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Critique de nilebeh


Magda Verneuil, vieille dame de quatre-vingt dix ans, trône dans son fauteuil au milieu du salon de son très bourgeois appartement parisien. Autour d'elle, les « endeuillés », comme elle dit, circulent lentement, prononcent des mots de consolation qu'elle entend au loin, perdue dans des souvenirs anciens. Elle vient d'enterrer Henri, son mari, dont on devine qu'elle a quelques griefs à son encontre. Distant, vaguement méprisant à son égard (douce mais si insignifiante Magda, selon lui), l'a-t-il rendu heureuse ?

Les souvenirs d'enfance affluent, l'amitié quasi fusionnelle avec Prune Lewall, (en fait nommée Sarah-Jeanne), sa presque soeur, ces moments où, très sérieusement, les deux fillettes se faisaient la conversation, comme les grands ! D'ailleurs, elles vivent une enfance très évoluée, intellectuelle, artistique, traitées avec considération par leurs parents. Enfin, surtout Prune, Magda est depuis toujours, si douce, si effacée ! Tout de même, elle partage des moments précieux avec son père, discussions de grandes personnes et promenades littéraires dans Paris, quelques années avant la guerre.

Ils ont du mérite (de la chance aussi!) à vivre ensuite sans trop de difficulté dans ce Paris occupé où les bottes martèlent comme autant de menaces. Pourtant un jour, Prune, petite juive passionnée et ardente, se fait plus rare, engagée dans les « EI » (Éclaireurs et éclaireuses israélites), les conversations entre les parents de jeunes filles se font plus vives (mais pourquoi s'enferment-ils pour discuter très fort?). Les réunions entre amis se raréfient. Jusqu'au jour où les Verneuil accueille les Lewall afin de les aider à fuir le nazisme et les rafles. Et l'horreur se produit. Avec ses conséquences inattendues : pourquoi le père de Magda s'enferme-t-il dans un silence épais et définitif ?

Magda, douce mais clairvoyante et persévérante, Prune, coeur enflammé et militant, Blanche Lewall, longiligne pianiste tout en douceur et en mélancolie comme une Ophélia moderne, les portraits de femmes dominent le roman. Des secrets du passé vont resurgir entre les mains de la vieille dame, secrets qui expliquent tout, tout ce que le lecteur n'a pas pu saisir malgré une lecture attentive.

Terrible contexte de guerre, de violence, de dénonciations, de petites et grandes misères. Beau travail sur le souvenir, les années d'enfance, l'adolescence et ses exigences, l'engagement. Un livre bien écrit, qui charme – au sens magique du terme – par la virtuosité de ses évocations. Un livre qui amuse aussi parfois, le temps d'une facétie. A relire, doucement.
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