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Critique de Franz


La 4e aventure du journaliste reporter Guy Lefranc parue en 1970 dans le journal Tintin est un sommet dans l'oeuvre de Jacques Martin (1921-2010) au scénario et dans celle de Bob de Moor (1925-1992) au dessin. Une étonnante osmose s'établit entre les deux auteurs. le pointilleux Martin trouve dans le style caméléon du dessinateur flamand un résultat qui transcende les ego et bat en brèche les critiques les mieux fondées. le scénario et le découpage constituent une indéniable réussite. Il n'y a aucun temps mort. L'attention est relancée à chaque page. L'histoire inspirée d'un fait divers réel est palpitante et réserve des surprises. le loup peut paraître bien fluet face aux appétits voraces des requins de surface pleurant des larmes de crocodile mais les vrais grands squales viennent des profondeurs. On peut gloser sur la nouvelle couverture du fac-simile qui n'est pas dans l'esprit des précédentes visant à dramatiser l'histoire. Il suffira de consulter en fin de volume l'excellent dossier consacré à la genèse de l'album afin d'admirer les différentes illustrations tirées du journal Tintin ainsi que les nombreux projets de couverture faits par Jacques Martin.
Le pont des Diablons explose et le village montagnard de Saint-Loup (copie conforme du village suisse de Saint-Luc) se trouve coupé du monde. Un rire démoniaque accompagne le sinistre et se répand dans la montagne. Les villageois sont tendus, proches de la panique. Heureusement, le journaliste Lefranc appelé à la rescousse va mener l'enquête. Au petit matin, la ferme Maubois a pris feu et le même rire résonne alentour. Très vite Guy Lefranc a repéré une maison construite sur un nid d'aigle surplombant le village, tout en haut du mont des Diablons. L'hôtel des Anglais aujourd'hui abandonné semble être toujours habité mais la fumée qui paraît s'échapper de la cheminée est peut-être une chimère, un nuage de poussière, une nuée errante. Afin d'en avoir le coeur net, Lefranc décide d'escalader la paroi ouest des Diablons pour aboutir au pied de l'hôtel mais une avalanche déclenchée intentionnellement le fait dévisser. Les violences vont s'accumuler : la cloche de l'église se décroche, les câbles du télésiège se rompent, la poutre de l'étable s'effondre. La mort est évitée de justesse mais elle rôde sans relâche avec le rire sardonique de circonstance. A la moitié de l'album, le flash-back sur une dizaine de planches va apporter l'éclairage nécessaire à l'aventure et révéler au grand jour la sombre mesquinerie d'une partie des villageois, édile en tête. Une escroquerie peut ruiner un homme et le pousser au suicide. Tout le reste s'ensuit : ressentiment et désir de vengeance des descendants. le loup le plus dangereux est souvent le plus avenant.
On peut toujours trouver que les tics de la bande dessinée franco belge de l'époque provoquent de vieilles démangeaisons mais ici, les méchants sont davantage nuancés que dans les albums précédents et restent ainsi crédibles et puis l'atmosphère montagnarde est magnifiquement rendue ; elle nimbe d'une aura troublante l'histoire somme toute convenue d'une filouterie mâtinée de jalousie. Il est dommage que le boss, le père de Tintin, ait contraint Bob de Moor à réintégrer les studios Hergé car ce one-shot a fait mouche. le Repaire du loup est une madeleine délicatement parfumée à la fleur de l'enfance.
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