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3,41

sur 293 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Roman posthume de John le Carré, l'espion qui aimait les livres n'est pas un roman d'action ou d'aventure. Nous ne sommes pas dans un roman qui serait un parallèle écrit de la fameuse et fabuleuse série d'espionnage, le Bureau des Légendes. Mais cette atmosphère si tranquille est habituelle chez John le Carré. Il n'y a pas de suspens ou si peu, pas vraiment de retournement de situation. Ce sont des personnes plus que des personnages qui s'avèrent être des espions au service de Sa Majesté et qui sont des hommes et des femmes comme tout le monde. Les héros de le Carré ne sont jamais des super héros dont le courage, la bravoure et la force de caractère seraient des modèles pour les lecteurs. Les espions de le Carré sont des fonctionnaires qui font leur job mais, et c'est cela l'intérêt de ses livres, qui parfois dérapent, trahissent, jouent double jeu.
L'autre caractéristique des livres de le Carré c'est la complexité de l'intrigue : ce que l'on lit n'est pas ce que l'on lit. Il y a toujours des non-dits, des sous-entendus, des phrases quasiment subliminales qui obligent le lecteur a être sans arrêt attentif, à ne rien prendre pour argent comptant, à réfléchir à ce qu'il lit, à se demander ce que cette phrase veut vraiment dire. C'est pour cela que les livre de le Carré sont des best-seller, car par leur forme même ils nous plongent dans l'espionnage qui n'est pas une série de coups d'éclats, de cascades, de meurtres et de courses poursuites mais des informations détournées dans une phrase anodine, un jeu d'intelligences qui s'affrontent comme sur un échiquier géant. Ce n'est pas Mission Impossible ou James Bond, mais bien un monde souterrain où des individus vendent leur loyauté au détour d'un rendez-vous au café du coin.
Dans ce roman posthume puisque John le Carré est décédé en décembre 2020, Julian est un ancien trader de Londres qui a quitté la City pour ouvrir une librairie dans le Suffolk. Il rencontre un vieil homme, Edward Avon, à l'anglais chantant d'un accent d'Europe de l'est. Edward est Polonais et il est marié à Deborah, une anglaise qui se meurt. C'est au détour d'un paragraphe, que le lecteur comprend que le couple est en fait un duo d'agents secrets. Edward se lie d'amitié avec le jeune et naïf Julian et ils montent un projet étrange, créer une République de la Littérature dans le sous-sol de la librairie. En parallèle de cette intrigue peu intrigante on suit l'enquête de Stewart Proctor au sujet de la carrière de l'énigmatique Edward Avon dit Florian. le doute plane, qui est ce vieux monsieur qui semble fuir son épouse agonisante pour discuter littérature avec Julian ? Fait-il du trafic de porcelaines chinoises avec la brocanteuse locale ? A t-il une maîtresse cachée à Londres ? Et sa fille Lily, pourquoi cache-t-elle aussi son passé ?

Mais comme toujours avec John le Carré, rien de tout cela n'est clairement écrit, il faut le deviner, le supputer, faire ses propres hypothèses : qui est agent double ? Qui est qui avec ces noms de codes. L'auteur de vous facilite pas la tâche, rien n'est limpide, car en fait il veut vous faire vivre presque de l'intérieur le « stress » d'un espion qui ne sait jamais vraiment qui fait quoi, et pour qui la réalité n'est jamais évidente. C'est le style le Carré. Cela peut être déstabilisant car le lecteur n'est jamais certain de ce qu'il lit. Il faut être attentif à tous les mots car souvent c'est dans un petit détail
Dans cette histoire comme dans toutes les autres les agents secrets sont comme les Dieux de l'Olympe : ils vivent dans un Autre monde qui n'est pas accessible aux simples mortels, mais leurs vies n'est pas si extraordinaire et ils ont les mêmes soucis que tout le monde. Leurs femmes les trompent, ils ont des maîtresses, des enfants, des maisons à la campagne et ils prennent des vacances. En fait, un bon espion est avant tout Monsieur ou Madame Tout le Monde et pas James Bond en costard cravate accompagné d'une bimbo. Mais surtout les espions sont des maîtres du mensonge, et il faut bien avouer que les êtres ordinaires utilisent aussi souvent ce procédé mais avec beaucoup moins de virtuosité.

Je remercie les éditions du Seuil et Masse Critique pour cette lecture.
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« L'espion qui aimait les livres » est très bien construit, adoptant tout d'abord des points de vue de personnages extérieurs au monde de l'espionnage pour mieux souligner toute son opacité pour les non-initiés comme Julian ou le lecteur. Apparaissent ensuite les personnages initiés que sont Proctor et surtout Edward. Celui-ci apparait tout simplement fascinant, semblant prendre plaisir à manipuler tout le monde sans jamais totalement se dévoiler, pour mener sa barque comme il l'entend. Son rôle réel en même temps que son positionnement, figurent en creux dans l'ensemble du livre et tiennent en haleine le lecteur jusqu'aux dernières pages.

« L'espion qui aimait les livres » constitue le roman du monde réel de l'espionnage, bien loin de l'image fantasmée véhiculée par James Bond notamment. le livre nous présente un monde moins clinquant, fait d'écoutes, de surveillance et de messages transmis par des intermédiaires. Un monde qui parait un peu suranné avec ses HC, les Honorables Correspondants et ses agents qui peuvent être simples, doubles voire même triples. John le Carré partage une vision désabusée des services secrets britanniques pris dans des considérations politiques, un monde qui a perdu de sa superbe. Il souligne également les doutes qui peuvent habiter les agents, aussi bien face à un sacerdoce qui ne s'arrête en fait véritablement jamais, mais aussi face à des choix qu'ils peuvent ne plus cautionner. Au-delà, il questionne l'efficacité, l'utilité même d'un service qui semble ne plus avoir les moyens, les certitudes et la vision d'ensemble suffisants.

Lien : https://mangeurdelivres.word..
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D'abord, merci à Babelio et à audiolib qui m'ont donné la chance de remporter cet objet-livre.
Je n'avais jusque là pas encore testée ce type d'expérience de lecture hormis l'écoute d'extraits de quelques minutes.

Mon avis :

Un support physique pratique : une pochette découpée en trois avec d'un côté une présentation de l'auteur, le cd et de l'autre un descriptif de la carrière du comédien-lecteur.

Du point de vue du contenu : un découpage en pistes qui permet de réguler librement son temps d'écoute.
Une voix d'un professionnel qui porte l'histoire avec ses intonations, son rythme qui permet à celui ou celle qui écoute de laisser place à son imagination.
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On s'installe dans un roman de John le Carré comme dans un bon vieux fauteuil hors d'âge, prêt à passer un doux moment au coin du feu à encaisser avec flegme les pires menées de la raison d'Etat et des pouvoirs occultes de l'argent. Et on s'y plaît tellement que l'on n'a jamais envie d'en sortir, le dénouement comptant peu pour le plaisir qu'on éprouve à vivre dans cette ambiance toujours si british. Ainsi assiste-t-on confortablement installé, à toutes ces manipulations et coups tordus pratiqués avec flegme par des personnages dissimulateurs qui à force de pseudos et paravents ne savent plus très bien eux-mêmes qui ils sont,
Il y a un peu de tout cela ici, mais livré sous forme d'esquisse. Malgré les dénégations de son fils qui a considéré l'ouvrage comme terminé et donc publiable à titre posthume moyennant quelques aménagements mineurs (voir la postface), on se dit qu'il manque peut-être un peu de liant dans la recette d'un roman que le Carré avait gardé sous le coude, sans jamais se résoudre à le publier, l'enrichissant par couches multiples. Tout est toujours amené progressivement chez le Carré alors qu'ici tout va un peu trop vite. La structure y est, les personnages bien vite se mettent à vivre mais on regrette de les quitter trop tôt: deux d'entre eux au moins sont de très belles réussites. L'impression s'insinue une fois le livre terminé qu'il manque cent pages pour avoir un vrai le Carré, avec ses longues progressions méandreuses dans une intrigue dont les possibles prolifèrent. Ces cent pages « qui manquent » ne seraient pas celles d'un épilogue ou d'une suite non écrite. Elles auraient plutôt dû s'intercaler un peu partout, pour leur donner cette épaisseur qui séduit tellement chez cet auteur.
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