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Critique de magielivres


Le Médecin de Cape Town de E. J. Levy, une lecture passionnante, inspirée de l'histoire vraie du docteur James Miranda Barry.

Margaret Brackley, née à Cork, deuxième enfant de Mary Ann et Jeremiah Brackley, une fille frêle et gauche, une peau cireuse, des cheveux blond vénitien indomptables et des traits sans envergure. Elle préférait de loin les chiens aux poupées. Son pire défaut à la fin du XVIIIe siècle : elle était née fille.

Au printemps 1804, suite à la faillite de son frère, elle se rendit à Londres en compagnie de sa mère, pour réclamer l'aide de son oncle Jonathan, le frère de sa mère, qu'elle considérait comme un être unique. Elle n'avait que 9 ans.

Ne trouvant aucun soutien, un ami de son oncle, le général Fernando de Mirandus, finira par s'occuper d'elles. Il apprit à Margaret à lire à se débrouiller dans la vie, vive et intelligente, elle pouvait se diriger vers autre chose et éviter la pauvreté. le général et sa mère, eurent l'idée de la transformer en garçon, afin qu'elle puisse poursuivre des études de médecine.

En 1809, Margaret est devenue James Barry, cheveux courts et seins bandés, il put intégrer la faculté d'Édimbourg alors inaccessible aux femmes. Suite à ses excellents résultats, James Barry est entré comme chirurgien dans l'armée, a servi au Cap, sur l'île Maurice et en Jamaïque. Il s'intégra facilement à la population.

« C'était donc à la fois par curiosité et pour ternir ma trop bonne réputation que je me mis à fréquenter les bals Arc-en-ciel au cours de ces premiers mois au Cap. Les habitants de la ville se retrouvaient dans les tavernes du port et où la condition ne comptait plus – Malais et esclaves, soldats et affranchis, hommes, femmes et toutes personnes se trouvant entre les deux. Je n'avais pas à faire semblant d'admirer la beauté des femmes des bals Arc-en-ciel. Elles étaient exquises. Les Hollandaises et les Malaises, les Africaines et les Anglaises. Cela aurait été comme d'apprendre à admirer la beauté de l'aube. Elle vous coupait le souffle, me coupait le souffle, du moins. Cela ne s'apprend pas, la beauté des femmes. »

Les paysages du Cap sont magnifiquement décrits.
« La caravane longea d'abord la côte, l'océan pareil à un champ de pierres précieuses concassées – saphir, émeraude, jade le plus pâle, tourmaline et lapis-lazuli. Étincelant. Les terres me rappelèrent le paysage que j'avais quitté – les ajoncs et les roches colorées par le lichen en Écosse, les falaises couvertes au sommet d'un tapis vert irlandais qui tombaient à pic dans la mer. Mais les faucons, les renards, les lapins et les daims qui peuplaient ces régions du Nord étaient ici remplacés par l'antilope, le bonte-bok avec leur face blanche (leurs cornes étranges torsadées vers l'extérieur et leurs oreilles incurvées) et le zèbre des montagnes vient nous saluer, le bruit de nos chariots l'ayant fait sortir de sa cachette. »

Nous allons suivre, ce médecin dans ses itinéraires bien mouvementées, il aura toujours des parrains qui l'aideront à franchir les obstacles, mais difficile de se priver de son statut de femme, tout en les défendant. Des moments très durs l'attendent.

« L'habitude du silence était difficile à briser, c'était devenu un mode de vie ; les mots et les histoires restaient coincés dans ma gorge. On aurait dit un mensonge, cette vie, une fiction, une histoire de fantômes. Comme si ma vie était un sortilège dont je pourrais me délivrer en parlant, en prononçant les bons mots. Comment j'étais devenu qui j'étais, toutes ces années de solitude durant lesquelles j'avais essayé de me fabriquer moi-même pour être cet instrument utile, cette lame dépourvue d'émotion. Comme Psyché avec Cupidon, je ne pouvais aimer que si je n'examinais pas le corps ni le passé de trop près. »

Un très beau portrait, il prendra son métier à coeur, on peut presque oublier sa transformation. Une vie de mensonges et de sacrifices. Son but était d'être libre et de garder son nom. J'ai dévoré ce roman très intéressant et qui nous donne l'occasion de voyager. Les différences entre hommes et femmes seront très souvent mis en avant. A cette époque, il n'était pas question qu'une femme travaille, cela affaiblissait le rôle du mari, elles n'étaient là que pour régner sur la maisonnée et servir le maître, dans tous les sens du terme.

« Naturellement, c'était illégal d'être une femme sur un bateau de la marine. Il existait tellement de situations où les femmes étaient illégales – la médecine, l'armée, l'université. A en croire la loi, le sexe féminin devait être une puissance monstrueuse – risquant à tout moment de dépasser les hommes, constituant une terrible menace -, une force redoutable pour entraîner de telles contraintes. Il semblait que nous étions plus dangereuses que l'opium, la poudre à canon ou les Enclosure Acts combinés. »

Il connaitra un destin hors du commun, jusqu'à la fin de sa vie. Un récit plein d'émotions et passionnant.
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