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Critique de gerardmuller


Le mystère Frontenac/François Mauriac
Blanche Frontenac née Arnaud-Miqueu, veuve de Michel Frontenac élève à Bordeaux avec courage cinq enfants, trois garçons et deux filles en bas âge :
« Tout son être trahissait la fatigue, l'épuisement de la mère que ses petits dévorent vivante. »
Pour elle, le bonheur personnel n'a pas lieu d'être : Blanche agit pour le bien commun et l'intérêt familial.
Xavier, le frère célibataire de Michel est adoré des enfants et ne manque pas une occasion de prendre soin d'eux. Il a renoncé à sa part d'héritage au profit de ses neveux, mais gère leurs biens, vignes et propriétés diverses dans la région bordelaise. Il demeure à Angoulême où il vit en concubinage distant et secret avec une ancienne prostituée, Josefa. Il vénère la mémoire de son frère et bien qu'athée il fréquent assidument le cimetière pour s'incliner devant le caveau familial :
« le Frontenac vivant se découvrait devant les Frontenac retournés en poussière. Il était là, n'ayant rien à dire ni à faire, pareil à la plupart de ses contemporains, des plus illustres aux plus obscurs, emmuré dans son matérialisme, dans son déterminisme, prisonnier d'un univers infiniment plus borné que celui d'Aristote. »
Xavier est bien un être borné, obtus, ligoté de préjugés, respectueux de l'ordre établi, pour qui la prégnance des liens familiaux l'emporte sur tout. Il a le culte de la famille comme Blanche, Jean-Louis et Yves. Les liens du sang sont pour eux tout puissants ainsi que le poids de la tradition.
Comme toujours chez les personnages deMauriac, la vie n'est pas une recherche du bonheur mais un accomplissement du devoir. Jean-Louis le fils ainé de Blanche, étudiant en philosophie, s'adressant à son jeune frère Yves le poète :
« As-tu remarqué ? C'est un mot qui ne sort jamais de leur bouche, le bonheur …Non pas le bonheur, mais le devoir, une certaine forme du devoir… »
Combien de temps encore Xavier pourra-t-il celer sa liaison avec Josefa ?
Comment Jean- Louis, brillant étudiant, protecteur de ses frères qui ont droit à toute sa tendresse, va-t-il parvenir à poursuivre se études jusqu'au doctorat lui qui est pressenti pour diriger les domaines familiaux ?
Yves verra-t-il ses talents littéraires récompensés, lui le bohème rêveur, pessimiste dépressif ?
Dans un style éblouissant, Mauriac nous offre ici un récit où l'amour est omniprésent, filial ou fraternel, qui marque le lecteur non pas tant par l'intensité de l'action que par l'aspect introspectif, psychologique et intimiste teinté naturellement d'autobiographie. Un bonheur de lecture qui nous plonge au coeur de la lande bruissante et parfumée de résine.
Les dernières lignes du dernier chapitre sont sublimes :
« le mystère Frontenac échappait à la destruction, car il était un rayon de l'éternel amour réfracté à travers une race. L'impossible union des époux, des frères et des fils, serait consommée avant qu'il fût longtemps, et les derniers pins de Bourideys verraient passer, non plus à leurs pieds, dans l'allée qui va au gros chêne, mais très haut et très loin au dessus de leurs cimes, le groupe éternellement serré de la mère et de ses cinq enfants. »

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