Au Diable leur Révolution, plutôt riche ailleurs que livre et crève-la-dalle en France, ajouta petit Paul.
Ni le Rhône, ni la Saône, ni les fortifications de la Croix-Rousse ou le fort de Sainte Foy, tombé par trahison, n'avaient pu protéger Lyon de la colère de la Convention. De ses traboules reliant secrètement une rue à une autre, de ses souterrains unissant les égouts romains aux plus récentes galeries de drainage des eaux de la colline de Fourvière, Lyon cultivait le goût du caché, du non-dit et du paradoxe. Lyon la catholique avait toujours vu croître les ombres les plus étranges dans les plis de sa très sainte chasuble, et ses ruelles tordues, ses passages cachés, expliquaient certainement qu'elle ait toujours été une porte ouverte vers un ailleurs étrange et interdit.
Qui parle des commissaires ou des députés ? Je vous parle de la foule, de l'ire populaire, de ce serpent qui se repaît de sang, littéralement. Vous pouvez tenir tête à un décret, mais pas à une horde en colère.
Depuis le petit bois tout proche, des dizaines d'ailes noires claquèrent. Montant depuis les branches, le peuple croassant s'éleva jusqu'à dépasser le sommet de la chapelle. Le corbeau isolé s'envola à son tour pour les rejoindre, et ensemble, ils plongèrent jusqu'au cœur de la ville.
Déjà, les cendres commençaient à tomber.
La fosse commune était certainement le point culminant de cette infamie. Et lorsqu'il soufflait un peu plus fort qu'à l'accoutumée, le vent apportant dans la mort une juste vengeance aux anonymes au travers d'un souffle putride.
Tout le monde se découvre innocent au moment d'embrasser la mort...
Un soleil lactescent finissait de choir sur la ville. Les nuages qui avaient plongé le jour dans un bleu dépressif avaient finalement été repoussés par le vent. Sur le front percé de leur empire, les nuées se voyaient déchirées par des lames d'un jaune pâle à la lumière diffuse. Patiente et placide en dessous de cette intrigue céleste, la ville noire feignait d'être insensible au bleu, au blanc et à l'or qui la caressait.