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Critique de LeScribouillard


Je ne lirais pas - et ne lirais sans doute jamais - la fin de la Princesse de Clèves, de Mme de Lafayette. Non pas que le livre soit mauvais (cââââlmez-vous, comme dirait le poète), bien au contraire : faire ressentir toute la souffrance liée à un système de pensée auquel on accroche malgré tout, dans une époque de la vie où l'on est constamment assaillis de doutes, parsemé de quelques éclaircies d'espoir et de combats, voilà la meilleure chose qu'on puisse espérer en terme d'écriture de personnages. Seulement, encore faut-il le mettre en scène, et c'est sur ce point précis que Lafayette me dérangeait déjà avec Montpensier, une nouvelle (novelette, dirait-on de nos jours) avec des paragraphes à rallonge et quasiment sans dialogues. Eh bien, La Princesse de Clèves, dites-vous que c'est 500 pages de Montpensier.
Précisons tout d'abord une chose : si j'ai abandonné, c'est en grande partie parce que j'ai un grand nombre de livres plus importants à lire en urgence et que je n'arrivais pas à suivre la trame principale. Mais au-delà de ça, comme dans la plupart des romances, on suit un couple sur la durée, ce qui donne quelque chose de long, de lent, avec peu d'action et des délibérations mentales empiétant parfois sur le récit en lui-même. Sauf qu'ici, pas tout à fait : on nous présente dans le menu détail les moindres aspects politiques de la cour sans que ça ait forcément un impact direct sur le récit. du coup, avec tous ces personnages, dont certains portent le même nom que ceux de la Princesse de Montpensier, l'ensemble devient encore plus difficile à suivre.
Mais le véritable truc qui me fait tomber le livre des mains est toujours et surtout le style. Madame de Lafayette ne *raconte* pas, elle *dit* : on jurerait un compte-rendu résumé de ce que font les personnages plutôt qu'un récit doté d'intensité dramatique. Exemple : on vous dira "La princesse fit ci, la princesse fit ça", et jamais "La princesse songea à faire ci. Que se passerait-il ? Il arriverait X évènement, et alors Y machin se produirait. Tant pis ; il n'y avait plus le choix, à moins de Z. Elle fit ci et s'apprêta à faire ça". Ce qui nous donne un livre à la fois trop et pas assez développé, selon les points qui intéressent ou non le lecteur...
On pourra me rétorquer que c'est justement avec ce style bref (bien qu'avec les innombrables points-virgules et périphrases propres à tout ouvrage du XVIIe-XVIIIe je reste circonspect sur ce terme) et distancé que Lafayette coud admirablement son roman, cultivant un implicite caché que le lecteur se doit de démêler. Sauf que contrairement à par exemple Mme Bovary, où vous avez toutes les clés une fois que vous savez que tout le récit est au second degré, là on alterne premier et second avec tellement de subtilité qu'il faut lire et relire chaque passage afin d'être sûr que rien ne nous est passé sous le nez, ce qui n'a rien d'évident quand on n'est pas un historien de la période jansénite... Entretenir la finesse du lecteur, c'est bien. Mais au point d'en rendre des livres sybillins et de faire des monuments de la littérature française des ouvrages qui ne seront accessibles que pour une poignée d'instruits ?
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