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Critique de EvlyneLeraut


« C'était un homme qui aimait les îles »
Magistral, écume, vague, ressac, « L'homme qui aimait les îles » est une déambulation sur le sable labyrinthe. L'empreinte laissée après la pluie immanence, l'un des plus beaux livres au monde. Il est là, l'homme.Le regard en plongée vers l'horizon plénitude. Quête d'île à portée de rêve et de désir. L'intense détermination, coquillage qui ne vacille pas de par la force du vent. L'homme est attiré par l'appel d'une autre île que sa natale. Franchir le pont des doutes, nager vers l'île vierge à bâtir. Transmutation. L'homme (double de D.H. Lawrence) misanthrope, altruiste, bienfaiteur, visionnaire va rassembler l'épars. Cette île est un symbole.
« Non. Une île est un nid qui abrite un oeuf, et un seul. Cet oeuf étant l'insulaire lui-même. »
Trente-cinq ans, et une île, la possession d'un macrocosme. Tout est pur, volontaire et tenace. Les rebords sans frontières, l'invisibilité qui forge les profondeurs intrinsèques. Écho des vagues-pensées.
« Ainsi semble-t-il que même les îles aiment se tenir compagnie. » « Vous êtes dans l'autre infini. »
L'homme aime les îles et les gens. La responsabilité envers les hôtes de son île, les accueillir, leur prouver sa compassion, démontrer sa droiture, leur apprendre l'autarcie.
« Et l'insulaire n'était plus M. Untel. Pour tous les habitants de l'île, même pour vous, il était « le Maître ».
Transmettre, vivre sur l'île, l'exactitude ne vacille pas. L'homme est bon, vaillant, pragmatique. L'île porte-voix, porte-vagues et exaltation. Les saisons sont des vertus, des messages, des forces ultimes.
« le Maître n'était pas un tyran. Oh non ! C'était un Maître délicat, sensible et beau. Mais à sa façon, c'était un poète. Ils l'écoutaient chapeau à la main. »
Homme parfait, l'île est dentelle, espérance et renaissance. L'homme est flexible. Les îles paraboliques d'un cheminement intérieur. Néanmoins, les îliens ne sont pas tous magnanimes et parfois de bien mauvais compagnons. La tempête s'élève, le manteau de l'homme, du Maître s'envole dans les affres et les trahisons. L'île dénudée, rochers coupants et pain perdu. Il quitte son île, emmène dans ses poches meurtries, l'oeuf. Renouveler sur une île plus petite, la scène magnifique, avec des fidèles choisis comme compagnons. « L'homme qui aimait les îles » va chuter (peut-être) : le complexe de l'Albatros. Être piégé par ses démons intérieurs. Fuir la deuxième île telle la mauvaise herbe soufflée de rancoeur. Une double lecture s'invite subrepticement de parabole vêtue. La troisième île, mythe de Sisyphe, solitude meurtrière, la faim et la soif, les souffrances tenaces et rebelles, l'homme va-t-il mettre son genou dans le creux du sable ? S'écrouler ? L'hostilité des lieux semble un corps à corps devenu. Mirages et cauchemars, la mer encercle les errances et les perditions. Noire, gagnante, souveraine, Maîtresse devenue. L'As de pique noyé dans les turbulences. Confrontation des intériorités, la vague frappe et aveugle l'homme. Que va-t-il se passer ? La symbiose de tout entendement : Robinson Crusoé symbolique, mourir ou revivre ? Lisez ce texte sublime, d'évasion, de quête initiatique. D.H. Lawrence conte. Il n'écrit pas. Si vous faites oeuvre de silence, vous entendrez les chuchotements, les prières vertueuses, les îles chapelles et renaissantes, le Maître dire. Culte, lumineux, sablier infini, de quintessence, « L'homme qui aimait les îles » est une métaphore majestueuse. Lire face à la mer cette merveille et vous verrez comme tout change. Traduit à la perfection de l'anglais par Catherine Delavallade. Lire avec attention la préface brillante et apprenante de Thierry Gillyboeuf. Collection : L'arbuste véhément. Publié par les majeures Éditions L'Arbre Vengeur.
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