passait devant les yeux, s’accoutumaient à servir aussi niaisement, mais plus mal, que les petits enfants qui, pour voir les luisantes images des livres enluminés, apprennent à lire.
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Mais cette ruse de tyrans d’abêtir leurs sujets ne se peut pas connaître plus clairement que Cyrus fit envers les Lydiens, après qu’il se fut emparé de Sardis, la maîtresse ville de Lydie, et qu’il eut pris à merci Crésus, ce tant riche roi, et l’eut amené quand et soi : on lui apporta nouvelles que les Sardains s’étaient révoltés ; il les eut bientôt réduits sous sa main ; mais, ne voulant pas ni mettre à sac une tant belle ville, ni être toujours en peine d’y tenir une armée pour la garder, il s’avisa d’un grand expédient pour s’en assurer : il y établit des bordels, des tavernes et jeux publics, et fit publier une ordonnance que les habitants eussent à en faire état. Il se trouva si bien de cette garnison que jamais depuis contre les Lydiens il ne fallut tirer un coup d’épée. Ces pauvres et misérables gens s’amusèrent à inventer toutes sortes de jeux, si bien que les Latins en ont tiré leur mot, et ce que nous appelons passe-temps, ils l’appellent ludi, comme s’ils voulaient dire Lydi.
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C’est cela, que les hommes naissant sous le joug, et puis nourris et élevés dans le servage, sans regarder plus avant, se contentent de vivre comme ils sont nés, et ne pensent point avoir autre bien ni autre droit que ce qu’ils ont trouvé, ils prennent pour leur naturel l’état de leur naissance.
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Il n’est pas croyable comme le peuple, dès lors qu’il est assujetti, tombe si soudain en un tel et si profond oubli de la franchise, qu’il n’est pas possible qu’il se réveille pour la ravoir, servant si franchement et tant volontiers qu’on dirait, à le voir, qu’il a non pas perdu sa liberté, mais gagné sa servitude.
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Pour le moment, je désirerais seulement qu’on me fit comprendre comment il se peut que tant d’hommes, tant de villes, tant de nations supportent quelquefois tout d’un Tyran seul, qui n’a de puissance que celle qu’on lui donne, qui n’a de pouvoir de leur nuire, qu’autant qu’ils veulent bien l’endurer, et qui ne pourrait leur faire aucun mal, s’ils n’aimaient mieux tout souffrir de lui, que de le contredire. Chose vraiment surprenante (et pourtant si commune, qu’il faut plutôt en gémir que s’en étonner) ! c’est de voir des millions de millions d’hommes, misérablement asservis, et soumis tête baissée, à un joug déplorable, non qu’ils y soient contraints par une force majeure, mais parce qu’ils sont fascinés et, pour ainsi dire, ensorcelés par le seul nom d’un qu’ils ne devraient redouter, puisqu’il est seul, ni chérir puisqu’il est, envers eux tous, inhumain et cruel.
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Mais les gens soumis, dépourvus de courage et de vivacité, ont le cœur bas et mous et sont incapables de toute grande action. Les tyrans le savent bien. Aussi font-ils tout leur possible pour mieux les avachir.
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Mais ils ne font guère mieux ceux d’aujourd’hui qui avant de commettre leurs crimes les plus graves, les font toujours précéder de quelques jolis discours sur le bien public et le soulagement des malheureux. On connaît la formule dont ils font si finement usage : mais peut-on parler de finesse là où il y a tant d’imprudence ?
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Le Grand Turc s’est bien aperçu que les livres et la pensée donnent plus que tout autre chose aux hommes le sentiment de leur dignité et la haine de la tyrannie.
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À vrai dire, il est bien inutile de se demander si la liberté est naturelle, puisqu’on ne peut tenir aucun être en servitude sans lui faire tort : il n’y a rien au monde de plus contraire à la nature, toute raisonnable, que la justice. La liberté est donc naturelle : c’est pourquoi, à mon avis, nous ne sommes pas seulement nés avec elle, mais aussi avec la passion de la défendre.
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Dieu m’a fait cette grâce que tout ce que j’ai passé jusqu’à cette heure de ma vie a été plein de santé et de bonheur : vu l’inconstance des choses humaines, cela ne pouvait guère durer. Il était désormais temps de se mettre aux affaires, et de voir mille choses malplaisantes, comme l’incommodité de la vieillesse, de laquelle je suis quitte par ce moyen.
La plus grande partie des prudents et des sages est méfiante et n’a foi La plus grande partie des prudents et des sages, lui dit-il, est méfiante et n’a foi à une amitié qu’après que l’âge l’a confirmée et que le temps l’a soumise à mille épreuves. Mais nous, l’amitié qui nous lie n’est que d’un peu plus d’une année, et elle est arrivée à son comble : elle n’a rien laissé à ajouter. Est-ce imprudence ? Personne du moins ne l’oserait dire, et il n’est sage si morose qui, nous connaissant tous deux, et nos goûts et nos mœurs, aille s’enquérir de la date de notre alliance, et qui n’applaudisse de bon cœur à une si parfaite union. Et je ne crains point que nos neveux refusent un jour d’inscrire nos noms (si toutefois le destin nous prête vie) sur la liste des amis célèbres. Toutes greffes ne conviennent point à tous les arbres : le cerisier refuse la pomme, et le poirier n’adopte point la prune : ni le temps ni la culture ne peuvent l’obtenir d’eux, tant les instincts répugnent. Mais à d’autres arbres la même greffe réussit aussitôt par secret accord de nature ; en un rien de temps les bourgeons se gonflent et s’unissent, et les deux ensembles s’entendent à produire à frais communs le même fruit… Il en est ainsi des âmes : il en est telles, une fois unies, que rien ne saurait disjoindre ; il en est d’autres qu’aucun art ne saurait unir. Pour toi, ô Montaigne, ce qui t’a uni à moi pour jamais et à tout événement, c’est la force de nature, c’est le plus aimable attrait d’amour, la vertu.
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