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Critique de bdelhausse


Au risque de choquer, je me risquerai à comparer Bhopal au 11 Septembre... OK, on ne peut pas comparer. Bien sûr, le terrorisme est une abomination. Et Bhopal n'est pas le fruit de fous de dieu... c'est le résultat du fous du capitalisme débridé, de la loi du profit immédiat, du risque négligé.

Dominique Lapierre a eu son heure de gloire avec la Cité de la Joie, dont on a tiré un film, très kleenex, avec Patrick Swayze au mieux de sa forme.

Ici, Dominique Lapierre prend son bâton de pèlerin et nous raconte l'histoire d'une catastrophe annoncée. Nous suivons une famille pauvre qui pense avoir trouvé l'eldorado en s'installant dans un bidonville à deux pas d'une fantastique usine de l'Union Carbide. Cette multinationale, leader en biochimie, va produire un insecticide qui est supposé régler tous les problèmes de l'Inde, géant démographique qui n'arrive pas à décoller sur le plan économique et enchaîne les famines.

Dominique Lapierre fait un récit froid et rationnel la plupart du temps. On ne peut pas lui en vouloir de nous tirer quelques larmes (de colère, principalement, dans mon cas). Il fait la part des choses et nous raconte pas à pas l'origine d'une des pires catastrophes industrielles, lorsque l'usine à l'arrêt va libérer un nuage mortel (d'acide cyanhydrique, si mes souvenirs sont bons).

Entre l'Union Carbide qui ne révélera jamais quel produit est fabriqué dans l'usine (ni sa formule chimique même au plus fort de l'intoxication) et les officiels indiens corrompus, on a aussi les ingénieurs incompétents, mal formés, les dirigeants qui ne sont pas à leur place, les décideurs publics ou privés qui ne mesurent pas l'ampleur du problème, les courageux qui se défilent, les inconscients qui sauveront des vies au péril de la leur...

Il faut lire ce livre. Il faut l'intégrer. le digérer. Et se dire que c'est encore possible. Songeons à l'écroulement de cette manufacture textile au Bengladesh (où des enfants travaillaient pour des firmes de haute couture européennes). le récit de Dominique Lapierre est celui de la folie des hommes, de l'inconscience, de la dilution des responsabilités, de la fuite en avant d'une industrie non contrôlée (ou plutôt où les contrôleurs sont aussi parties prenantes dans le processus, juges et parties...). Union Carbide a fait faillite suite à cette catastrophe (il y a une sorte de justice...). le récit étant écrit en 2001, Dominique Lapierre aurait pu ajouter bien des infos, car les séquelles sont encore bien là. Les malformations se transmettent. L'Inde est toujours corrompue. Les responsables de cette catastrophe ne seront jamais inquiétés. Les victimes jamais indemnisées. L'hôpital qui a fini par être construit pour soigner des survivants (victimes d'insuffisances respiratoires et d'autres maux) est situé à l'autre bout de Bhopal, et les moyens de transport ne permettent pas de s'y rendre à moindre coût.

Mentionnons que Dominique Lapierre et Javier Moro ont cédé une partie des droits d'auteur pour financer des actions humanitaires à Bhopal. Un grand monsieur, ce Dominique Lapierre.
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