Si je n’avais pas commencé à réfléchir, à découvrir moi-même les choses, j’aurais pu avoir une vie, en apparence, plus heureuse peut-être, jouir d’un plus grand respect.
Mais, bonheur et respect n’ont guère de valeur car, à moins qu’ils n’aient pour cause les motifs les plus vrais, ils ne sont que leurre. La réussite vaut à un homme le respect du monde, quels que soient ses dispositions d’esprit, ou les moyens qu’il a employés. Mais quelle valeur accorder à pareil respect ? Et quel bonheur intérieur cet homme là peut-il connaître ? Et s’il s’accommode de ce prétendu bonheur, son état me parait inférieur, son contentement de soi plus vil que ceux du plus abject animal.
Je vais envelopper mes deux chemises, avec mes chaussettes et mon habit du dimanche, dans le bout d’étoffe bleue que ma mère avait coutume de nouer autour de ses cheveux quand elle faisait le ménage, et je quitterai la Vallée.
Mais parler du monde qui est caché dans chaque femme est un douloureux voyage, car les mots ne sont pas habitués à l'exprimer, et se servir pour cela des termes usuels de la vie quotidienne n'est qu'une façon de sauter à cloche-pied sur des béquilles d'inégale grandeur.
Car, comme les hommes ont des poings et une tête pour se défendre, de même les femmes ont reçu, en part égale, pour se protéger dans leur féminité cette délicatesse de silence qui les entoure, telle une barrière faite de choses de l'esprit, de tranquillité, d'impuissance, de grâce, de tout ce qui est beau et féminin. Et, devant cette barrière, l'attaque virile de l'homme se brisera, ses bras resteront cloués, sa bouche close, sa vue s'éclaircira, son ardeur se calmera, son imagination vagabonde s'assagira.
Le bonheur n'est-il que le parfum d'une vie claire? Je me le demande. Vous ne le goûtez qu'une ou deux fois au cours de votre existence et, continuant à vivre, vous conservez sa saveur dans votre bouche, souhaitant retrouver sa plénitude pour y mordre à pleines dents, comme un bon repas auquel vous repensez et qu'en esprit vous dégustez de nouveau.
Il faut qu'un homme connaisse par expérience l'art du mensonge avant de traiter un autre d'hypocrite.
Oui, c’était vraiment le bonheur ; nous avions bonne maison, bonne nourriture, bon travail. Le soir, rien ne nous appelait au-dehors sinon le culte à la Chapelle, une répétition du chœur, parfois une lecture en commun
Je vais envelopper mes deux chemises, avec mes chaussettes et mon meilleur complet, dans le bout d'étoffe bleue que ma mère avait coutume de nouer autour de ses cheveux quand elle faisait le ménage, et je quitterai la Vallée.