Le voisinage est une source d'inspiration sans fin. Certains livres qui explorent cette thématique sont plus réussis que d'autres, ceux de
Shari Lapena font partie de cette catégorie.
L'action se déroule dans un joli quartier résidentiel. Tous les habitants ont un train de vie confortable. Les couples s'entendent bien, sont même amis les uns avec les autres. Seulement, un jour, Tom constate que sa femme n'est pas chez eux. A peine a-t-il prévenu la police - ce n'est pas le genre de Karen de disparaître ainsi - que la police vient à lui : sa femme a été retrouvée dans un quartier à l'opposée de celui dans lequel ils vivent tous les deux, vous savez, LE quartier mal famé de la ville, celui dans lequel une personne "bien" ne mettrait jamais les pieds, ne traverserait même pas. Y aurait-il un problème dans l'urbanisme ? Oui, oublions un peu la mixité sociale, ce mot n'a pas sa place dans cette ville.
Problème : non seulement Karen a causé un accident, mais elle ne se souvient de rien. Là, cela gène la police, surtout qu'une autre affaire se présente à eux très rapidement : un homme a été assassiné dans ce fameux quartier mal famé, ce qui nous permet aussi de voir l'implication citoyenne de ses habitants.
Les enquêteurs font leur métier, c'est à dire qu'ils cherchent et trouvent. Il n'est pas question pour eux, surtout pas pour Rasbach, de se contenter des apparences et de ne pas aller au-delà. Karen et Tom sont des personnages qui semblent lisses, tout comme leurs voisins, et pourtant, ils sont tous les deux des secrets plus ou moins avouables dans leur passé, des choses dont il ne trouve pas utile de parler, des faits qu'elle n'a pas l'intention de révéler. Bref, ils ne sont pas des personnages manichéens, ils offrent plutôt une palette de gris intéressant. Leur voisine n'est pas en reste, elle qui a une vie qui pourrait ressembler à celle d'une desperate housewife : elle est femme au foyer, elle appartient à un club de tricot, elle tient un blog qui a beaucoup de succès. Elle ne parvient pas à concevoir un enfant avec son mari, qu'elle n'aime plus, qu'elle n'estime pas, et lui ne comprend pas ce qui se passe. Ce personnage met aussi en lumière le fait qu'en France les femmes ont la chance (enfin, presque toutes) d'avoir accès à un traitement contre la stérilité, ce n'est pas le cas ici.
Au fil de cette enquête, on peut se demander qui manipule qui. En dépit des multiples rebondissements, le récit est facile à lire, parce que le style est fluide, et parce que la traduction est réussie. Après la lecture de ce second roman, je me demande jusqu'où nous entraînera l'auteur pour le suivant.