Prête moi ta plume
Je viens de perdre deux rémiges
Les ai retrouvées ce matin
Au creux du rocher craie
Poignée de cheveux d'ange
Aveu d’une tempête
Cauchemardesques franges
Légers plumets trempés au lagon de mes yeux
Mais l’encre sympathique se dérobe aux regards
Trop liquide, sans doute Ou trop antipathique
Est-elle dérangeante ou juste pathétique
Peut-être sera-t-elle lue en séchant au soleil
La sépia de la seiche a l’odeur de l’amer
Le fier albatros a taché son manteau
Les jeteuses d’essor savent que les coups de lune
Délavent les couleurs et déplument les rires
Je m’en irai, bancale, les ailes chiffonnées
Me coucher sur la grève avant que la marée…
Et l’âme de mon marin se perdra à jamais
Donner un sens à ma vie,
C’est prendre
Un non-sens interdit
Vent du désert
Embroussaille les dunes
Crinière de lion
À force de tuer le temps
Il saigne des secondes
Pour à Contre
Pour tous ces grands voyages que nous ne ferons pas
Pour autant de rivages où ne crierons pas terre
Pour cet avion si pâle en forme de trépas
Pour un vaisseau fantôme qui sous les draps se perd
Contre toi à chaque heurt
Contre toi je trépas
Pour tous ces clairs de vie que tu as occultés
Pour mes jambes coupées et pour tes lèvres closes
Pour tant d’obscurs soleils jamais réanimés
Pour la fuite du tant et du si peu de choses
Contre toi à chaque peur
Contre toi je trépas
Pour l’aigle décapité au fond de sa tanière
Pour savoir au matin l’improbable horizon
Pour une inspiration délitée en lanières
Pour dénouer l’amant à chaque expiration
Contre toi à chaque leurre
Contre toi je trépas
Pour tarir en reflux les mots écartelés
Pour les rires insensés engloutis dans la vase
Pour l’été vomissant une errance gelée
Pour le désir de mordre dans une terre arase
Contre toi à chaque heure
Contre toi je trépas
Pour un écheveau d’âme dénouée en poussière
Pour un iris aveugle embrasé de terreur
Pour n’espérer demain rejouant comme hier
Pour à contre courant éteindre la lueur
Contre toi à chaque cœur
Contre toi n’être pas
Poids Plumes
Extrait 2
Lettres mouillées si lourdes sous les pluies diluviennes
De se quitter un jour faut-il qu’on s’en souvienne
Babillardes du jour pour écraser l’absence
Au crépuscule aussi douce correspondance
Billets hurlés en vain le cœur tranché à cru
D’amour écarquillé que tu n’as pas reçus
Epître selon Saint-Jacques en relais composé
En d’éternelles pages sans cesse recommencées
Une prose lancée en vers et contre tous
Est-elle un témoignage appel à la rescousse
Un souvenir saignant d’une vie inachevée
Qui ne peut s’enmourir tant il est bien rivé
Amour mon cher amour à toi je les dédie
Ces feuillets trop brûlants de nous de nos écrits
Ce sont mes Belles-Lettres même si l’Académie
Jamais ne les découvre ni jamais ne les lit
Roman
Un roman à l’eau d’arrose est un roman fleuve
Poids Plumes
Extrait 1
Six kilos cinq cents grammes Le poids de notre histoire
Le poids de nos toujours Le poids de ce grimoire
Trois rames de papier plus quelques feuilles éparses
Le premier aveu fou était au mois de mars
Mille cinq cent douze Aquatres pour unique témoin
Tant de conversations à brûle et sans pourpoint
Tant des courriers m’ailés caressant nos instants
Que l’Amour insupporte de les cacher au temps
Missives de profundis de passion indicible
Orchidées déraison lancées sur papier-cible
Émoi et toi liés et le cœur de travers
À visage caché et à mot découvert …
Encoquillé fort
Escargot, cool limaçon
Queue s’en remord
Un Chat errant
Affalé sur ma terrasse
Je me gratte