Les mouvements religieux de liberté et de salut des peuples opprimés

... En conclusion ce livre veut être, à sa façon, et dans les limites bien définies qui sont les siennes, une histoire des cultures religieuses coloniales et semi-coloniales, mais pas seulement de celles-ci : une histoire vue selon une perspective particulière, du fait du lien évident entre vie religieuse et vie sociale et politique : une histoire, enfin, centrée sur un "moment" dialectique particulier, le moment "populaire" comme antithèse du moment officiel conservateur, dans le développement de toute culture religieuse.

... Notre centre d'intérêt est fourni par les religions des peuples qui vivent dans des conditions coloniales ou semi-coloniales, ou qui se sont récemment libérées du joug colonial. Chez ces peuples se fait donc sentir une oppression d'origine externe, oeuvre d'une puissance dominante. Toutefois, nombreuses sont les sociétés, non assujetties à l'oppression coloniale, parfois elles-mêmes "colonisatrices" et dominantes par rapport à d'autres sociétés, où se rencontre le cas d'une condition d'oppression exercée, dans leur cadre même, par certains groupes ou classes, sur d'autres groupes ou d'autres classes subordonnées. Et ce dernier genre d'oppression, d'origine interne, dû à la lutte des classes, suscite de multiples et inlassables mouvement de liberté et de salut. C'est ainsi que d'autres mouvements religieux du même genre purent surgir parmi des sociétés "primitives" avant l'époque coloniale, pour faire face - sur le terrain religieux - à des conditions oppressives déterminées par des agents imprévisibles tels que les guerres, les invasions, la misère, etc.