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Critique de michfred


S'agit-il seulement des souvenirs d'une enfance privilégiée à travers le prisme égoïste et confortable duquel s'entrevoit, s'entrelit, le sort tragique des juifs de Rome pris dans la tourmente?...

Le récit  -faussement-  innocent de la narratrice, petite fille -très-riche qui a des Fraülein, des caméristes, des cuisinières, des maisons de " villeggiatura " un peu partout, qui passe de la via Flaminia à  Rome  à  Cortina, à  Rapallo, et autres lieux "molto chic" de la haute bourgeoisie italienne, est regardé sans complaisance par l'auteure adulte, qui souligne son ignorance de classe, , son inconsciente  cruauté,  sa superficialité puérile, en l'éclairant,  en contrepoint, par un essai historique parfois très général- les grandes dates du fascisme, de l'invasion allemande, etc..- mais aussi, et c'est le point le plus intéressant, par une recherche historique et critique très fouillée concernant la position du clergé romain et de la papauté à l'égard des italiens d'origine juive.

Elle met en lumière  l'attitude si différente des deux papes de la guerre, Pie XI et Pie XII,  la complicité quasiment avérée de ce dernier d'abord avec les fascistes, puis avec l'occupant allemand, et la mort plus que suspecte du premier à la veille d'une encyclique qui aurait changé à coup sûr le sort des juifs d'Italie...si elle n'avait mystérieusement disparu avec son auteur...pour ne refaire surface que 56 ans plus tard!

Les souvenirs légers ne le sont pas autant qu'ils en ont l'air.

Giorgio Levi, sommé par une concierge, fasciste zélée, de monter sa bicyclette jusqu' aux etages sans prendre l'ascenseur auquel il n'a plus droit, va perdre, de souvenir en souvenir, sa carrure de petit footballeur acharné et joyeux, jusqu'à disparaître sous le sinistre "Arbeit macht frei" d'Auschwitz ...

Quant à Madame Della Seta, gracieuse silhouette de vieille dame, venue généreusement fêter le déménagement de ses petites voisines avec un plat de bar somptueux, qui se souciera de son départ à elle, effrayé et précipité, quelques mois plus tard, et de sa sélection fatale, due à ses cheveux gris, sur la rampe d'Auschwitz?

Disparu lui aussi dans les brumes de Pitchipoï, le jeune Emmanuele, amoureux de la soeur aînée de la narratrice, qui a dû subir l'humiliation de voir son amie tordre le revers de sa veste en oreille de cochon? 

Opiniâtres et désolantes aussi , toutes les recherches de l'auteure devenue adulte  pour retrouver la trace de tous ces voisins charmants disparus dans la tourmente des lois raciales et celle de l'indifférence qui les a tolérées...

Voilà qui plombe d'une singulière gravité la légèreté apparente du récit.. .

Un livre qui mêle l'émotion d'une histoire individuelle à l'indignation que soulève l'histoire collective.

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