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Critique de domi_troizarsouilles


Je n'aurais sans doute jamais choisi ce livre si je ne l'avais pas reçu dans un swap, car franchement, je trouve cette couverture horrible ! Entre éloge à la cigarette et femme paumée sans espoir, c'est d'un désenchantement qui fait peut-être très années 1960-70, sauf que l'histoire ne se passe pas dans ces années-là, et franchement ça ne me plaît pas… le pire, c'est que ça reflète au moins en partie ce qu'on trouvera dans le livre : notre héroïne fume, fume et fume encore. Les seuls points qui m'ont encouragée à le lire quand même, c'est, d'une part, que je fais confiance aux choix de ma swappeuse ;) et d'autre part, que ça m'a fait penser à la chanson « Sympathique » de Pink Martini (le lien YT pour celles et ceux qui ne connaîtraient pas : https://www.youtube.com/watch?v=pp-wmEKWLSo ), chanson qui m'a toujours laissé une impression partagée. Elle est tout autant imprégnée de cigarette et vraiment ça me dérange, c'est presque épidermique (cela dit, je ne veux en aucun cas juger les fumeurs, c'est plutôt une douleur liée à des souvenirs… notamment de mon papa, qui a fumé toute sa vie, et le tabac faisait partie des éléments qui ont précipité son décès…) ; mais allez savoir pourquoi, j'aime bien cette chanson !

Et voilà : ce livre m'a fait exactement le même effet !
Un emballage presque repoussant, mais une curiosité… et on entre de suite dans cette histoire, dès les tout premiers mots ! L'autrice rend parfaitement ce que devient la vie après un deuil impossible – oh, Dieu merci (s'Il existe), je n'ai jamais connu un tel deuil ! et ne le souhaite à personne, mais en tout cas, elle le rend tout en sensibilité et profondeur. Les réactions, le laisser-aller, un certain refus de vivre de Diane, notre héroïne, semblent tout à fait plausibles et terriblement humaines.
Sa soudaine décision d'aller vivre quelque temps sous d'autres cieux, en l'occurrence en Irlande, dans une certaine solitude et dans un vague hommage à son mari disparu (car il aurait aimé l'Irlande… à cause de son goût pour la bière !), est un classique et on se dit pourquoi pas ?

On glisse alors, depuis un départ façon littérature contemporaine qui sonnait tellement juste, vers une romance que l'on voit venir comme le nez au milieu du visage et en clignotant… pourtant on n'entre jamais dans cette mièvrerie que j'ai parfois trouvée dans tant et tant de romances. Certes, j'ai appris à apprécier cette « littérature sentimentale », mais il faut bien avouer que le niveau moyen des romances n'est quand même pas synonyme de qualité littéraire exceptionnelle : entre les autoéditions bourrées de fautes d'orthographe ou syntaxiques, et les histoires –même à compte d'éditeur - répétitives sans relief, on se dit que la réputation désastreuse des séries Harlequin ne s'est pas faite pour rien.
Cela dit, j'ai aussi, parfois, trouvé de véritables perles littéraires… et alors, sans aucune hésitation, ce livre-ci en fait partie ! le niveau de langage, sans être particulièrement soutenu ou recherché, est clairement à la hauteur de bien d'autres romans classifiés comme de la « vraie » littérature, grâce à un vocabulaire qui ne dévie jamais vers le gnangnan, une mise en place des éléments qui n'a pas l'air forcée pour que tout arrive au premier baiser, et une héroïne forte malgré toutes ses faiblesses. En outre, malgré la dureté du sujet, c'est toujours très agréable à lire : léger mais juste dans les moments durs, adéquat et sans exagération dans les moments légers, c'est vraiment très bien dosé ! Et, par-dessus tout, l'intrigue de départ – ce deuil impossible - reste là comme en filigrane, jamais oublié, et en même temps il évolue : la douleur de Diane, son incapacité de jamais revivre « comme avant », son avancée dans une maturité inévitable aussi, restent prégnantes sans exagération, toujours touchantes sans jamais tomber dans la mièvrerie.

Quant aux personnages, j'ai ressenti une certaine admiration pour Diane, sans tout à fait réussir à m'attacher à elle. Je ne pourrais dire si c'est parce que ce personnage ne se veut pas attachant, ou si c'est un réflexe spontané de non-implication, une espèce de superstition qui me protégerait de jamais me trouver dans une situation similaire à la sienne. du côté d'Edward, ça n'a pas été le grand amour non plus : on aime son côté bad boy, mais il est quand même ultra-cliché, et c'est sans doute lui, plus que n'importe quel autre élément du roman, qui aurait pu précipiter toute l'histoire dans une romance façon chick-lit de bas étage ! En revanche, j'ai beaucoup apprécié les personnages secondaires : Félix, même s'il est lui aussi assez cliché, et Judih notamment, sont vraiment bien travaillés, et avec ça terriblement sympathiques, on a envie de les rencontrer ! J'ai aussi beaucoup aimé le vieux couple d'Abby et Jack, plus en retrait, mais eux aussi ont quelque chose de très touchant et juste (j'ai beaucoup répété ce mot, mais je n'en trouve pas d'autre qui exprime aussi bien les choses) qui apporte une petite touche humaine supplémentaire à tout le roman.

C'était donc un livre qui ne paie pas de mine, à cause de sa couverture beaucoup trop enfumée à mon goût, mais qui révèle un véritable petit bijou de sensibilité et de profondeur, traitant d'un deuil impossible d'une façon extrêmement juste, en glissant dans une romance à la limite du cliché, mais en gardant le cap initial malgré tout, avec aussi des personnages secondaires très sympathiques.
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