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Critique de Pantasiya


Si, comme moi, vous avez lu les romans de George R.R. Martin liés au Trône de fer et que vous ne prenez qu'ensuite connaissance de cette série de livres-ci, la surprise sera de taille. Qui aurait cru que ce génie de littérature fantastique médiévale s'était d'abord consacré à de la science-fiction urbaine?

Étonnamment, ce n'est qu'à la fin du 3e tome que l'auteur explique le cheminement l'ayant amené à la création de Wild Cards, dont le premier tome fut publié en 1987, dans une association avec plusieurs autres auteurs. Dans la postface du 3e tome, il explique comment la création d'anthologies « décrivant un univers partagé par plusieurs auteurs » prit son envol, mentionnant à juste titre Marvel et DC au niveau des bandes dessinées, qui « avaient également développé des univers partagés : les héros et les méchants vivaient dans le même monde; leurs chemins se croisaient et l'on retrouvait régulièrement leurs amis, leurs amours et leurs ennemis. »

Description qui s'applique exactement à Wild Cards, « la plus ancienne série d'univers partagé, avec douze volumes chez Bantam, trois chez Baen et deux autres sous la forme de livres électroniques ». Dans cette postface, George R.R. Martin explique les tendances de l'époque, avec les écueils littéraires liés à ce type d'oeuvres collectives et sa volonté d'aller « beaucoup plus loin que tout ce qui avait déjà été fait dans ce domaine », d'où l'appellation de « mosaïques romanesques », par distinction à ce qui se faisait alors. On y apprend que le canevas de la série fut conçu par groupes de trois, quatre et cinq livres. La révélation de cette structure donne un bon indice au lecteur quant au rythme du dévoilement des intrigues.

Grâce aux précisions de George R.R. Martin, on comprend qu'au niveau littéraire, l'écriture de ce premier tome de Wild Cards était avant-gardiste. Ce qui explique sans doute l'impression tenace du côté « brouillon » de cette première formule chez le lecteur. Car la lecture de ce premier tome est ardue et a beaucoup à envier à celle du troisième tome de la même série : Wild Cards-Jokers Wild, qualifié par George R.R. Martin de « véritable mosaïque romanesque (…) une narration unique dans laquelle tous les personnages, les péripéties et les histoires se recoupaient du début à la fin en une sorte de collaboration à sept mains » afin d'en arriver à un « livre qui se lise comme un roman offrant de multiples points de vue au lieu d'une simple suite de nouvelles reliées entre elles. »

En conséquence, il ne faut pas s'étonner du côté « décousu » de ce tout premier tome de la série, qui a été écrit par onze auteurs et qu'on croirait composé à la façon du jeu « raconte-moi une histoire », où chaque participant raconte un bout de l'histoire à tour de rôle et où chacun est libre de poursuivre à sa façon, en respectant l'ordre chronologique ou en effectuant des retours dans le temps, tout en présentant à sa guise de nouveaux personnages. Cette structure narrative a de quoi faire sourciller puisqu'il est très difficile pour le lecteur de trouver des personnages auxquels il puisse espérer pouvoir s'attacher et surtout revoir apparaître dans la suite de sa lecture.

L'emploi du langage familier et du jargon populaire ralentit également la lecture de ce premier tome, qui est aussi très généreusement garni de mentions de marques commerciales de produits de consommation existant dans les années 1946, dans lesquelles se déroule l'histoire, mais qui ne sont pas nécessairement connues de nos jours.

Néanmoins, la persévérance du lecteur se voit récompenser dès qu'on aborde les tomes suivants puisqu'on a alors une idée beaucoup plus précise de l'identité des personnages principaux et du contexte général qui est alors fixé clairement.

Dans une note au début de ce premier livre, George R.R. Martin prend le soin de préciser : « les essais, articles et autres écrits compilés dans cette anthologie sont entièrement fictifs ». Cette mention peut faire sourciller le lecteur, bien conscient de tenir entre ses mains une oeuvre de science-fiction et imaginant difficilement qu'une personne puisse confondre ce type d'histoire avec un documentaire historique. Néanmoins, l'avertissement prend tout son sens suite à la lecture de l'oeuvre : celle-ci déborde de références à des faits et personnages historiques bien connus. Les auteurs de ce collectif ont donc fait bon usage de l'adage qui veut qu'un mensonge tissé le plus près possible de la vérité soit également le plus crédible…

Dans ce présent livre collectif, Georges R.R. Martin est l'auteur du prologue, des cinq interludes et de la nouvelle intitulée « Partir à point ». Cette dernière met en scène le personnage de Thomas Tudbury, dont les pouvoirs de télékinésie lui permettront de devenir la « Grande et Puissante Tortue ». Dans ce monde bouleversé par la contamination d'un virus extraterrestre tuant ou modifiant l'ADN des victimes, les personnes comme Thomas ayant reçu un don enviable sont désignées comme étant des « As », par contraste avec les « Jokers », souffrant de difformités ou d'altérations nullement désirables.

En conclusion, malgré l'histoire digne d'intérêt, le lecteur s'immerge difficilement dans ce premier tome de Wild Cards avec ses 21 sections distinctes qui ne s'agencent pas comme des chapitres d'une même histoire, contrairement au 3e tome de la série.
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